dimanche 8 juillet 2007

Défaites et victoire.

C'est ainsi. Et c'est fort désagréable. Avant toute victoire, il faut avoir subi maintes défaites.

Et encore! Il ne s'agit jamais de LA victoire, finale, définitive... Moins encore de la Victoire, avec une majuscule, celle qui marque à jamais l'histoire.

Les victoires, les grandes, les militaires, sont toutes le signe de l'échec de l'homme.

Non, je veux parler d'une petite victoire, celle qui, simplement, -mais c'est immense-, redonne du goût à la vie, celle dont on peut se réjouir sans honte, celle qui laisse satisfait et n'humilie personne.

Exemple.

Des enfants rroms sont interdit d'école dans la plaine de Pierrelaye (Val d'Oise). Leur savoir, acquis en famille, ne suffit plus. Pour entrer dans le pays où ils vont vivre, il leur faut parler, lire, comprendre le français. Leurs parents l'ont compris. Ils cherchent donc à les inscrire dans une école, proche, où ils rencontreront des enfants de leur âge. Seulement, voilà: le maire de la ville concernée, Méry-sur-Oise, se refuse à laisser inscrire des enfants qui vont, croit-il, perturber l'école communale, et, surtout, vont fixer les familles alors que la plupart des habitants voudraient les voir partir. Défaite.

Il est, cependant, des Français pour ne pas accepter ça. Notamment des enseignants qui ont pour fonction de se porter vers ceux qui ne peuvent se rendre à l'école. Les camions-écoles de l'Association pour la scolarisation des enfants tsiganes (ASET) ont donc été conduits vers les campements de familles roumaines en attente de scolarité. C'était pénétrer dans une zone désormais interdite, en tout cas d'accès limité, protégée, et dont a peine à dire qu'elle est "naturelle" tant elle est polluée. Dans un premier temps, les gendarmes verbalisent. Défaite.

L'ASET se rebelle, et avec elle des citoyens révoltés par cette absence de considération pour de jeunes humains qui ont droit à vivre et à connaître. Elle saisit les autorités académiques départementales, exige de pouvoir aller remplir sa mission, sans avoir à payer l'amende accompagnant les procès-verbaux. Victoire, très provisoire.

La même ASET, avec courage, toujours soutenue par des organismes et habitants de la proche région, saisit le Tribunal administratif de Cergy, puisque la loi n'est pas respectée et que le droit à l'instruction est bafoué. Les magistrats estiment que pareille requête ne peut être effectuée que par les familles elles-mêmes et par le truchement d'un avocat. Défaite.

Les maires des communes constituées en Syndicat, sur la Plaine de Pierrelaye, se retrouvent autour du Préfet après lui avoir écrit: ils déplorent l'inaction de l'État qui laisse perdurer la présence nuisante et intempestive des familles roms roumaines. Ils constatent que depuis le 1er janvier 2007, ces importuns sont devenus citoyens européens et ne peuvent être expulsés de France si facilement. Qu'à cela ne tienne : les délinquants, eux, peuvent être chassés. On les réputera tels. Tous. Et si ça ne suffit pas, on les harcellera par tous les moyens. On ne leur facilitera aucun accès (à l'eau, à l'électricité, aux bennes à ordures, aux soins, à l'école donc, -et pas même au terrain où sont regroupées en bidonvilles les ex-caravanes, sous peine de P-V). Défaite.

Et pourtant, ces manœuvres rétrogrades ne serviront à rien. Tôt ou tard, elles deviendront inopérantes. Qui aurait dit, dans les années 1960, que les bidonvilles surpeuplés de Portugais, à proximité, -par exemple dans l'île fluviale du Bras Favé, à Conflans-Sainte-Honorine-, disparaitraient et que ses habitants feraient souche, dans la région? Les Roumains resteront en France en dépit des expulsions qu'on effectuera "pour briser les mafias" (car tous les Rroms sont des mafieux, c'est bien connu : nos édiles l'affirment...!). Les enfants seront, progressivement, scolarisés. Les quelques milliers de Tsiganes étrangers (roumains, bulgares, cossovars, macédoniens...) ne seront plus distingués des centaines de milliers de Tsiganes français. Les maires qui se seront acharnés à empêcher les installations de familles rroms ne réussiront qu'à les faire déplacer, et pas toujours à distance de leurs communes! Victoire? Triste victoire!

Triste victoire parce que, pendant des années, les enfants concernés, et leur parents, vont continuer de mener une vie misérable, dont il eut été, de toute façon difficile de les aider à sortir, et qui s'enfonceront peu à peu dans une nouvelle marginalisation, aggravée par des transformations sociales auxquelles ils ne sauront comment s'adapter. Quelques familles deviendront, plus vite, francophones et s'installeront dans des logements sans confort dont ils se contenteront. Courte victoire.

Oui, tous ces combats d'arrière-garde (de la part de beaux esprits que n'intéresse nullement le sort lamentable d'Européens devenus les parias de nos sociétés confortables) sont voués à la défaite.

