vendredi 4 mai 2007

J'entre en résistance

Ségolène Royal l'emporterait-elle, in extremis, dimanche, que je ne changerais rien à ce texte.


J'entre en résistance.

Mais que veut ce pays?
Il s'est cassé en deux :
la France de ceux qui auront réalisé le cumul électoral de leurs désirs de s'enrichir,
la France de ceux qui n'aspirent qu'à mieux vivre et sont désormais dans la sous-France.

Je demeure dans cette France là, la petite, l'humiliée.
Non que je sois, dans mon quotidien, en difficulté
mais parce la vie n'a pour moi aucun sens
si la solidarité a des bornes.

Au moment où Bush commence à perdre pied,
alors qu'Olmert est poussé vers la sortie,
quand Blair annonce son départ,
cependant que Berlusconi échoue à chasser Prodi,
tandis que Zapaterro tient bon en Espagne,
pendant que Merkel évite de trop droitiser l'Allemagne,
nous allons probablement nous offrir un néo conservateur?

Nous pouvions bien donner des leçons aux USA
tancer leur impérialisme agressif,
ou vanter notre modèle social!

La stupéfaction et la honte s'abattent sur nous.
Stupéfaction devant cet imprévu.
Honte de n'avoir rien vu venir.

Hier, Sarkozy annonçait que, d'ici deux jours,
commencerait le début de la fin de l'époque ouverte en mai 1968.
C'est le discours sans complexe de la plus vieillotte réaction.

Hier, symboliquement, je me suis rendu à Paris
assister à la présentation du livre de Serge Portelli :
Nicolas Sarkozy, une république sous haute surveillance.
C'était dans l'espace de la librairie Résistances.

Car, pour ma part, je n'attends pas le soir du second tour
pour dire que j'entre en résistance.

Il va falloir du temps et de la peine,
de la pensée et de l'action,
pour simplement empêcher la régression.

Mais les problèmes occultés vont ressurgir,
au premier rang desquels le désastre écologique
avec le traitement des causes humaines du réchauffement climatique
avec l'obligation de renoncer vite à une croissance indéterminée.

La France se confie donc à un gourou au pire moment.
Elle a succombé à ses peurs.
Échapperait-elle, au dernier moment, à cette épreuve,
que les questions les plus radicales n'en seraient pas moins posées.

Car les effets de cette tentation ou de cet abandon, ultra-libéraux, vont être considérables.
Seul aspect positif : tout est remis à plat.

La gauche, qui ne sait plus ce qu'elle est, est à repenser.
Le socialisme, qui ne sait plus où il est, va entrer dans ses contradictions.
La gauche de la gauche va devoir renoncer à son sectarisme ou mourir.
Les écologistes vont devoir se refonder dans ce contexte!

L'anti ne suffit plus. Il faut proposer l'autre.
L'antilibéralisme n'est qu'une posture justifiée de refus.
L'altermondialisme est une dimension planétaire d'une offre nouvelle.

Peut-on avec les législatives limiter les dégâts?
C'est notre devoir d'essayer, mais je ne le crois pas possible.
Les causes de l'échec des présidentielles ne sont pas dissipées.

Le PCF mâche sa rancœur et cherche à sauver ses quelques meubles.
La LCR croit qu'elle s'en sort un peu mieux et veut donc rester ce qu'elle est, voire nous attirer vers elle.
Les Verts sont déconfits et subiront le contrechoc des probables bouleversements internes au PS.
Les collectifs Bové méditent encore l'écart entre leur dynamisme et leur résultat.

La sagesse exigerait l'alliance sans conditions de tous ces partenaires.
Cela ne se fera qu'exceptionnellement et sans doute, là où c'est possible, sans succès parlementaire.

Les trois pôles de ce qu'on persiste à appeler la gauche sont orientés vers des buts divergents.
Vers la fin de la domination capitaliste.
Vers l'affirmation d'une social-démocratie européenne visant à corriger les excès du libéralisme.
Vers la création d''un centre gauche démocrate alliant, comme en Italie, socialisme et démocratie chrétienne.
À quoi s'ajoutent les ambiguïtés de ceux qui visent ces objectifs, incompatibles, tout à la fois...

Oui, j'entre en résistance, y compris à l'encontre de ceux qui croient savoir ce qu'il faut faire.
L'urgence est de nous remettre en question, pas de proposer des solutions intenables.
Je n'abandonnerais personne ni les Verts ni le Collectif de Cergy : en ce moment, ce serait lâcheté.
Mais ma contribution se limitera à l'apport de ma réflexion.

Dans ce pays que j'ai mal compris, il me faut bien le reconnaître,
je ne puis plus que rester moi-même.
J'entre en résistance.

Vendredi 4 mai 2007

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