dimanche 31 octobre 2010

la citoyenneté européenne de résidence est toujours d'actualité


On va solliciter l'avis des électeurs dans plusieurs villes de France, au cours des semaines et mois à venir. Il s'agit toujours d'obtenir l'accord des électeurs pour que les résidents permanents puissent, en France, comme c'est le cas, dans bien d'autres pays européens, participer aux élections locales, quelle que soit leur nationalité.

Cette initiative correspond à une vieille revendication démocratique, mais révèle, aujourd'hui, en même temps que son utilité non encore reconnue, toute son insuffisance politique !

Habiter dans une ville avec sa famille, y payer ses impôts, y envoyer ses enfants à l'école et ne pouvoir rien exprimer quant à l'orientation des politiques municipales a quelque chose d'inadmissible et de grotesque ! Pourtant, ce minimum de participation à la vie citoyenne est encore fort éloigné de la pleine citoyenneté.

On peut se demander si l'on n'a pas échoué à faire reconnaître l'évidence du droit de vote aux élections locales parce qu'on avait limité les ambitions citoyennes ! Voter à l'occasion des élections locales est bien le moins, mais ce n'est pas le mieux !

Enfermer la citoyenneté dans la nationalité marque le triomphe du nationalisme et les partis politiques de la droite dure, en France, de l'UMP au Front national, ont obtenu que la citoyenneté européenne de résidence soit renvoyée aux oubliettes.

Le temps est donc revenu de mettre les points sur les i devant tous les timides et sectaires qui s'opposent, de façon muette ou virulente, au droit de vote des étrangers à toutes les élections, lesquelles pourtant les concernent !

La citoyenneté de résidence est l'équivalent de la citoyenneté mondiale dès lors que notre planète, la Terre, est notre unique lieu de vie, de résidence, là où nous sommes citoyens, c'est-à-dire acteurs de la vie commune. La citoyenneté européenne de résidence est, dès lors, la forme localisée de cette co-responsabilité, sur le territoire européen.

La citoyenneté européenne existe en droit mais, hélas, point en fait. Les citoyennetés nationales la précèdent et lui font obstacle. L'Europe politique est une "communauté d' États-nations" qui restent tout puissants en leur espace et qui, presque tous, n'acceptent pas les limitations de souveraineté, pourtant très réduites, que suppose le vote des immigrés ou autres habitants étrangers.

Soyons clairs : pouvoir voter aux élections locales et européennes (mais pas législatives ou référendaires) quand on détient le passeport ou la carte d'identité de l'un des 27 États de l'Union européenne, est discriminatoire par rapport aux étrangers « non communautaires » qui ont le même vécu en France ! Un Suisse de Chambéry ne dispose pas des mêmes droits électoraux qu'un Italien de Grenoble. Un Irlandais peut voter, pas un Islandais, un Roumain pas un Moldave, un Suédois pas un Norvégien, un Slovène pas un Croate, etc... Ne parlons pas des étrangers venant d'un ex-pays colonial : un Malien de Paris ou un Algérien de Marseille, en France depuis plus de vingt ans, n'ont aucun droit de vote en France, (Zinedine Zidane, oui, son père, non !).

Tout cela pourrait être tourné en ridicule s'il ne s'agissait du suffrage universel. Voter là où l'on vit est un acte d'insertion utile au pays d'accueil !

Les Roms, une fois de plus, interpellent notre citoyenneté. Leur résidence, c'est l'Europe tout autant que le pays où ils séjournent, souvent depuis de nombreuses générations. Sans territoire de référence, sans romanoland, ils sont nos concitoyens et pas toujours nos compatriotes. C'est insensé ! Les résistances rétrogrades des professionnels de la délimitation des pouvoirs demeurent efficaces. De même que la France fut l'un des derniers États à ouvrir le droit de vote aux femmes, elle sera l'un des derniers à l'accorder à ses habitants permanents non Français.

Mais ne faut-il pas se porter plus loin dans l'avenir ? Pendant combien de temps encore un Rom belge ou bulgare, demain serbe ou kossovare, monténégrin ou macédonien, ne pourra exercer ses droits de citoyen qu'en fonction de sa nationalité ? Comme on comprend que les Roms soient si peu nombreux à voter ! Qu'est-ce que cela changerait ? La mondialisation des marchandises, des capitaux, des entreprises va décidément plus vite que la mondialisation des politiques ? Se prononcer sur le réchauffement climatique, d'ici dix ou quinze ans, pourra-t-il dépendre des votes émis État par État ?

Élargir nos vues, penser en citoyen de l'Europe, en habitant de l'Europe, en résident de l'Europe, ce à quoi sont amenés les Roms qui y vivent depuis six à sept siècles, devient une nécessité qui ne fait pas abandonner son amour pour le pays natal mais qui ne nous y enferme pas.

Voter, pour certains, à toutes les élections, et, pour d'autres, à certaines élections seulement ou à aucune, bien que tous résidents du même pays, rompt l'unité de la vie sociale, peut engendrer la discorde, et retarde la nécessaire conscience du sort commun des hommes et des femmes établis sur un même territoire.

La régression républicaine se manifeste-t-elle donc avec toujours plus de constance ? Sauf à sortir des repliements idéologiques et institutionnels, nous entrerions dans une stagnation démocratique désespérante ! Le vote n'est jamais que le prolongement d'un vie sociale commune. Limiter l'un c'est limiter l'autre. La citoyenneté de résidence, européenne d'abord, ne se vit pas en tranches mais globalement. Des élections locales aux élections politiques les plus décisives, c'est du vivre ensemble, du tout vivre ensemble qu'il s'agit.

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dimanche 24 octobre 2010

Ne tue pas

Le tu ne tueras pas biblique, second "commandement", n'a pas produit les effets que ceux qui prétendent que Dieu est amour pouvaient espérer.

