dimanche 31 mai 2009

Une autre façon de s'abstenir.

Bien des Européens vont "mal" voter, dimanche prochain. Rien n'y fait, semble-t-il : les citoyens de l'Europe des 27 font la grêve des électeurs. Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ont senti le danger et appellent ensemble à aller voter, (ils n'en sont plus à faire voter pour l'UMP et la CDU). Un rejet, non de l'Europe mais de la politique européenne, est en train de se manifester puissamment. Inutile de culpabiliser les abstentionnistes, cette fois! La plupart n'iront pas pêcher à la ligne mais resteront chez eux.


Dire non est une action...

Tous les tenants de la politique des partis vont, jusqu'au bout, tenter de réveiller les électeurs, quitte à réutiliser les "vieilles ficelles" : l'insécurité à droite, le vote sanction, à gauche.

Au soir du 7 juin, se réjouiront les naïfs et les aveugles qui n'auront pas vu le désaveu cinglant de cette non participation volontaire! L'UMP fera valoir qu'elle est en tête, donc confortée dans sa politique! Le PS prétendra qu'il demeure la seule possibilité d'alternance capable d'entrainer l'ensemble de la gauche vers une victoire, en 2012. Le MODEM tirera argument de son score à deux chiffres pour tenter de démontrer que la troisième force pouvant mettre à mal et Sarkozy et les socialistes en recul, c'est lui. Les écologistes, rassurés par leur 4ème place, rappelleront que la seule politique européenne et verte possible passe par eux. Le PCF et le "Parti de Gauche", associés, feront ouf ensemble, s'ils franchissent la barre des 5%. Le NPA comptabilisera les bribes de pourcentage obtenues au-dessus du score d'Olivier Besancenot, aux présidentielles. Le FN éructera en criant au voleur après la nouvelle razzia de l'UMP sur ses électeurs. Les ultranationalistes démontreront que l'Europe n'est plus. Les autres se réjouiront d'avoir pu accéder, par la campagne officielle, à l'oreille des Français... Personne ne voudra dire sa déception ni les risques qu'une telle situation va nous faire courir.

Car nous voici au pied du mur : l'Europe sans les Européens perd toute existence politique. L'Europe des gouvernements n'est pas l'Europe. L'Europe des 27 est inachevée et la mise à l'écart de l'Albanie, de la Turquie, de la Croatie, etc..., brise une dynamique d'élargissement qui faisait la force de l'Europe des 6, puis des 9, puis des 12, puis des 15, puis des 25, puis des 27... L'Europe qui ne s'étendrait plus irait vers une fin inéluctable par pourrissement ou désintérêt. L'Europe de la paix, du succès économique et de la garantie du niveau social a besoin de croître encore, ce qui oblige à repenser ses institutions, ce à quoi les États s'opposent.

Quand Octave Mirbeau, en 1888, parlait de la grêve des électeurs, il pensait surtout à la duperie des scrutins et à l'exploitation politicienne des votes. Cela reste pertinent, aujourd'hui, mais il s'y ajoute une donne nouvelle : on ne vote que si l'on influence les décisions des mandatés. Sûrs de rester éloignés du Parlement européen, même s'il s'y prend des décisions très importantes, les citoyens s'écartent d'une élection multimodale, devenue sans valeur puisque sans effet sur la plus importante des co-décisons possibles : celle où les Européens pourraient intervenir dans les affaires qui les concernent et pas seulement par délégation! Trop loin, trop technocratique, trop dépendant des gouvernements cogérant les politiques européennes, trop confondu avec les enjeux nationaux, le Parlement européen est un géant flasque. Ou bien il ne sert à rien, ou bien il sert à tout, y compris à mener en sous main les politiques qu'on ne peut imposer aux peuoles frontalement État par État. Et là apparaît le péché, mortel pour la démocratie, qu'aura été le refus d'accepter le rejet du Traité constitutionnel en 2005. Tout se décide ailleurs : inutile d'aller voter.


Et quand on ne s'abstient pas, tient-on compte du referendum?

On ne va donc pas voter, et de plusieurs façons. Ne voteront pas (les plus nombreux), ceux qui votent, ordinairement, et qui sont persuadés, quoi qu'on leur dise, que leur vote ne changera rien aux crises économique, financière, écologique, sociale et politique qui s'emboitent actuellement pour conduire l'Occident vers une mutation qu'aucune parti ne prend suffisamment en considération. Ne voteront pas ceux qui iront jusqu'au Bureau de vote pour y déposer une enveloppe vide, puisque aucun choix n'est pertinent. Ne voteront pas ceux qui iront jusqu'au Bureau de vote pour y déposer un Bulletin nul ou annulé, récriminant ou commentant sévèrement les échecs des partis. Ne voteront pas ceux qui iront jusqu'au Bureau de vote pour y voter blanc et pour dire la non pertinence du choix offert, car, scandaleusement, leur vote n'aura aucune validité Ne voteront pas ceux qui iront jusqu'au Bureau de vote et qui choisiront, sciemment, une liste ne pouvant atteindre les 5% nécessaires en France pour servir à la désignation d'un député! Ne voteront pas, non plus, ceux qui auraient voulu aller jusqu'au Bureau de vote, puisque vivant en Europe depuis longtemps, mais qui n'ont pas droit à la citoyenneté européenne puisque "ressortissants non-communautaires"... Je ne parle pas, enfin, de ceux qui n'iront pas jusqu'au Bureau de vote car non inscrits sur les listes électorales françaises (pour les négligents ou les objecteurs de vote) ou sur les listes électorales complémentaires des étrangers "communautaires" (pour ceux qui n'ont pas su, ou pas voulu effectuer une inscription préalable en mairie). Bref les non-votants seront, de toute façon, plus nombreux que les votants, ce qui devrait être sanctionné par une annulation du vote, mais cela engendrerait un désordre politique colossal!



J'irai-ne-pas-voter, en me rendant dans le Bureau où je vote ordinairement, pour choisir l'abstention politique qui me conviendra le mieux. Mais, cette fois, je me solidariserai de ce refus d'un jeu de dupes où même les candidats qui ont ma sympathie ne pourront tenir aucun un rôle satisfaisant, s'ils sont élus. Que ceux qui se contenteront d'être "députés européens" prennent garde : la donne a changé et il sera vite impossible de faire comme si l'Europe, elle, n'avait pas changé!

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Le 3 octobre 2013.
Et maintenant, exprimez-vous, si vous le voulez.
Jean-Pierre Dacheux

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