jeudi 27 mai 2010

Tchernobyl, 24 ans après...

Tchernobyl, aujourd'hui, n'est pas ce qu'on en dit.

L'émission présentée, fin mai 2010, sur Arte, bouscule bien des idées reçues. On peut vivre à Tchernobyl ! Les animaux s'y multiplient. Ils ne sont pas monstrueux. Ce qui ne signifie pas que les hommes puissent revenir s'installer à proximité de la centrale.Afficher l'image en taille réelle

Il est difficile de comprendre que le choix n'est pas entre la vie ou la mort dans un site irradié. Pourtant, à Tchernobyl, la vie et la mort sont aux prises. La nature reprend ses droits. 24 ans après l'explosion, au milieu des ruines d'une ville entière abandonnée, Pripyat, on observe des sangliers, des loups, des élans, des cervidés, des lynx, des renards.

Comme les barrières délimitant la zone « rouge » interdite se sont effondrées et n'ont pas été remplacées, les animaux circulent. Des chevaux sauvages se sont installés. Bref La zone de Tchernobyl est un laboratoire à ciel ouvert où des chercheurs courageux et compétents font des découvertes surprenantes.

Pourquoi les souris sont-elles totalement indemnes et pullulent ? Pourquoi, au contraire, la durée de vie des hirondelles est-elle très abrégée? Tout se passe comme si la nature réagissait à l'irradiation, s'adaptait, quitte à payer au prix fort cette transformation qui voit un espace urbain vidé de sa population humaine se repeupler d'espèces que les hommes avaient chassées (tuées ou expulsées)...

Il faut accueillir avec modestie, angoisse et espoir ces observations qui révèlent que, si lourde soit l'agression humaine sur l'environnement, les blessures infligées à la nature se cicatrisent mais autrement que nous pouvions l'imaginer. Les plantes et les animaux ne comptent pas les morts. Elles remplacent les individus qui ne peuvent survivre mais les nouveaux venus disposent de moyens géAfficher l'image en taille réellenétiques de résistance ignorés des hommes.

À Tchernobyl se côtoient les horreurs et les merveilles. Ce qu'observent les scientifiques qui pénètrent sur le terrain et y travaillent est terrifiant en même temps que rassurant. Les dégâts ont été bien pires mais autres que ce qu'on nous en a dit. La réaction de la nature est plus rapide et plus inattendue que ce qui avait été prévu. L'homme est dépassé par ses entreprises mais la planète dépasse elle-même ces entreprises funestes.

Le drame du golfe du Mexique sera à analyser de la même manière d'ici... 25 ans ! Après le désastre et la mort des espèces, une vie différente et prodigieuse s'emparera des espaces saccagés.

Notre ignorance est à la mesure de notre savoir : immense !

vendredi 14 mai 2010

Peur, rumeur et rigueur : le retour des Shadoks


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L'angoisse monte. On veut pourtant être heureux. On fait la fête. Apéros géants...! On s'enivre à en mourir ! On joue. On va créer des entreprises pour pomper l'argent des citoyens en pleine addiction, au foot, au cheval et autre divertissement... On détourne l'attention. Le sport est le spectacle mondialisé, l'opium du peuple. On maintient des apparences d'opulence. Mais nous vivons au bord de la ruine généralisée.

La menace invisible du volcan pèse sur nos esprits plus que sur nos vies... Des cendres s'étalent jusqu'en Afrique. Le Maroc ferme des aéroports ! On met en cause le principe de précaution ! Si on ne peut plus faire prendre des risques pour gagner de l'argent, c'est la fin du capitalisme ! Eh oui, cela se rapproche...

Après la Chine, en Russie, on meurt au fond des mines de charbon. Des sauveteurs ont voulu aller chercher leurs copains. Ils sont morts aussi. Ils n'avaient qu'à ne pas prendre de risques ! Sauf que risquer par solidarité et risquer par avidité, ce n'est pas le même risque.

La plus géante et funeste pollution par le pétrole va atteindre la Louisiane. Après les inondations de la Nouvelle-Orléans, voici, de nouveau, la catastrophe écologique déployée. Qu'on ne vienne plus accuser les écologistes de catastrophisme : elle est bien là la catastrophe. L'entreprise BP est accusée. La fuite, nous dit-on, a commencé avant le drame qui a causé la mort de onze ouvriers. On avait continué à pomper. Le profit espéré sera épongé par le coût énorme de réparations qu'on n'arrive pas à effectuer. Peu importe. On récupérera plus tard l'argent perdu. Car on va continuer, dans le golfe du Mexique à détruire le milieu marin et le delta du Mississipi, pour puiser l'or noir, jusqu'à la dernière goutte...