Ni guerre, ni peine de mort, jamais : tel popicasso_colombes.jpguvait être l'utopie chrétienne majeure. Au lieu de cela on a vu des pontifes disposant d'armées, des justifications pseudo théologiques justifiant les exécutions capitales, sans parler de la participation massive des chrétiens d'occident à des crimes historiques au côté desquels les guerres de religions entre chrétiens catholiques et protestants ne sont que des drames locaux et limités !

Il suffit de dire que priver un homme de sa vie, ordonner sa mort ou accepter sa disparition violente est inacceptable, insupportable, incompréhensible à celui qui a pour absolu l'amour, non le sentiment d'amour mais la volonté d'amour, celle du "bon samaritain" pour qui un homme vaut un homme, tout homme est l'égal d'un autre homme...

Face à cette radicale objection opposée à toute possibilité de supprimer une vie humaine au nom du bien commun vont se dresser des hordes d'intellectuels, d'officiers et de juges. Cela ne saurait étonner les chrétiens qui ont lu, dans le récit évangélique, s'il est exact, quel sort fut réservé à Jésus par ceux qui ont prévu, voulu, et réalisé sa crucifixion, parmi lesquels des prêtres, des hommes de pouvoir et des fanatiques.

Je réaffirme, car ce fut mille fois écrit, que l'on tue plus au nom de l'État que l'on ne tue pour des motifs criminels. Je soutiens qu'un chrétien qui ne prend pas le risque de refuser de tuer en toutes circonstances, même s'il a de bonnes "raisons" de le faire, ne peut plus se dire chrétien. Je pense qu'essayer l'amour, en toute naïveté, est moins dangereux que de multiplier les moyens d'assurer la sécurité des hommes.

Du flash-ball à l'arme atomique, la logique est la même : dissuader le rebelle, le résistant, autant que le délinquant et l'assassin. On mélange et confond les opposants à l'ordre établi pour mieux assurer un pouvoir infiniment plus destructeur et malfaisant que ne le sont tous les malfrats et autres salauds rassemblés.

On n'a toujours pas jugé le bombardement d'Hiroshima comme un crime contre l'humanité. On ne le fera pas. Cela aboutirait à un bouleversement idéologique : il y aurait des circonstances dans lesquelles on ne peut employer la violence extrême. Admettre cela c'est interdire à la politique le tout pouvoir. Impensable dans notre civilisation.

On a toujours plus de 50 États qui fusillent, électrocutent, empoisonnent, lapident... au nom du droit. La peine de mort est incompatible avec une conception de l'homme qui permet de vivre sans haine et sans peur. Non seulement quantité de condamnations ont été appliquées à des innocents, ce qui devrait nous remplir d'épouvante, mais se donner ce droit à éliminer un humain même coupable disqualifie toute pensée. La vie d'un humain n'appartient pas à d'autres humains.

Mais tout n'est pas dit encore quand on a dénoncé les crimes d'État que sont les tueries individuelles (dans les prisons ou en public, sur décision d'un tribunal) ou les tueries collectives (aux moyens d'armes toujours plus sophistiquées, sur décision de gouvernement). Les religions qui justifient et appellent la mort des athées, des irréligieux ou des infidèles sont, quelles qu'elles soient, des ennemies du religieux, du questionnement permanent de chaque homme devant le mystère de sa vie, de nos vies.


Bombes miniaturisées offertes en cadeaux aux peuples rebelles à la civilisation.

Lutter contre la violence, la délinquance, le meurtre, le crime, en usant des outils que la science et l'industrie ont mis à notre disposition pour détruire des vies, une par une ou mille par mille, tue la civilisation.

Tuer autrui, quel que soit ses fautes et les horreurs qu'il a commises, c'est tuer, avec lui, en lui, les raisons philosophiques nous avons de refuser sa violence fut-elle impardonnable. Copier celui qu'on condamne, c'est se condamner.






mercredi 20 octobre 2010

L'impensable peut être pensé.

Il nous est asséné des vérités dont il semble impossible de sortir sous peine de ridicule.
Les fausses évidences pleuvent.
Vouloir ce à quoi l'on aspire apparait insensé.
Bref, on se gausse de celui qui affirme qu'on peut mieux vivre, dès à présent !

L'utopie est permise mais à condition qu'elle reste un rêve.
Le bonheur est un gros mot dont on n'autorise à goûter que le parfum.
Le visage grave des puissants dit assez qu'ils ont le sérieux sculpté en eux.
Tenez vous en, disent-ils, au certain, au sûr, à ce qu'on a déjà expérimenté !

On peut ainsi traverser une vie en se résignant.
L'art des maîtres c'est de faire croire aux esclaves que tout n'est que fatalité.
Le changement s'en trouve réduit à ce que l'on peut récupérer aux marges de l'histoire.
Espérer est un verbe qui n'a de sens que s'il s'applique à l'au-delà !

http://www.demaziere.fr/eve/pp_images/paradis.jpg
Ah ! Les fleurs, les petits oiseaux, le paradis terrestre. Tout ça, dit-on, c'est bon pour les nigauds !

Et bien, c'est cette armure dans laquelle on nous enferme qu'il faut faire craquer.
Il faut porter le regard au-dessus des lois qui délimitent notre possible.
Comme le nouveau-né, ouvrons les yeux sur un monde tout neuf.
N'attendons pas la mort pour retourner au paradis dont nous aurions été chassés.

Ce qui est dit impensable peut être pensé : c'est ce qui n'a jamais encore été essayé.

Car il n'est pas vrai que pour vieillir plus il faille travailler plus.
Car il n'est pas vrai que plus de violence d'État assure plus de sécurité.
Car il n'est pas vrai que plus de richesses apporte la richesse.
Car il n'est pas vrai que la vitesse fait gagner du temps.

Car il n'est pas vrai que la misère soit le lot des paresseux.
Car il n'est pas vrai que le partage soit une sanction pour les méritants.
Car il n'est pas vrai que le don appartienne aux cultures de "sauvages".
Car il n'est pas vrai que le mieux s'obtienne par la croissance.


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"Le pays des chimères est en ce monde le seul digne d'être habité" (Jean-Jacques Rousseau.)