Mais à quel prix la victoire des tenants de l'hospitalité? Au prix, en négatif, de la solitude, de l'incompréhension, parfois du mépris... Au prix aussi, en positif, de l'amitié entre tous ceux qui ont fait le choix de la solidarité active. Au prix de la rencontre d'une population qui, pas plus qu'une autre, ne saurait être jugée d'après ses insuffisances et ses fautes, et auprès de laquelle on peut aussi apprendre à vivre mieux. J'en témoigne.

Et cette toute petite victoire là, cette goutte d'espoir, je la tiens, en réalité, pour l'une des plus grandes.

samedi 7 juillet 2007

L'ouverture n'était qu'un gouffre.

Voilà une ouverture qui est une béance.

Nicolas Sarkozi fait parler de lui, et y compris par ceux qui, précisément, ne voulaient plus en entendre parler, et j'en suis!

À l'heure où j'écris, les gazettes fourmillent de nouvelles et de commentaires au sujet de la désignation possible par la France de Dominique Strauss-Kahn à la tête du FMI. Il rejoindrait, ainsi, un autre "socialiste" français, Pascal Lamy, promu, en 2005, à la tête de cette autre grande institution régissant le mondialisation de l'économie : l'Organisation Mondiale du Commerce ou OMC.

Avouons que l'on ne s'attendait pas à ce que le nouveau Président de la République promeuvent ses adversaires... Et si ce n'était pas ses adversaires; seulement ses concurrents d'un moment? Un adversaire non seulement dénonce une politique et s'y oppose mais il en conteste le principe même : en l'occurrence, le libéralisme économique. Un concurrent, lui, estime seulement qu'à l'intérieur d'un même système, on peut faire autrement, et mieux.

Sarkozy ne risque rien à offrir des responsabilités à ceux qui partagent ses vues sur le fond. Au contraire, il déstabilise le parti concurrent, l'affaiblit, le réduit et le rejette, ainsi, loin des responsabilités essentielles. Non, ce n'est pas du machiavélisme; c'est de l'intelligence, doublée d'effronterie. C'est le plus haut niveau de la politique politicienne. Sans plus.

De cet épisode, on peut tirer aussi un enseignement positif, les socio-libéraux sont identifiés : Kouchner, Bockel, peut-être Védrine ou Lang, maintenant : DSK. Fabius lui-même aura été sollicité! Ou bien le PS suit cette pente et il se suicide, ou bien il réagit, et il se scinde. Auprès de Sarkozy ne doivent pas manquer les conseillers politiques intimes du PS... Pour disperser un troupeau d'éléphants rien de plus efficace que de les nourrir de... libéralités (ou d'illusions) en des lieux différents du champ politique!

Qu'il fournisse une réponse positive ou une réponse négative, l'unique député socialiste du Val d'Oise est marqué au front. Il est désormais celui qui peut être pressenti pour diriger un des outils les plus puissants du capitalisme international, une machine implacable dont les exigences ont fait souffrir et continuent de faire souffrir les peuples pauvres. C'est fini.

Merci Sarkozy pour cet manipulation révélatrice.

L'ouverture devient un gouffre où s'engloutissent un à un les rivaux : ceux qui peuvent être arrachés à la sphère d'influence du parti socialiste, mais aussi ceux de l'UMP qui ne supportent pas des présences qui leur ravissent des postes de pouvoir. Voilà ces derniers remis à leur petite place pendant que le monarque continue sa partie d'échecs en récupérant, une à une, les pièces qu'il fait choir. Dès lors, il va falloir aller jouer sur un autre échiquier; celui que nous avons sous les yeux compte essentiellement des pièces blanches, presque plus de pièces noires.

À part quelques moutons... de cette couleur.

samedi 30 juin 2007

Subvertir le capitalisme

Le capitalisme ne se renverse pas. Ceux qui l'ont cru ont perdu la main, pire ont commis des crimes. Il n'est pas question de briser l'économie de marché; il s'agit de la subvertir.

C'est l'arrogance des puissants qu'il faut casser. Elle est indue.

Gérer ou diriger?

Il n'y a rien à dire à l'exécution d'un budget soumis à l'examen d'un Conseil municipal, dès lors qu'il est contrôlé et honnête, c'est la préparation du budget qui est délicate et difficile, car choisir ce qu'on fait des crédits dont on dispose est un acte politique dès lors qu'il n'est pas possible de tout faire!

Gérer c'est peut-être gouverner, ce n'est pas diriger. Celui qui gouverne ne fait qu'aller là où on lui dit d'aller. La politique, au contraire, n'est pas l'art de gouverner, c'est décider de la voie à prendre, c'est diriger.

La religion contre le religieux

La religion est la codification du religieux, sa mise en "ordre".

J'éprouve, désormais, une défiance systématique à l'égard de toutes les religions parce qu'elles tuent le religieux après l'avoir enfermé dans des contraintes fortes et des limites étroites.

En outre la récupération du sentiment religieux par les pouvoirs politiques avec la complicité des porte parole des confessions, du pape jusqu'à la plupart des prêtres, pasteurs, imams ou rabins, conduit à la domination des peuples et non à leur libération.