De quelque côté qu'on regarde le monde, à nos pieds ou au-delà des frontières, nous vivons dans une peur qu'entretiennent les discours sur l'insécurité. Dans les écoles, les quartiers populaires (qu'on dit sensibles, sensibles sans doute à la privation d'avenir ?), les usines qu'on ferme, les exploitations agricoles qui se ruinent, l'agressivité dresse les citoyens les uns contre les autres. La guerre sans fin, en Afghanistan, qui s'étend au Pakistan, les tensions au Moyen Orient qui gangrènent depuis des décennies les relations entre Israël et ses voisins, la haine de l'Occident, partout palpable et pas seulement en Iran, nous révèlent la fragilité d'une domination blanche qui court à sa perte.

Et voilà qu'au sein de l'Europe se déclenchent les mécanismes de la panique. L'économie de la croissance est en panne. L'enrichissement ne s'effectue plus au rythme qui permettait d'aborder l'avenir avec l'espoir du progrès indéfini. Pour sauver le Système, on taille dans la chair des milieux populaires. On nous avait habitués à travailler plus pour gagner plus, en fait consommer plus. C'est raté ! Pourtant, nous sommes drogués, incapables de réduire sans détruire, paralysés par des habitudes de surproduction, conscients des risques écologiques majeurs mais spectateurs de notre propre impuissance.

Ce sont des gouvernements "socialistes" qui sont contraints d'infliger des purges à leurs peuples ! En Grèce, en Espagne, au Portugal (comme, -mais avant, on n'a pas voulu le voir-, en Estonie, en Hongrie, en Roumanie...) on appauvrit la masse des pauvres pour sauver les revenus des riches. En Grande Bretagne, il n'y a plus de Labour. Les Conservateurs qui n'ont plus rien à conserver, vont chercher vainement, à sauver leurs intérêts. En Italie, le clown Berlusconi se meurt et, dans l'attente de la prochaine rigueur à la napolitaine, maffieuse et cruelle, il s'occupe de payer une rente indécente à son épouse divorcée. En Allemagne, l'illusion du pays préservé s'achève et la Chancelière perd les élections donc toute majorité mais pas le pouvoir de ne rien pouvoir faire.

En France, le gouvernement aussi perd des élections, mais s'en moque : il faut tenir jusqu'à l'explosion sociale afin de convaincre, en 2012, que ce sera "moi ou le chaos". Retour à la case départ gaullienne, en tout petit... Nul ne sait et ne peut savoir où aller. On en est à espérer en... DSK, le patron du FMI ! Le pompier pyromane, ou tel autre socialiste capitaliste, pour éteindre le feu qui dévore l'Europe. Risible et dramatique !

Car le débat économique et politique ne fait que commencer et il va traverser ce qui reste de gauche ! Qu'entend-on, dans les syndicats, les partis traditionnels quand ils critiquent le pouvoir en place ? Sans production pas de croissance. Sans croissance, pas d'emplois. Sans emplois pas de revenus. Sans revenus pas de consommation. Sans consommation pas de production. (La boucle est bouclée!). Relevez les salaires pour sauver l'économie par la relance de la production ! C'est un peu court et surtout parfaitement compatible avec le Système.

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Électeurs-citoyens choisissez entre la peste et le choléra : sauver les entreprises en réduisant encore les charges salariales ou bien sauver les entreprises en relançant la production donc les salaires. Deux discours en forme de fausse évidence! Nul ne songe à diminuer les profits, réduire la production, répartir l'effort, mieux partager la fiscalité, satisfaire d'abord les besoins, éliminer les gâchis... Cela parait non seulement ringard mais désormais impossible donc impensable.

Nous allons donc plonger dans le malheur et la contradiction jusqu'à ce que l'événement commande et la réalité s'impose. Ce n'est pas pour dans très longtemps.

dimanche 9 mai 2010

Un catholique de gauche : ça n'existe plus !

"Où sont-ils passés les cathos de gauche" demandait l'hebdomadaire La Vie, dans son numéro 3364 de février 2010. Je ne découvre, accidentellement, cette parution qu'à présent. Mais la question est permanente et m'interpelle.

Je ne sais s'il est encore des "cathos de gauche", mais ce que je sais bien, c'est qu'il ne peut y avoir de "cathos de droite" !

Soyons précis. "Cathos" est une désignation familière qui n'est guère attirante. Est chrétien celui qui se réfère principalement, pour vivre, à Jésus Christ. Est "catholique" le chrétien qui a la passion de l'universel et pour qui "il n'est ni juif ni gentil" tout homme étant un prochain, un autre moi-même. Ce catholique ne peut qu'être citoyen du monde.