"La vie, enfin la vie comme il faudra la vivre" n'est pas dans un au-delà.
Le pouvoir des États est un leurre qui masque les pouvoirs des riches.
Les peuples sont interdits de pouvoir, du pouvoir de décider de leur propre sort.
Qui veut faire le bonheur du peuple contre le peuple est donc un tyran.

Tout philosophe est un fou.
C'est un bouffon.
Il cherche une vérité qui se dérobe.
Mais c'est à lui de rendre possible l'impossible !

jeudi 14 octobre 2010

Suis-je un biogéen ?


Michel Serres, après avoir popularisé le mot de biogée, se dit à présent biogéen. Je voudrais l'être avec lui... Le biogéen est un Terrien conscient de son rapport au monde complexe, souple, poétique, qui n'a jamais fini de renaître et qu'on n'a jamais fini de connaître.

"Re-naissances, co-naissances, nouvelles conduites" écrit Michel Serres. Les nouveaux mots servent à pénétrer un nouveau monde ou plutôt un monde qui ne cesse de se présenter nouveau. Le constat est merveilleux et déprimant. Le réel est insaisissable. Comment vivre dans l'instable ?

Les Roms ont inventé une mobilité qui suit les mouvements du monde. Cela leur donne des repères plus sûrs que ceux que se donnent les propriétaires qui s'évertuent à posséder ce qui ne leur appartient pas. Il est donc deux sédentarités : la fixe qui est illusoire et où l'on s'enkyste et la mobile qui bouge au rythme de la terre ou du moins s'y essaie.

Le nomade traditionnel s'y efforçait aussi mais il n'a plus de troupeaux à faire pâturer toujours ailleurs, ni de sel à aller vendre, à dos de chameaux, au-delà du désert. Est nomade, pour le commun des hommes, celui qui se déplace constamment. Erreur ! Entre celui que son emploi oblige à bouger sans arrêt et celui qui choisit de ne pas choisir de lieu où s'installer à vie, il y a une immense différence. Le nomade est devenu celui qui sait avoir reçu la Terre en héritage, qu'il en fasse la visite ou pas.

Le biogéen pourrait bien être un néo-nomade, c'est-à-dire celui qui n'a pas besoin de bouger pour être mobile. Mobile en sa tête et donc impossible à enfermer dans des doctrines ou religions à vérités définitives. Mobile en son comportement et donc imprévisible pour les faiseurs de politiques intangibles.

Le biogéen n'est ni instable, ni versatile, ni inconstant. Il est attentif, curieux, en recherche et donc dans le doute, et en quête de certitudes difficiles et utiles, même quand elles s'avèrent provisoires.

Je suis un enfant de la Terre. On ne prend pas possession de sa mère. Une mère qui me donne tout ce dont j'ai besoin pour vivre mais ne veille pas sur moi. Gaya n'est ni vigilante ni compréhensible à l'aide de nos anthropomorphismes. Elle est. Nous sommes un infime morceau d'elle-même. Tous nos efforts pour parler à sa place en la définissant comme nature sont insuffisants voire vains. Toute pensée écologique qui échappe à cette modestie se contredit.

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Suis-je le biogéen que j'aimerais être ? Ce n'est pas même sûr ! Je suis un enfant face au mystère, un enfant qui ne sait encore où va tout ce qu'il découvre, un mystère qui se dévoile et se recouvre d'heure en heure. Finalement, être un homme ce n'est pas savoir mais vouloir savoir, c'est engranger des savoirs en sachant qu'aucun savoir n'englobe tous les savoirs.

Voilà pourquoi s'agrandit, en mon esprit, la distance d'avec les religions, toutes les religions, y compris celles qui ne sont que de l'anti-religion et se définissent donc par rapport aux religions ! Les religions s'approprient le mystère et bien sûr n'y parviennent pas. Elles définissent le contenu de la connaissance et, inévitablement, échouent. Elles sont courtes parce qu'elles s'interdisent de dire qu'elles ne savent pas et du coup se contredisent. Les religions ne relient pas mais lient. Elles n'ouvrent pas l'esprit à l'incommensurable; elle le réduisent à des certitudes qui ne résistent pas un siècle. Elles osent parler de Qui.. ? De Qui vous ne savez pas...

Le biogéen, s'il devait venir à exister dans les paroles des hommes serait celui qui en sait trop pour oser dire qu'il sait, qui trouve en ce doute constant et modeste, de quoi respecter quiconque a d'autres approches que les siennes, c'est quelqu'un qui a dépassé la laïcité en l'intégrant dans sa pensée au point de n'avoir plus à en faire état.


Michel Serres. Biogée, aux éditions Dialogues

Extrait de la critique de la critique de Christiane Frémont :

Michel Serres, philosophe, mais écrivain d’abord et toujours, publie aujourd’hui un livre au titre étrange et beau : Biogée – Bio signifie la vie, Gée désigne la terre. Pourquoi ce titre s’est-il imposé à lui ? c’est que, répond-il, la Vie habite la Terre et la Terre se mêle à la Vie ; c’est aussi – les lignes de Valéry et de Bernanos inscrites en exergue le disent – les choses, comme les vivants, ont un langage, et que l’âme d’un poète sait devenir arbre. Et le philosophe, lui, devient récitant, mêlant légende, histoire, récit, choses vues ou rêvées, avec des paroles de philosophie. /.../
Si surprenant soit ce livre, il est dans le droit fil de l’œuvre, car Michel Serres est l’un un des rares philosophes contemporains à toujours avoir fait entrer le monde dans ses écrits /.../ La Biogée est la nation , nous y sommes tous nés depuis notre première aurore, disait le philosophe après Copenhague, invitant à la création d’une institution véritablement mondiale.
Biogée est une rhapsodie où alternent le conteur et le philosophe, tissant ensemble une puissance verbale encore jamais atteinte, poétique au sens étymologique du terme, et la précision de la pensée
/.../
« Joie » est le dernier mot du livre. Pourquoi ? L’auteur répond : ce livre célèbre une antique et fabuleuse nouveauté…Nous savons désormais que nous jouissons d’un codage commun, nous sommes et vivons comme le monde. Le monde communique entre soi aussi bien que nous communiquons entre nous et avec lui. Gardons-nous de voir là le mythe d’une unité fusionnelle retrouvée avec le grand Tout : c’est plutôt l’idée d’une connivence, d’une familiarité ; et, pour nos savoirs et nos techniques, la compréhension et l’échange. La communication, philosophie douce, seule alternative à la maîtrise ?"