La fin du royalisme

Nous voici, pour un temps ou pour longtemps, soulagés de l'hypothèque Ségolène Royal. Du moins au sein du PS. Le blairisme à la française est, pour le moment, écarté, au moment même où Tony Blair quitte le pouvoir, en Grande-Bretagne. La double bévue de Ségolène Royal sur la généralisation des 35 heures et le SMIC à 1500 euros, qu'elle aurait défendus sans y croire au cours de sa campagne, a rompu le charme...

Maintenant, il serait injuste et dangereux d'imputer à la seule candidate des socialistes la responsabilité de "l'échec impossible". C'est le PS tout entier dont le fonctionnement, les contradictions et les erreurs d'analyse ont permis cette aventure pénible.

La candidature Royal n'aura pas été un accident mais la conséquence d'un renoncement au socialisme lui-même.

jeudi 21 juin 2007

Pour une autre France : Audin, Boulin, Borrel, Ben Barka. Va-t-on tourner ces pages?

Audin, Boulin, Borrel.
Tous assassinés.
On ne peut soutenir que nous ne savons rien! Il suffit de lire :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_Audin
http://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_Robert_Boulin
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bernard_Borrel

Le premier, grand mathématicien mais communiste, mort à Alger, sous la torture des paras, pour défendre l'Algérie française....
Le second, ministre du travail de VGE, "suicidé" dans la forêt de Fontainebleau, pour masquer un complot politique au sein même du gouvernement de la France.
Le troisième, juge, précipité au bas d'un ravin, à Djibouti, pour avoir enquêté sur les crimes des dirigeants d'un pays qui héberge l'armée française.

Mme Josette Audin, 50 ans après, en appelle à Sarkozy! (voir dans l'Humanité de ce jour)
La famille de Boulin exige la réouverture du procès qui avait conclu à un suicide. (Lire le livre de B. Collombat : Un homme à abattre, avril 2007)
Mme Borrel a été reçue à l'Élysée par... Sarkozy, le mardi 19 juin. (voir sur le site : rue89.com/2007/06/19/affaire-borrel-sarkozy-s-engage-a-la-verite)

Chirac aura été le dernier chef d'État français en âge d'être, dans sa jeunesse, soldat en en Algérie (lieutenant).
Il a reconnu les crimes de Vichy, pas ceux de l'armée française.
Le cadavre d'Audin n'a jamais été remis à sa famille; aucune explication sur sa mort n'a été fournie.

Tous les Présidents, y compris Mitterrand, ont laissé pourrir des dossiers sensibles au nom de la raison d'État.
L'enquête sur Boulin, ouverte en 1983 a été close par un non-lieu, en 1992.
Boulin, pressenti comme premier ministre, avait-il approché des questions intouchables?

"Le procureur de la République, Jean-Claude Marin, a confirmé, ce même mardi 19 juin, en soirée, l'origine criminelle de la mort du juge Bernard Borrel",
La Françafrique n'est plus, en période de de mondialisation, supportable par notre République ex-coloniale.
Sarkozy s'apprête-t-il à tout mettre sur le dos de ses prédécesseurs? Rupture!

Il faut prendre très au sérieux cette réouverture des placards.
La morale n'a pas grand chose à voir dans ces affaires...
Une nouvelle génération se décharge des paquets encombrants, pour avoir les coudées franches.

Peut-être saurons nous aussi, bientôt, comment on a pu laisser Ben Barka se faire assassiner en France.
Profitons de ce grand ménage politique pour faire émerger la vérité.
La France que nous aimons est cette anti-France, tellement fustigée hier.

On a toujours tort d'avoir raison trop tôt...
Mais tout finit par ce savoir
Trop tard hélas pour changer la donne politique.

Sauf...
Sauf si nous tirons les enseignements de ces horreurs.
Sauf si nous ne nous laissons pas tromper par les faux semblants de Sarkozy.

mardi 12 juin 2007

Voter blanc

Voici des décennies qu'est tentée la promotion du vote blanc.
Jamais, en France, cette possibilité d'exprimer son opinion n'a été prise en compte.
Voter blanc ou nul, en France, c'est la même chose!
Faire l'acte d'introduire un bulletin vierge ou laisser l'enveloppe vide revient au même : c'est à peine si l'on repère le nombre de ces cas d'abberration. Quant à faire entrer ces avis parmi les suffrages exprimés, il n'en est pas question!
L'électeur qui a voté blanc n'est qu'un votant.
Il y a, à cela, des raisons politiques : contester l'offre politique est insupportable à ceux qui se partagent les suffrages; comptabiliser les refus, serait valider des bulletins qui peuvent rendre impossible l'émergence d'une majorité absolue.
Dans les conditions actuelles voter blanc est une contestation de la bipolarisation.
Voter blanc est une mise en cause du mode de scrutin.
Voter blanc, c'est voter, mais dire que les conditions du vote sont inacceptables.
Voter blanc, c'est vouloir sortir du système majoritaire qui accable les options minoritaires.
Voter blanc, c'est vouloir une France où l'on vote comme presque partout en Europe avec non pas une dose mais une large part de proportionnelle voire une proportionnelle intégrale.
Voter blanc, c'est vouloir une autre République.

lundi 11 juin 2007

Ne pas s'associer à la défaite!