Restons précis ! "La gauche" n'est qu'un positionnement historique qui permet, dans le champ politique, de constater où se situent les acteurs de la vie publique qui ont pris parti pour les défavorisés de l'organisation économique et sociale actuelle, mondialisée.

Cette gauche défaille et il se pourrait qu'elle soit morte. En effet, s'y efface progressivement la contestation du système capitaliste qui était à l'origine de toutes les orientations de l'action des syndicats, coopératives, associations et autres partis situés "à gauche".

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Marc Sangnier (1873-1950). www.marc-sangnier.com

Les catholiques se perdent dans cette dilution du politique qui ne permet plus de "prendre position", c'est-à-dire d'affirmer où l'on se trouve dans ce champ d'actions que constitue toute société. Les repères dont ils disposaient, avec l'Évangile, ne sont plus même mis en avant par leur Église ! "On ne peut servir deux maîtres, Dieu et l'argent", "celui qui prendra l'épée périra par l'épée", "mon royaume n'est pas de ce monde" : trois choix de vie détournés ou oubliés.

Car si "mon royaume n'est pas de ce monde", ce n'est pas qu'il se situe dans le Ciel, c'est qu'il n'est, sur cette Terre, ni voulu ni recherché. Un tel monde serait sans pouvoir d'un prince (ayant pouvoir sur la personne de l'autre), sans violence légitime ( la violence dont l'État a le monopole, exercée au nom du droit), sans argent-roi (non la monnaie, mais le capital accumulé). Autant dire que cette utopie créatrice est aux antipodes de la droite. Un catholique de droite serait un feu humide ou un sel fade ou athlète sans muscle ! Pire, ce qu'exècre le plus les tenants de la droite, c'est ce que le message du Christ diffuse : l'égalité, le partage, la simplicité, le don, la non-violence, l'amour en actes dans des communautés sans privilèges.

Les catholiques pourraient, s'ils étaient chrétiens, écarter sans peine les choix politiques de la droite et ne pas se soucier de la disparition de la gauche puisqu'ils connaissent la voie à suivre. Marc Sangnier avait tenté de réconcilier le christianisme avec la République et un socialisme humaniste. Emmanuel Mounier avait des sympathie pour l'anarchie quand elle est "self-government" et cherchait à déborder, avec le personnalisme, le communisme marxiste. Un "catho de gauche" est, aujourd'hui, une espèce en voie de disparition parce que la gauche, infidèle à elle-même passe ou trépasse. Elle se suicide. Le catholique n'entre pas en dialogue avec elle parce qu'elle ne dit plus rien.

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Emmanuel Mounier (1905-1950). www.emmanuel-mounier.com

Nous vivons des temps de décomposition et de recomposition. Partis, églises, sectes et autres confréries sont des structures inopérantes. Une révolution intellectuelle s'effectue. Les catholiques n'y échappent pas plus que les autres citoyens. S'ils ont des outils pour aborder un siècle où l'universel, la solidarité, l'hospitalité, l'écosophie sont devenues des nécessités pour que l'espèce humaine survive, il leur faut abandonner des rites, des costumes, des a priori autoritaires, des prétentions à disposer de la vérité qui les enfoncent dans le ridicule ou l'odieux. Ce n'est pas par hasard que des prêtres ont pu se laisser aller à dominer des corps d'enfants : cette contradiction absolue entre l'amour et le viol n'est pas sans causes. Les rechercher est une priorité et si elle ne le fait l'Église mourra. ("Ce que vous faites à un seul de ces enfants, c'est à moi que vous le faites" rapporte l'évangéliste.)

Nul ne pourra plus dire son catholicisme, de gauche ou non, tant que l'au-delà de la droite et même de la gauche n'aura pas été réaffirmé, c'est-à-dire l'abandon du pouvoir pour le pouvoir, de la violence comme moyen de lutter et de l'argent comme mesure de la richesse.

Un catholique de gauche : ça n'existe plus !
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dimanche 2 mai 2010

Regards depuis un 1er mai.

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1er mai : le jour d'un printemps que jamais l'on n'atteint... Les défilés sont devenus des traditions sans dynamique. La fête de travail est, moins que jamais, la fête des travailleurs. Qu'un homme vaille un homme en toutes circonstances n'a toujours aucun sens et les sacrifices reposent toujours sur les épaules des plus pauvres.