Voir : www.editions-dialogues.fr/.../michel-serres-biogée/

mercredi 13 octobre 2010

Le peuple et la nation

La nation est aimable, passionnément, quand elle épouse le peuple. Quand elle en divorce, elle devient une marâtre pour ses enfants.

Passer de la nation qui rassemble à la nation qui exclut, c'est passer de l'amour à la haine, de l'union des natifs à la fureur des nationalistes.

Le passage d'une conception de la nation à l'autre se fait à l'occasion d'un viol. Quand un événement brutal, tel une guerre, éteint toute passion et tout amour et ne laisse subsister que le désir de domination. La violence alors s'installe et abolit toute fraternité.



Aujourd'hui, au Parlement, a été, une nouvelle fois, votée une loi restrictive qui fait obstacle à l'immigration et la rend coupable de générer la délinquance. Sous la rhétorique des discours et des textes, il y a le retour du nationalisme, celui qui tend à enfermer la France dans un superbe isolement, un enfermement qui l'étouffe, la limite et la menace en son être.

Je tiens pour nulle et non advenue toute loi qui est faite pour contrôler le peuple et non l'entendre. Et je ne parle pas de n'importe quel peuple. Je parle du souverain. Je parle de ce peuple dont la Constitution du 24 juin 1793, votée et jamais appliquée, affirmait, en son article 35 : Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.

La nation, celle de Valmy, est la nation qui embrase le pays et fait de la patrie une idole enflammée à laquelle un culte doit être rendu sous peine de mort. La mythologie rapporte que Phalaris (~570-~554), tyran d'Agrigente ("la plus belle des cités mortelles » sur la côte méridionale de la Sicile, selon Pindare), faisait rôtir ses victimes dans les flancs d'un immense taureau d'airain. La cruauté est indissociable du pouvoir.

Le peuple n'est pas la foule. Il baigne dans sa conscience. Il n'a pas une pensée; il en a mille. Son unité n'est pas unicité. Il est complexe. Il est divers. Il est rebelle à toute unification. Il ne se voit pas de près. À distance, il est harmonie. Qui le veut diriger le détruit. Comme Phényx, mis en cendres, il renaît encore. Il est la vie même d'un orchestre sans chef. La vie des hommes est plurielle. Chacun y tient une partition.

La France n'est pas un bric à brac de mythes et de symboles. Les défilés s'additionnent, au fil des ans, entre la République et la Nation. Entre les deux places, il y a la Bastille, qui n'est plus une forteresse mais un génie, brillant au sommet d'une colonne... Le peuple est en marche mais ne défile pas seulement, il veut créer, par son génie, l'avenir de la démocratie. Du moins le croyons-nous en son sein, et si nous ne le croyions plus, nous entrerions dans le néant des dictatures, féroces ou anesthésiantes, ce qui est tout un...

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lundi 11 octobre 2010

Supprimer le prix Nobel d'économie ou pas ?

Maurice Allais est mort à 99 ans. Il fut prix Nobel d'économie. Le seul Français à l'avoir été.

Peut-on être prix Nobel d'économie ?
L'économie est-elle une science ?
Ne confond-on pas
les savoirs en économie et le savoir économique ?

On saura, aujourd'hui, qui est le prix Nobel d'économie en l'an 2010.

Je ne croirai à l'opportunité de décerner cette distinction que le jour où le lauréat aura répondu à cette question simple : pourquoi et comment est-il possible que 0,5 % des humains détiennent le tiers des richesses terrestres et, question complémentaire, que faut-il faire pour que cesse ce qui n'est pas seulement un scandale, mais un dysfonctionnement majeur de l'économie mondiale ?


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jeudi 7 octobre 2010

De l'efficacité de l'action politique hors partis


L'homme informé sera-t-il maître de son destin ?

Exercer le pouvoir n'est pas décider ! Le mandat politique est une délégation de pouvoir; ce n'est pas le pouvoir ! Un glissement s'est opéré, depuis la Révolution française qui avait jeté les bases d'un gouvernement brisant avec la monocratie. Il a conduit les élus à se substituer aux citoyens. Ce fut une erreur et une faute dont a pâti la démocratie.

Les citoyens, s'étant laissé réduire à l'état d'électeurs, ne sont pas sans responsabilités dans cet abandon de ce qui constitue leur essence politique même : le droit à décider constamment de ce qui les concerne.

Les partis -comme l'a démontré la philosophe Simone Weil- tuent la démocratie en exerçant au nom du peuple et à la place du peuple "le gouvernement du peuple, par le peuple pour le peuple" comme dit la Constitution française. Au lieu d'être les lieux et les organisations qui apportent aux citoyens la compétence et l'information, les partis ont capté, conservé et monopolisé la décision politique.

Jean-Jacques Rousseau avait pourtant averti les générations à venir en inspirant la conception moderne de la souveraineté en France, dans du Contrat social (1762). Il y expose que les dirigeants sont les "commis" du peuple et nullement les chefs de ce peuple.