Hier soir, au milieu de la débâcle générale des candidats hostiles à l'UMP, j'ai pu constater que nous restions prisonniers d'une illusion très dangereuse : la gauche serait ce qui s'oppose à la droite. Eh bien non! C'est un peu court. Ce dualisme ne sert à rien si aucun autre contenu, aucune affirmation alternative et crédible ne permettent à cette gauche de se faire reconnaître! (Car, à chaque scrutin, il faut se faire re-connaître!)

La cause de la déroute est là : la gauche est devenue à tel point méconnaissable qu'on ne peut plus l'identifier et donc la choisir! Quand la gauche n'est plus la gauche, elle s'effondre. Plus encore: nombre de candidats se réclamant de la gauche ne l'incarnent pas; les électeurs les ont donc écartés!

Continuer à soutenir le PS tel qu'il est devenu, c'est trahir la gauche dont, sans conviction, nous nous réclamons. Les écologistes ne doivent se résigner à la défaite inéluctable du 17 juin et donc ne pas s'y associer.

Ce matin, à la lecture des résultats nationaux, l'analyse s'amplifie : déçus les électeurs des milieux populaires, présents encore il y a un mois, ont déserté. L'abstention n'est pas le fait du hasard. Elle est politique. Elle est un rejet de la donne. La gauche n'est pas vaincue; elle est absente.

La gauche qui existe est donc ailleurs que là où l'on a voulu la fixer : dans la gauche d'hier, la gauche mécanique qui n'a qu'à suivre les consignes de vote des partis. La gauche vivante, quel que soit le nom qu'on lui donnera, se cherche et finira par se trouver.

Reste à à déterminer si la solidarité avec ceux qui ont représenté la gauche doit, une dernière fois, se manifester, par exemple, par un appel au soutien du candidat PS à la dérive, dans la seconde circonscription du val d'Oise où je vote. J'ai le sentiment que ce serait trahir les électeurs qui ne se reconnaissent, eux, ni dans la droite triomphante ni dans une gauche sans avenir. Nous sommes entrés dans une ère nouvelle et l'échec est si violent qu'il est inutile de vouloir en limiter voire en masquer l'amplitude.

Les écologistes n'ont pas à soutenir la gauche, à voler à son secours, tout simplement parce qu'elle ne leur est pas extérieure, parce qu'ils sont eux-mêmes la gauche, dans la gauche, une partie de la gauche, et responsables, pour cela, de ce qu'elle va devenir. C'est d'eux-mêmes que les Verts doivent, en priorité, s'occuper. Le PS n'est pas la gauche à lui seul. Pour lui, le vin amer est tiré; qu'il le boivent. DSK, dit-on, risque d'être battu : on le confondra donc moins, à présent, avec la gauche. L'opération vérité a commencé. Très douloureusement, contradictoirement : la gauche, en cessant d'être la gauche, s'est battue et détruite elle-même. On ne peut soutenir ce qui est à l'origine de la déconfiture.

Royal n'était pas candidate : elle aura ainsi évité la défaite dans sa terre du Poitou. La voilà qui veut prendre langue avec Bayrou. Si l'on se risque dans sa propre logique, cela vient non seulement un peu tard, mais c'est inutile et peut-être pitoyable. Appeler au secours d'une gauche qui n'est plus la gauche, un homme courageux mais en plein échec, qui a toujours honnêtement reconnu qu'il n'était pas de gauche, est non seulement contre productif, c'est ajouter de la confusion à la confusion, c'est en appeler à un "recentrage" de la gauche, c'est persister dans la volonté de blairiser le socialisme. C'est.... suicidaire!

Les Verts ont, à présent, autre chose à faire que d'accompagner, jusqu'au bout, le combat d'arrière garde de ceux qui sont la cause de leurs propres malheurs!

Si mes propos choquent, j'en demande pardon, mais qui ne parlera pas clair, en ces temps de décomposition-recomposition se résignera à voir "une" des gauches, devenue obsolète, gérer, à l'Assemblée Nationale, son tout petit capital minoritaire. Nous devons avoir plus d'ambition! L'écologie politique nous donne des clefs pour l'affirmation d'une tout autre gauche, qui sera de nouveau solidaire des victimes du système économique, qui sera à son tour "décomplexée", et qui préparera une véritable alternative; pas une simple alternance.

jeudi 7 juin 2007

Vers un nouvel ailleurs des écologistes.

Succès pour l'écologie, échec pour les écologistes ? L'élection présidentielle a permis de beaucoup parler de l'écologie, mais c’est le candidat le moins écologiste qui est devenu le Président de la République française !