En Grèce, un Gouvernement de droite a ouvert les bras à tous les spéculateurs et enrichi les riches. Un gouvernement qui s'est fait élire sur des idées de gauche est contraint de plonger tous le pays dans une austérité généralisable à toutes les catégories sociales modestes, mais pas générale, car ceux qui tiennent en main l'économie échapperont au tour de vis économique. Quant aux banques géantes qui tiennent les finances de l'État en tutelle, elles se seront pas frappées. L'Europe libérale, le FMI, imposent au peuple grec cette cure et ces potions amères. Une solidarité conditionnelle est préconisée et, comme pour les pays les plus démunis d'Afrique ou d'Amérique du sud, on pressurera les humbles, assez nombreux pour être ponctionnés de façon rentable !

En Islande, le volcan se calme et les poussières abrasives qu'il crachait n'empêcheront plus les avions de reprendre leur course au nord de l'Europe. Un enseignement ne sera pas tiré : la faiblesse des sociétés complexes face à la manifestation de la puissance de la nature. Seuls sont déplorées les pertes que les industries du tourisme et les compagnies de transport aérien chiffrent et tentent de faire payer aux États. Des riverains des aéroports fermés ont goûté de façon provisoire la paix que le silence du ciel leur apportait. Brève satisfaction.



Dans le golfe du Mexique, une marée noire produite non plus par un bateau pétrolier en perdition mais par des puits sous marins et éventrés, impossibles à colmater, va entrainer la plus affreuse des pollutions que les USA aient jamais connues. Il y a peu, on se réjouissait de l'apport de pétrole que, depuis le fond des mers, on allait pouvoir exploiter. L'entreprise BP a fait vite, trop vite, et l'une des plateformes qu'elle a installées n'a pas résisté aux assauts de l'océan. Les conséquences de l'éventration de la source pétrolière sur la faune et la flore, donc sur l'humanité, vont être constatées, mais on n'en tirera sûrement pas les enseignements écologiques de l'événement. La société du pétrole ne peut échapper à son addiction.

Les religions, qu'elles soient politiques, idéologiques ou confessionnelles, sont toutes marquées par le même mépris de l'homme, dès lors qu'elles acceptent et favorisent l'inégalité et la loi du plus fort. L'aliénation de peuples entiers fait tenir des discours renversants à des hommes et des femmes intelligents. Une émission récente, sur la Corée du Nord, laisse pantois ! Le culte du Général (le fils du Guide décédé) y est décrit comme inévitable, permanent, ridicule et... accepté ! Ailleurs, la mort de l'opposant au nom de principes rigides, soit disant religieux, ou étatistes, est admise, voire préconisée et, que ce soit en Iran, en Israël, en Chine, au Nigéria, en Irak, en Afghanistan..., l'autre est une menace qu'il faut éliminer. L'efficacité de la violence est , à terme, douteuse, mais nul, qui aspire à exercer des responsabilités, n'ose mettre en question la nécessité de recourir à la force, celle de la police ou de l'armée. La mort de l'adversaire reste le plus sûr moyen de se débarrasser d'un obstacle au pouvoir. On masque, sous des paroles humanistes, la honte qu'on éprouve à se vautrer dans les plus cyniques et les plus cruelles politiques, on retarde, parfois, les coups qu'on porte aux peuples rebelles, mais on ne fait que gagner du temps et, finalement, on tue, au nom de Dieu et de la Nation.



Hors la loi
, un nouveau film de Rachid Bouchareb, après Les Indigènes, relate la cruauté du système colonial et rappelle qu'en Algérie, le jour même de la Victoire de 1945, le 8 mai, à Sétif, l'armée française a assassiné des foules entières, des milliers de manifestants après que des dizaines de colons aient été tués en voulant s'opposer aux revendications d'indépendance que ramenaient les soldats nord-africains ayant participé à la seconde guerre mondiale. Les protestations les plus véhémentes s'expriment et, en même temps donc, le refus de la reconnaissance d'un fait historique d'où est né le conflit qui allait bouleverser notre histoire. Il faut que les derniers survivants disparaissent pour que les faits avérés ne soient plus contestés.

Oui, les sociétés sont conditionnées par des idéologies que n'osent affronter les citoyens. Ces doxas ont en commun d'accepter la mort donnée comme une nécessité historique. Sont frappés, d'abord, les faibles, non équipés d'armes physiques et plus encore intellectuelles, et ne pouvant se défendre face aux pouvoirs dont disposent les États, légitimes ou non ! Tel est, en cette année 2010, cent vingt quatre ans après le 1er mai sanglant de 1886, à Chicago, le constat tragique que peuvent faire des démocrates conscients : le pouvoir politique est confisqué, inarrachable et les éléments naturels, imprévisibles et fulgurants, sont seuls en capacité, actuellement, de mettre de l'incertitude dans la domination des nantis.

Ce vieux, très vieux discours est, hélas, d'une actualité désespérante.

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