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Rappel :
  • La souveraineté n'appartient pas au plus fort ou à quelques-uns en vertu de quelques privilèges prétendument naturels.
    La souveraineté appartient au peuple et elle est inaliénable et indivisible.
    La souveraineté c'est la Volonté générale, qui est dégagée par la majorité et qui est la source de la loi.
  • Le fondement de la théorie est simple, il repose sur un postulat, à savoir que les hommes sont égaux.
    Les hommes étant égaux aucun d'entre eux ne peut se prévaloir de quelque supériorité que ce soit.
    La souveraineté ne saurait donc appartenir à aucun d'entre eux en particulier, elle appartient à tous à la fois.
  • Pour Rousseau le peuple étant souverain chaque citoyen possède une fraction de la souveraineté.
    Chaque citoyen possède une part de la souveraineté.
  • La conséquence est que chaque citoyen doit participer au choix des gouvernants
  • Et la démocratie doit reposer sur le suffrage universel
  • Cependant cette démocratie ne sera pas représentative mais directe.
  • Si le peuple ne peut intervenir lui-même pour délibérer et discuter l'élaboration des lois il doit y avoir au moins un référendum d'acceptation.
  • Quant aux gouvernants, aux ministres, ils ne sont que les commis (mandat impératif) du peuple, de "simples officiers exerçant en son nom le pouvoir ..." (Contrat social, Livre III~ Chape 7).
  • Dans un tel système de démocratie directe Rousseau ne pense pas que le meilleur gouvernement soit le gouvernement démocratique, c'est-à-dire un gouvernement dans lequel le peuple soit à la fois législatif et exécutif.

  • Voilà pourquoi Rousseau préfère le gouvernement oligarchique, c'est-à-dire le gouvernement de quelques-uns soumis à la volonté générale, à la souveraineté populaire, pour la raison que le peuple aura moins à craindre du gouvernement de plusieurs que du gouvernement d'un seul .
  • Si le système de Rousseau eut un succès théoriquement certain, la bourgeoisie française de 1789 n'entendait pas, cependant, aliéner son pouvoir de fait aux mains du peuple et c'est pourquoi l'abbé défroqué Sieyès élabora une théorie voisine de celle de Rousseau mais jugée beaucoup moins politiquement dangereuse.
  • La théorie de la souveraineté nationale fut préférée à la théorie de la souveraineté populaire.
    En vertu de la théorie de la souveraineté nationale c'est bien le peuple qui est souverain mais le peuple dans son ensemble, pris globalement, ce peuple c'est la Nation, une entité considérée comme étant un être réel distinct des individus la composant.
    Le gouvernement sera donc un gouvernement représentatif (pas de mandat impératif). Et les représentants ne seront pas nécessairement élus au suffrage universel qui ne s'impose pas logiquement dans ce système.
    C'est ainsi que les membres de l'Assemblée nationale constituante de 1789, non élus eux-mêmes au suffrage universel, introduisirent dans la Constitution de 1791 (décret du 22 décembre 1789) le suffrage restreint et censitaire.
Avec l'élargissement du corps électoral permettant de tendre au suffrage universel, avec l'élévation du niveau des connaissances, avec la multiplications de moyens de communiquer, il n'est plus possible de pratiquer la démocratie comme au cours des siècles derniers.

Il faut réétudier Rousseau et en tirer des enseignements pour notre temps. Qui délègue perd son pouvoir. Si tout le peuple délègue, il cesse d'être le souverain et il ne reste de la démocratie que sa forme, une coquille vide.

La démocratie participative ne constitue qu'un petit pas en avant vers la participation à la décision. Elle n'est souvent qu'une présentation des dossiers, un recueil des avis, mais presque jamais une transmission du droit à trancher des suites à donner. L'appropriation du pouvoir par ceux qui reçoivent délégation de décision, comme la formalisé Seyiès, ne peut perdurer en ce siècle, si l'on veut que l'idée démocratique elle-même conserve un plein sens.

La contradiction entre la théorie politique et la pratique politicienne déforme puis détruit la démocratie dont les peuples de la Terre voit bien que les États qui s'en réclament ne s'en remettent jamais aux peuples eux-mêmes. C'est là le scandale occidental, dont les gouvernements donnent des leçons à l'ensemble des habitants de la planète, alors que leur crédibilité s'effondre dès lors que l'égalité n'est plus le fondement de la République.

La mutation de société à laquelle nous assistons n'affecte pas que la sphère économique et écologique. Elle concerne, à présent, ce qu'on a tort d'appeler la gouvernance, car gouverner n'est pas un art mais une mission qui s'exerce sous le contrôle permanent du souverain. Il ne saurait donc être question de s'opposer, fut-ce "pour son bien", à la volonté du peuple, le seul souverain.

mardi 5 octobre 2010

L'autoculte

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Même les images vont trop vite et débordent.

Culte de l'auto... De l'automobile, ou de soi-même ?
En plein Salon de l'automobile, les sujets d'étonnement ne manquent pas.

D'abord, la société individualiste qui nie le partage, qui vante le chacun pour soi, la valorisation de l'élite et le triomphe du meilleur, cette société triomphante-là est visiblement à l'épreuve et dans le doute.

Faut-il aller conquérir les marchés chinois et indien pour que les marques françaises puissent continuer à produire toujours plus de véhicules ? Le marché européen sature, mais ce serait prendre les grands pays émergents pour des pays qu'on colonialise encore que de croire qu'ils vont accepter de dépendre de nos usines ! Tôt ou tard, ils n'auront plus besoin de nous. C'est l'Europe qui va commencer à dépendre de la Chine, si l'on en juge par l'aide financière spectaculaire à la Grèce qui vient d'être consentie par le gouvernement chinois. "Les Blancs" ont commencé à ne plus dominer la Terre.

Faut-il progressivement remplacer les véhicules thermiques par des véhicules électriques ? On lance sur le marché, sans doute trop tôt, des véhicules dont l'autonomie insuffisante (guère plus de deux cents kilomètres) exige des recharges par production d'énergie en roulant ou par branchement à des bornes encore peu nombreuses. Bref, il n'est pas venu encore le temps où l'énergie électrique d'origine nucléaire (abondante et pas chère) permettrait, en France, de faire circuler des automobiles électriques sans rien changer à notre mode de déplacement individuel ! Le refus de prendre en compte les conséquences écologiques d'un mode de transport non généralisable, l'automobile individuelle, a quelque chose de pathétique et de vain.