Et maintenant? Comme, désormais, tout est lié aux risques considérables d’un réchauffement climatique non maîtrisé et au déficit des ressources énergétiques non renouvelables, l’urgence écologique va donc rester au cœur du débat politique. La signature du Pacte écologique de Nicolas Hulot avait traduit cette reconnaissance d’une évidence économique et politique, mais elle n’a nullement permis d'extraire la pensée politique de l'impasse intellectuelle et des fausses logiques qui nous ont conduits là où nous en sommes ?

Certains choix écologiques seront sans doute, un peu mieux pris en compte car on ne peut plus faire autrement. Même aux USA, dans certains États, on évolue. Pourtant, il n’est pas encore question de voir les dirigeants français remettre en cause ces choix nucléaires que, pourtant déplorent la majorité de nos concitoyens des autres pays d'Europe. De même, le moratoire sur les cultures OGM n'est point envisagé, en dépit du principe de précaution inscrit, à présent, dans la charte de l'Environnement de notre Constitution.

Une idée-force s’est imposée en France, avec bien du retard : nous ne pouvons plus vivre en nous en tenant à une conception quantitive de l'économie, en mesurant le dynamisme de nos sociétés à l'aide du seul comparatif de leurs PNB. Prendre exactement en compte nos ressources et nos moyens, impose de faire appel à d'autres critères. Économiser et écologiser iront désormais de pair. Pourtant, rapidement, apparaitrons les limites de la recherche de nouvelles sources de profit liées à l'exploitation du gisement d'activités regroupées autour du thème rebattu du « développement durable » (locution fourre-tout qui fait d'autant plus consensus qu'on peut y loger des concepts différents, voire opposés!).

Certes, il va bien falloir, dans les prochaines années, travailler sur l'isolation progressive des logements et bâtiments, la fourniture d'eau chaude domestique par panneaux solaires, la production d'électricité photovoltaïque, l’installation de puits canadien de type géothermique, voire l’installation de parcs d’éoliennes et la production de carburants propres. Et tout cela fournira des contrats juteux aux entreprises. Mais dès qu’il va s’agir d’évoquer la diminution du transport automobile, la réduction du transport aérien, la limitation de l'usage des pesticides, le contrôle accentué des industries chimiques polluantes, ou l'amélioration rapide des transports publics en nombre et en qualité, alors là, on risque de retomber dans le discours convenu qui en appelle à la science, au progrès, aux évolutions technologiques pour reporter à plus tard les décisions qui seraient à prendre, pourtant, courageusement, dès à présent !

L'écologie est entrée dans le champ économique. Il ne faut donc pas s'étonner que l'adaptabilité du capitalisme et sa capacité à mettre en œuvre tout ce qui peut produire des richesses, le conduisent à l'exploitation du filon. Mais toute cette récupération ne peut aller sans exacerbation des contradictions! La première étant qu'on ne peut, à la fois, gérer, sans se donner de limites, un monde qui est limité. La seconde, non moins délicate, étant que le renouvellement des ressources exploitables s'effectue à des échelles de temps qui excluent le court terme et donc le profit immédiat.

Le productivisme (qu’on appelle encore croissance, ce mot qui garde encore pour sens : produire pour produire, et le plus possible, afin de satisfaire les besoins de la société humaine), constitue une idéologie qui a ravagé la gauche comme la droite. On sait pourtant, de mieux en mieux, qu’on peut produire plus tout en aggravant la misère du monde, ne fut-ce que parce qu’on a toujours besoin de moins d’emploi, d'heures travaillées, pour obtenir plus de marchandises. Le slogan sarkoziste « travailler plus pour gagner plus », qui a fait florès, repose sur une illusion géante : d’une part parce que cela conduit à réduire le travail humain au travail salarié (ce que chaque activité ménagère permet de nier) mais aussi parce qu’en augmentant le nombre d’heures de travail, tout en diminuant la rétribution de chaque heure travaillée, on peut abaisser le coût total du travail et donc restreindre les rémunérations. La décroissance, concept dont on ne peut déjà plus empêcher l’examen, ne signifie pas recul de la production mais choix motivé de la production ; elle ne signifie pas renoncement à tout développement mais réorientation sélective du développement vers la satisfaction des besoins essentiels de l’humanité.

La FAO vient d’annoncer que l’agriculture biologique est en mesure de satisfaire tous les besoins alimentaires des 7 milliards d’êtres humains que nous serons bientôt. Les discours sur la production agricole intensive, pour sauver de la famine les populations des pays dits « en voie de développement », étaient et restent donc des discours mensongers. Dans la même fausse logique, si l’on utilise de trop grandes surfaces de terres arables pour produire du colza, de la canne à sucre ou du manioc, afin de remplacer l’essence de nos voitures par de l’éthanol, on va affamer les habitants de pays entiers, notamment sous les Tropiques! Si nul ne fait la critique écologique et politique des fausses solutions économiques, tant celles d’hier que celles que mitonnent de pseudo experts, alors là, oui, il y a motif à avoir peur, y compris peur des violences que cette injustice planétaire massive va engendrer. Aux écologistes de faire connaître l'étendue des périls! C'est là leur première tâche politique.