Faut-il continuer à organiser ces grandes messes autour de la déesse bagnole au lieu de la remettre à sa place qui doit rester complémentaire et non essentielle ? Le roi des circuits vient d'être sacré champion du monde pour la septième fois consécutive. C'est un Français, Monsieur ! Et même un Alsatien... Il s'appelle Sébastien Loebb et fait rêver les foules. De temps en temps, au bord des routes, on écrase bien quelques spectateurs, mais c'est rare. Et puis, ils n'avaient qu'à pas s'installer au mauvais endroit ! Ils sont indisciplinés ces amoureux des grandes courses ! Le culte de la vitesse (condamné par ailleurs !) a ses prêtres et ses ors. Celui qui ne s'agenouille pas est ringard. L'aliénation des humains est bien assurée par des médias aux ordres. "


L'auto doit être désirable...

Faut-il admirer ce qui permet d'aller toujours plus vite ? Au salon de l'auto, on rêve et l'on prie devant des monstres rutilants qui roulent à plus de 300 Km au compteur (sur route, c'est interdit...!). L'usine à fabriquer du délinquant, à conditionner des clients qui s'identifieront à leur engin de mort crée des emplois. Alors... Alors, silence ! C'est sacré ! On ne touche pas à l'automobile. Et pas davantage à la moto, qui tue plus encore dès lors que ce qui tient lieu de carrosserie c'est le corps du conducteur lui-même, fut-il bien harnaché ! Les grands discours sur la sécurité ne s'appliquent pas à la violence routière. La vitesse tue bien davantage que les criminels mais ces meurtres là sont légaux. Quant à parler des blessés, traumatisés, infirmes à vie, il n'en est pas question. La guerre faite à ceux qui ont confondu jeunesse et vitesse n'est pas connue. Elle est internationale et fort meurtrière mais admise.


jeudi 30 septembre 2010

Rigueur et modestie

La rigueur a deux faces. la modestie n'en a qu'une.

La rigueur est dure, âpre et rigide. Elle est aussi l'exigence, la conscience de la difficulté et l'honnêteté de la pensée face à l'épreuve.

La modestie est humble et simple. Elle permet d'aborder la rigueur sans effroi.

La rigueur est donc franchement haïssable quand elle est imposée, tandis que la modestie est aimable si elle est voulue.

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La situation économique actuelle exige une rigueur, mais laquelle ? Pour avoir dilapidé nos richesses et exploité sans vergogne celles des autres, nous voici, en occident, contraints de limiter notre expansion, voire de rogner sur le gâteau que nous nous étions servi. L'écologie autant que le bon sens nous ont ouvert les yeux : les pays dits riches vivent au-dessus de leurs moyens. Il faut faire des économies, donc des sacrifices. La rigueur s'impose, soit, mais à qui ?

Ce qui saute aux yeux, actuellement, c'est que la seule rigueur qui soit imposée (sans pourtant oser employer ce mot, en France) est celle qui atteint le plus grand nombre, mais pas les profiteurs, ni ceux qui ont conduit l'économie occidentale dans l'impasse où elle se trouve ! La même loi comptable est, chaque fois, appliquée : beaucoup de petites sommes prélevées permettent d'engranger davantage que peu de grosses sommes retenues. Autrement dit, faire payer les pauvres est plus rentable que de faire payer les riches. La démonstration est peut-être imparable mais les conséquences d'un tel choix sont ravageuses dans l'esprit des citoyens. Cela signifie, en effet, que le partage est interdit, que l'écart entre les revenus n'est pas près de se réduire et qu'une minorité nantie s'efforce de faire durer son plaisir, sans considération pour l'avenir. Le piège est mortel.

Je suis pour une autre rigueur. Regarder la réalité en face ne rend pas malheureux même si le constat est sévère ! La rigueur choisie (en fonction de la satisfaction des besoins essentiels), la rigueur partagée (en proportionnant les efforts aux possibilités de chacun), la rigueur morale (qui interdit de se goinfrer quand les plus démunis souffrent), ces rigueurs là sont acceptables à condition que tout marché de dupe soit écarté, autrement dit à condition qu'une ultime rigueur s'avance : celle du contrôle strict et vraiment transparent, par l'ensemble des citoyens, de la politique économique, devenue nécessaire, en cessant de donner aux médias la mission d'enfumer les esprits. "Vaste programme" eut dit De Gaulle...

La rigueur qu'impose, jour après jour, l'actuel gouvernement est condamnable parce qu'elle interdit la modestie, c'est à dire la vie simple. Elle appauvrit au lieu, j'ose l'écrire, d'enrichir (car il est d'autres richesses que monétaires) ! Elle choisit ses victimes. Elle est l'outil de la conservation des privilèges. En outre, elle donne le désir du retour au passé, ce qui ne se peut pas et, surtout, qui aggraverait le mal.

La rigueur dont je ne sais dire si elle serait "de gauche" (la gauche, c'était au temps de la recherche de la justice, de la solidarité, de légalité et du partage dans un monde dont on croyait les richesses croissantes, voire infinies) ne peut qu'être une rigueur de sobriété, de modération et de mesure, qui s'étende progressivement, avec une révolution culturelle et comportementale à laquelle rien ne nous a préparés. Le mieux reste attaché au plus et l'on ne sort pas d'une société de consommation en quelques années !

Les prochains débats électoraux vont porter sur ces analyses de la rigueur économique sous ses deux aspects : l'austérité contrainte et la simplicité volontaire.

À droite, on se gaussera de la gauche qui ne sait choisir entre la décroissance et le productivisme et l'on se fera les chantres de l'obligation de serrer les boulons pour préserver la croissance des richesses sans laquelle, répétera-t-on, il n'y a pas d'emploi durable. (Aucun discours politique au goût du jour ne peut être tenu sans faire usage du qualificatif "durable" !).

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À gauche, ou plutôt au PS, on va, jusqu'à l'approche du scrutin présidentiel, balancer entre les deux choix indispensables "pour gagner" : satisfaire la demande populaire au risque de ruiner la France ou pratiquer une rigueur budgétaire acceptable par les marchés. Dilemme ! Au moment où, l'un après l'autre, les États de l'Europe se rembrunissent, la tentation de ne pas gâcher la chance de prendre le pouvoir, en faisant jouer la simple alternance, risque d'édulcorer la candidature d'un ou d'une socialiste. Avec subtilité et cynisme, Nicolas Sarkozy joue cette carte du "brunissement" des sociétés pour tenter de sauver son catastrophique quinquennat.

L'enjeu est pourtant ailleurs, et rien ne bougera sauf à voir ressurgir des manifestations nouvelles de ce qui n'est pas une crise, (puisqu'elle dure) mais qui est une mutation historique! L'effondrement de l'occident et la fin de son hégémonie, face à la Chine, l'Inde et le Brésil, se paieront, tôt ou tard. La rigueur capitaliste ne règlera rien puisqu'elle ne vise qu'à retarder l'échéance en contractant les services que l'État providence avait, au milieu du XXème siècle, installés, pensions-nous, de façon stable et définitive. La seule rigueur efficace envisageable devrait être liée, d'une part, à une décrue des consommations et des productions non utiles et gaspilleuses et, d'autre part, à une chasse aux injustices criantes qui découragent l'effort de tous en faisant de la richesse un spectacle dont seule une petite minorité peut être l'actrice !

La modestie sera notre sort ou bien il nous faudra constater la plongée de beaucoup de nos concitoyens dans la misère. Tel est le choix. Il ne fera pas l'objet du débat présidentiel de la part de ceux qui se donnent une chance d'être élus. La politique, la vraie, passera pourtant par là, par-delà les élections car les scrutins nationaux souffrent, à présent de deux insuffisances insurmontables : celle du temps (la durée des mandats ne permet pas des engagements à long terme) et celle de l'espace ( les problèmes majeurs -écologiques, sociaux et financiers- n'ont pas de solutions au niveau de notre seul hexagone).

Porter le regard aussi loin qu'on en est capable et penser au minimum en européen me semblent, en 2010, le moins qu'un citoyen puisse faire s'il veut que la rigueur ne s'abatte pas sur lui mais qu'il la domine en orientant sa vie vers la simplicité volontaire.




mercredi 22 septembre 2010

La désobéissance comme condition de la démocratie



La démocratie se porte mal. Elle est malade. Très malade. Les discours sont trahis par les actes. Les mots forment un filet dans lequel les citoyens se prennent et se retrouvent enfermés. Les responsables des organisations politiques font assaut de sincérité, mais elle est feinte. l'objectif réel est la conquête du pouvoir donc des moyens de dominer, quand ce n'est pas des moyens de s'enrichir.

L'époque sarkoziste aura eu l'immense avantage de rendre transparent le système dans lequel les professionnels de la politique se vautrent. C'est dans ce contexte que se trouve posée la question de la désobéissance politique.

"Désobéir pour le service public" est le titre d'un tout petit livre publié cet été 2010 ! Il pose la question de la responsabilité citoyenne. Obéir à un ordre injuste est une faute. Désobéir par simple volonté de se démarquer d'un pouvoir qu'on exècre, aussi ! Désobéir n'est un acte citoyen que s'il est fondé.

La désobéissance fondée exige non seulement un lourd travail permettant de justifier ce qu'il faut bien appeler une rebellion ! Il faut encore que ce soit sous le regard et avec l'accord, voire la participation de personnes de confiance, que s'engage ce qui va conduire à un conflit avec les autorités ! La désobéissance a un coût : la sanction, et ce n'est pas en cherchant à l'éviter qu'on peut saisir l'opinion de la justesse de sa cause.

Nombreux ont été, et depuis longtemps, les grands esprits qui ont refusé de s'associer à des lois, règlements ou décisions administratives qui leur semblaient inacceptables, que ce soit pour des raisons éthiques ou politiques. De Thoreau à Gandhi, de Martin Luther King aux insoumis de la guerre d'Algérie, les exemples ne manquent pas de personnes qui ont eu raison de s'interdire de suivre les ordres qui leur ont été donnés. A posteriori, cela est apparu évident, mais au moment des faits, les réactions du pouvoir ont été vives.



Quand un général français s'est opposé à la torture, il a été déposé et l'officier de la Bollardière est devenu, aux yeux de beaucoup... un traître ! L'engagement non-violent a été exemplaire mais il est resté exceptionnel.

Nous vivons un autre temps. Il s'agit de passer de l'exception à la banalité ! Oui, il est banal de désobéir dans une république où se prennent des décisions contraires à sa conscience. Voter puis laisser faire l'élu est une lâcheté. L'élu doit pouvoir compter sur le soutien ou la critique de ceux qui l'ont délégué non pour penser à leur place mais pour exécuter des décisions. l'exécutif est aux ordres du pays. S'il l'engage dans une voie fausse, périlleuse ou conduisant au pire, il doit pouvoir compter sur ce qui va pouvoir redresser l'erreur. cela ne se peut, entre deux élections que par une opposition décidée et pas seulement verbale. Liste à puces

La désobéissance, encore une fois responsable, réfléchie et fondée, fait partie du comportement du démocrate et constitue donc une condition impérative du maintien de la République sur ses fondements.


samedi 11 septembre 2010

Des crimes trop fréquents pour n'être que des fautes individuelles.

L'Église catholique de Belgique, secouée par des scandales de pédophilie, a publié (en néerlandais, la traduction française est en cours) une centaine de témoignages de victimes de prêtres ! Le texte est disponible sur le site www.commissionabus.be

« C'est le dossier Dutroux de l'Église » : c'est ainsi que le professeur Peter Adriaenssens, pédopsychiatre indépendant, qui préside la « Commission pour le traitement des plaintes pour abus sexuels dans une relation pastorale », mise sur pied par l'Église, qualifie son rapport final. La commission a reçu, entre janvier et juin 2010, 475 plaiFresque murale aux cascades.JPGntes.