L’écologie n’est pas d’abord une théorie, c’est une pratique à mettre en œuvre dans notre quotidien. Il n’y a pas d’écologie sans écologistes. Encore faut-il que ces écologistes sachent apporter leur contribution à la redéfinition des valeurs d’une gauche qui ne sait plus ce qu’elle est. La gauche a raté le virage qui pouvait la redynamiser, et les Verts, en son sein, n’ont pas réussi à faire passer le message simple suivant : il n’y a pas plus de gauche sans écologie que d’écologie politique ailleurs qu’à gauche.

Soyons précis : il existe trois visages de la gauche (ce qui la rend méconnaissable) : la gauche de type blairiste, socialo-libérale, de centre gauche, ouverte au centre tout court, la gauche de gouvernement, à la française, aux idéaux devenus flous, unie autour d’un PS restant l'axe d’une majorité plurielle allant de PCF au MDC, au MRG et aux Verts, enfin, la gauche altermondialiste, riche de sa diversité, mais faible de par son histoire, juxtaposant trois variétés de trotskismes, mêlant différents courants antilibéraux et minoritaires dans leurs partis respectifs, ou, de plus en plus souvent, sans parti du tout. Ségolène Royal pour n’avoir pas choisi entre le premier et le second type de gauche (et en voulant faire se rallier à elle, in fine, y compris les altermondialistes) a sans doute perdu son élection pour n'avoir pas su ou pu échapper à la confusion engendrée par ce méli-mêlo.

Les Verts ont, de leur côté, été victimes de cette incapacité à surmonter les ambiguïtés de la gauche (lesquelles se réfléchissaient en leur sein). Les écolos dits « environnementalistes », ne faisant pas du rapport droite-gauche, un schisme structurant, sont soit restés dans leur « ni droite-ni gauche » (comme Antoine Waechter) soit passés au Parti démocrate, (où certains ont rejoint François Bayrou, comme Corine Lepage et Jean-Luc Benhamias). Les écolos nostalgiques de la gauche plurielle, convaincus que rien n’est possible sans une entente étroite avec le PS, même au terme de débats serrés, ont encore la maîtrise de ce qui reste de l’appareil des Verts et se retrouvent autour de Dominique Voynet, de Noël Mamère, voire d’Yves Cochet. Enfin, les écolos altermondialistes ou "alterékolos", qui ont soutenu José Bové, se regroupent autant à l’extérieur qu’à l’intérieur des Verts, dans les associations, et se caractérisent par leur refus de rendre l’écologie soluble dans le social-libéralisme comme dans le libéralisme.

Reconstituer la gauche ou les Verts revient donc finalement au même. Il s’agit de savoir si s’ouvre le temps (ou un temps) pendant lequel prime « l’union de toutes les bonnes volontés de droite comme de gauche », vues les urgences écologistes -première hypothèse- ? Ou bien il s'agit de savoir si s’est ouvert le temps d’une acceptation de la bipolarisation politique, en France : droite modérée contre gauche modérée, incluant chacune une dimension écologiste, dans un contexte institutionnel pour longtemps encore présidentiel -seconde hypothèse-. Ou bien il s'agit de savoir, enfin, si les temps qui s’annoncent sont, au contraire, des temps de transformation sociale majeurs, où la radicalité des choix, sous l’influence des contraintes écologistes, ne peut qu’engendrer des conflits politiques importants entre ceux qui supportent et ceux qui ne supportent plus les écarts des conditions de vie d’un bout à l’autre de la planète, -troisième hypothèse-.

Sous cet éclairage, on doit envisager comme probable l’éclatement d’une gauche de plus en plus disparate. Ni unie, ni plurielle, ni durable, la gauche est faite, actuellement, de gauches incompatibles. En dépit de leurs accords multiples sur le fond des dossiers, les Verts, pris dans ce maelström, ne peuvent, à leur tour, que se distinguer ou se séparer les uns des autres, leurs divergences, stratégiques autant que tactiques, étant insurmontables.

Pour ma part, considérant qu’être, ou ne pas être, membre d’un parti politique, n'a plus rien d'’essentiel je me positionne, aisément, sans m'inscrire dans des conflictualités boutiquières inutiles, parmi les altermondialistes. Ma rupture avec la gauche de gouvernement et les Verts, du moins tels qu’ils fonctionnent actuellement, est donc, cette fois, devenue inéluctable. Il ne m'est pas possible de savoir quand et comment, mais je sais déjà qu'il me sera donné de m'impliquer dans un nouvel ailleurs politique.

mardi 5 juin 2007

La radicalité et la peur.

Un ami m'adresse un courriel et y conteste l'usage du mot radical en politique qui ferait peur aux citoyens.
Je tiens à ce vocable : "radical".
Sous les mots, il y a des définitions.
En l'occurence, sous le mot radical, il y a la définition même de la politique.
Du reste, il convient de restituer, au mot "radical", son sens qu'avaient avachi les partis politiques pseudo-radicaux ("de gauche" ou valoisien).
Le radical s'enfonce dans le terreau de la vie.
D'aucuns prétendent donc que la radicalité fait fuir l'électeur, car elle lui fait peur!
C'est la confondre avec l'extrémisme!
Fait-elle peur, vraiment? Pas à tous les citoyens, tant s'en faut.
Faut-il du reste ne pas faire peur?
La vérité, -pas celle qu'on croit détenir, celle qu'on approche-, fait utilement peur.
Ce qu'on découvre sous les propos haineux d'un Fillon en meeting, hier, fait tout à fait peur.
La réalité très inquiétante de la planète, avec ses conflits multipliés et ses menaces climatiques, fait plus que peur. Elle angoisse.
Impossible de nourrir sa conscience politique et de mener une action politique sans avoir peur.
Car ouvrir les yeux ou faire ouvrir les yeux enclenche une peur, souvent salutaire.
J'entends dire que l'avant-garde ferait moins peur que la radicalité!
Des avant-garde, je sais qu'elles sont, le plus souvent, décimées.
Avant-garde est un concept militaire, comme militant ou campagne (électorale).
Ce sont des mots de la guerre.
Certes, les avant-garde explorent utilement le terrain avant que ne s'avance le gros de la troupe, et ceux qui les constituent vivent, courageusement, mais... dans la peur.
L'avant-garde "vient avant ou devant".
Elle est faite de sacrifiés.
Je veux bien accepter le concept d'avant-garde car il faut qu'il y ait des hommes véritables qui osent s'avancer les premiers sur des territoires mal connus, mais la radicalité m'apparaît plus exigeante encore.
Elle touche au cœur, à la racine, à l'essentiel.
Elle prétend possible un autre monde. Elle rend féconde l'utopie.
Face à la radicalité de la droite qu'expriment, sans peur, Sarkozy et consorts, faudrait-il se retenir de dire, notamment, la radicalité de l'écologie politique, parce qu'elle fait peur?
Selon moi, ce qui fait le plus peur, une peur délétère cette fois, c'est la résignation, l'abandon, l'abdication citoyenne, bref le renoncement à la radicalité.

dimanche 3 juin 2007

De l'utilité d'une purge politique

Qu'ils forment ou déforment l'opinion des électeurs, peu importe, l'évidence est que les médias apportent les éléments de la réflexion collective.

Et que nous disent actuellement les médias? Que tout réussit à Nicolas Sarkozy. Que la présidentialisation accentuée de la vie politique française est acquise. Que le Parlement qui va sortir des urnes, le 17 juin, sera aux ordres du Président, l'opposition y étant laminée. Que Ségolène Royal s'est introduite dans la robe du possible président à venir sans complexe, c'est-à-dire en acceptant définitivement la bipolarisation. Que même réduit à la portion congrue, le parti socialiste restera le seul à pouvoir ambitionner un accès au pouvoir dans la décennie à venir. Que tous ceux qui ont été des condamnés, des mal aimés, des chassés peuvent revenir en force : de Gérard Longuet en Lorraine jusqu'à Alain Carignon à Grenoble, sans oublier Alain Juppé à Bordeaux.

Les Français seraient-ils devenus sourds et aveugles? Est-ce un mauvais rêve? Mais surtout qu'est-ce qui a rendu inintelligents les chercheurs en politique qui ont toujours réponse à tout et qui, en fin de compte, n'expliquent rien.

Car que nous disent les doctes possesseurs de vérité dont la gauche est emplie?
Que les institutions et les lois électorales déterminent cette évolution inéluctable vers l'élimination des oppositions politiquement incorrectes?
Mais alors, pourquoi n'a-t-on pas fait de la sortie de ce piège la priorité absolue?
Que celui qui détient le pouvoir de l'argent et de la presse ne peut qu'accéder au pouvoir central.
Mais alors, pourquoi n'a-t-on pas davantage dénoncé ce lien entre l'économique et le politique?
Que la modernisation de la gauche française n'ayant pas été faite, elle n'était plus crédible pour convaincre les citoyens.
Mais alors, pourquoi la même gauche a-t-elle remporté massivement, les dernières élections régionales et cantonales?

On peut longtemps, ainsi, aligner les contradictions. La réalité est telle : ou bien l'opinion est entièrement malléable et la démocratie n'est plus qu'un jeu d'apparences, ou bien l'opinion, en s'exprimant à un moment t de l'histoire, reflète bien l'état du pays, -les médias n'ayant pu, en 2005, inverser la réponse des Français au référendum-, et ce sont les erreurs, les insuffisances, les contradictions des gauches qui ont été sanctionnées.

La situation ne s'analyse sans doute pas de façon aussi carrée. Oui, les lois électorales aggravent la punition. Oui, les médias limitent la capacité d'expression des opposants. Oui, entre les forces des tenants de l'économie triomphante et les forces des acteurs politiques des citoyens dominés, il y a disproportion. Oui, les prêches néo marxistes et les références au seul passé diminuent l'impact de la parole politique, à gauche.