Des pressions ont abouti à la démission de la Commission Adriaenssens ! A-t-on voulu, ainsi, empêcher la vérité de se faire jour ? En réalité, on en sait assez pour juger non les personnes mais la situation : en trop de lieux, de par le monde, on a violé des enfants et fait taire leurs familles pour qu'on puisse se contenter d'en appeler à la morale et à la loi ! Il faut comprendre et pas seulement réprimer, sinon les mêmes causes produiront, ailleurs et autrement, les mêmes effets, c'est-à-dire l'agression sexuelle de mineurs par des adultes investis d'une autorité, religieuse ou pas !

Pourquoi dit-on : "Le dossier noir de l'Église", si ce n'est parce que c'est la principale des Églises chrétiennes qui est d'abord concernée : l'Église catholique. Non que tous les violeurs d'enfants soient des prêtres catholiques, ni même des chrétiens, mais parce que c'est au sein de cette Église que les exigences, dans le domaine de la morale sexuelle, sont les plus hautes et, hormis une église catholique orientale, les prêtres y sont astreints au célibat et donc à la continence.

L'exemple de "la pureté" et de "l'abstinence" ne peut plus être donné. Non seulement des prêtres célibataires ne sont pas continents, mais certains ont abandonné le sacerdoce pour vivre en couple. La culpabilisation du sexe a été l'une des causes de perversités sexuelles. Attirer l'attention sur la faute, c'est la provoquer. Mais plus, voir une faute là où se situe la condition humaine, c'est rompre avec la nature, en lui opposant une fausse culture, au risque de tomber dans des comportements violents. La pédophilie, quoi qu'aient pu écrire y compris des philosophes, est un crime parce que cela conduit à aller à l'encontre de la volonté d'enfants, qu'on les séduise ou qu'on les force.

On comprendra donc que ce n'est plus de prêtres pédophiles dont il est seulement question mais des conceptions de l'homme qui le placent sous la hantise du mal, de la faute, de l'erreur ou du pêché. Les théologiens ont beau dire et écrire, l'enseignement religieux qui domine en l'Église catholique aboutit à ce que les "fidèles" (qui sont "conformes à la vérité", dit le dictionnaire !) associent le péché et la chair. Il s'ensuit que corps n'est pas aimable, même s'il est respectable. Seul l'esprit qui habite ce corps, est digne d'amour. Horrible confusion que, je m'empresse de le dire, tous les penseurs chrétiens n'effectuent pas, mais qui, je le répète, l'emporte dans l'opinion catholique.

"Le péché originel" -  Bas-relief ornant le portail de la Vierge de Notre-Dame. On y voit  représentée la tentation d’Adam au jardin d’Éden par la diablesse  Lilith, séductrice à queue de serpent qui figure dans les écrits  rabbiniques du Talmud de Babylone.

Bas-relief ornant le portail de la Vierge de Notre-Dame de Paris. On y voit représentée la tentation d’Adam au jardin d’Éden par la diablesse Lilith, séductrice à queue de serpent qui figure dans les écrits rabbiniques du Talmud de Babylone.

Il n'est pas d'éducation sexuelle, quoi qu'on raconte ou qu'on écrive, parce qu'apprendre à "faire l'amour" (mais l'amour se fait-il ?) dépasse les capacités de tout éducateur, parent, enseignant ou animateur. Tout l'être humain est engagé dans l'acte sexuel et ce n'est pas le caractère pornographique ou platonique des gestes de l'amour qui en peut masquer et déshumaniser l'essentiel : la rencontre de deux humains qui se découvrent entièrement ! La multiplication des informations relatives aux agressions sexuelles n'a pas pour cause, (en plus de la médiatisation contemporaine de comportements nombreux, et cachés depuis toujours dans le silence des familles), la violence des pulsions ! C'est bien l'incapacité de donner sens à une sexualité réduite à l'apaisement d'un désir qui est responsable et qui aboutit à une affreuse aberration culturelle dont "le physique" n'est que l'instrument.

Se dévoiler, dans tous les sens du mot, c'est aller à la recherche du mystère de la personne dont on va partager un moment de vie dans la plus grande des intimités possibles. Un prêtre est éloigné de cette réalité là et, au sens strict, il est incapable de morale sexuelle, s'il s'agit du respect non obtenu par l'interdit, mais mis en pratique dans les gestes amoureux. "L'homme n'est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l'ange fait la bête"affirmait déjà Pascal.

Voilà qui est bien injuste pour les bêtes ! La culture, si elle est bien le propre de l'homme, doit non seulement nous faire accepter notre animalité mais nous la faire aimer. Aimer son corps pour savoir aimer d'autres corps. Se voir soi-même, en ce corps de l'autre qu'on voit, fait partie de la connaissance de la condition humaine.

Je pensais les chrétiens un peu mieux armés que d'autres pour respecter autrui avec le principe évangélique que Jésus dit égal à l'amour de Dieu : "aimer son prochain comme soi-même" (Mc 12,31).

La théorie du péché, de surcroît originel, enseignée dès le catéchisme, et qui atteindrait tout homme avant que ne se soit éveillée en lui la conscience, de façon quasiment génétique, met à mal cet Évangile d'amour ! Comment s'aimer soi-même entaché de péché avant même d'avoir péché ? S'agissant des enfants, Jésus avait pourtant prévenu : "tout ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait..." (Mt 25:40), ou encore : "mais si quelqu'un scandalisait un de ces petits , il vaudrait mieux pour lui qu'on suspendit à son cou une meule de moulin et qu'on le jetât au fond de la mer" (Mat. 18-6).

On le voit, le mal et le péché sont deux. Le péché (encore une fois tel que l'idée s'en véhicule dans la majeure partie de l'Église catholique) contient l'explication du mal et impute nos fautes aux faiblesses de la chair dont bien sûr, fait partie le sexe ! Que cette fausse évidence fasse des ravages dans les rangs des catholiques les plus convaincus ne saurait étonner !

Lutter contre toutes les violences sexuelles ne passera pas par l'exhortation et le confessionnal. Il s'agit d'un défi culturel et politique fondamental où se joue notre humanité même. Là où il y a viol, il y a guerre, comme là où il y a guerre, il y a viol : une guerre faite à la réalité du monde !

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