Cependant, ce qui est cause d'échec, c'est, à la fois, l'absence de projet politique d'avenir (le manque d'utopie créatrice) et la juxtaposition de préconisations incompatibles ( selon qu'on pense en terme de parti de gouvernement ou en terme de mouvement de transformation sociale).

Entre les partis de la gauche traditionnelle, (PS, PRG ou MDC) et les formations politiques dites d'extrême gauche (LO, PT, LCR : eux-mêmes inconciliables), il n' y a guère de voie de passage. Quant aux partis communistes et Vert, coincés dans l'entre deux, voulant participer aux gouvernements et ne pas être confondus avec un PS contesté, ils devront soit disparaître s'ils persistent, soit se refonder pour pouvoir réapparaître.

La refondation, voilà bien le maître mot, dont on va faire mille usage dans les mois à venir. Et rien ne garantit encore que la ou plutôt les différentes refondations vont suffire à clarifier les pensées et à redonner de la crédibilité à ces gauches qui ne peuvent s'unir puisqu'elles ne visent plus les mêmes objectifs. Entre la refondation-droitisation que ne cessent d'appeler de leurs vœux Cohn-Bendit, DSK et bien d'autres, d'une part, et la refondation-antilibérale dont on nous promet les Assises à l'automne, d'autre part, il y a un abîme.

Les élections législatives vont mettre en premier plan, cruellement, par le nombre de voix autant que par le nombre de députés, le vide de la représentation de ceux qui s'essoufflent encore à crier leurs convictions de moins en moins écoutés. Le Parti communiste pourrait bien, pour la première fois, ne plus avoir de groupe parlementaire. Les Verts n'en auront toujours pas. Aucun des partis qui ont multiplié les candidatures pour grapiller les euros ne comptera un seul député et si une exception surgissait, elle ferait spectacle et pas événement. Quant au PS, il va subir le contre choc de ses divisions internes : largement diminué dans sa représentation parlementaire, il va entrer dans la phase cruciale, celle où l'on se déchire jusqu'à se séparer, à moins que ce ne soit jusqu'à se déjuger afin de sauver les apparences.

Fallait-il passer par ce désastre pour refonder non pas tel ou tel parti mais tout simplement la politique? Car, là où nous sommes tous, citoyens, responsables et coupables de l'échec historique qui nous traumatise tous, c'est que nous n'avons pas, à temps, repensé la politique. Nous restons intellectuellement prisonniers de vocables usés. D'une telles déconvenues, on ne peut sortir que par le haut. On ne peut, en effet, chuter plus bas. Tout se passe comme si, -et j'avoue que c'est une lecture optimiste des événements-, les électeurs avaient passé un impitoyable coup de torchon sur tout ce qui interdit la résurgence de la pensée politique dans ce qui fut la gauche.

La démocratie n'est pas ce qu'on en a cru. La gauche l'a pensée comme étant la chance de faire triompher le nombre sur le chiffre, le nombre des travailleurs sur le chiffre d'affaires. Il semblait inéluctable que la masse des petits finisse par l'emporter sur les "deux-cents familles" ou la minorité des possédants. La Révolution française n'avait-elle pas balayé la noblesse installée aux commandes du royaume? La révolution sociale donnerait le pouvoir à la classe ouvrière. On sait ce qu'il en advint. Si, à présent, les citoyens-travailleurs ne détiennent plus la clé de l'avenir, c'est que le travail est plus que la production, le travailleur plus que le salarié, et, la-dessus, le candidat Sarrkozy avec son "travailler plus pour gagner plus" va être contredit par le président Sarkozy. Le réel n'est manipulable que durant des périodes brèves.

Je retrouve, peu à peu, quelques raisons de me redynamiser. J'aurai vécu ce drame électoral, -pour moi, c'en est un- comme une violente purge politique. Sans elle, sans doute, jamais nous n'aurions osé dire et faire ce que nous allons pouvoir, à présent, dire et faire. Le temps politique ne connaît pas de hâte ( et là encore Sarkozy pourrait bien chuter). Par chance, l'écologie politique aura été embarquée dans cette obligation de la refondation; elle aussi a subi la purge. Et comme elle recèle les possibilités de réanimer la pensée antiproductiviste et anticapitaliste, je ne doute pas qu'elle émerge enfin mais il lui faudra autre chose que la résurrection d'un parti. La démocratie ne peut plus que se vivre et penser ailleurs qu'au sein des partis dont le modèle est cassé. La généralisation de la politique qu'annonce l'énorme participation électorale, ne doit pas nous donner à croire que tout est joué avec une plusieurs élections. La politique par intermittence s'achève. Si nous restions enfermés dans les pratiques politiques déjà connues, nous pourrions désespérer. J'ai, en ce jour, la conviction que le temps de la politique "classique" est révolue. Nous allons entrer dans une période faste (et dangereuse) où rien ne sera plus acquis pour quelque pouvoir que ce soit.

dimanche 27 mai 2007

Exil et résistance

Après ces surprenantes et brutales élections présidentielles, de mai 2007, nul ne sait plus, en France, dans ce qu’on appelait la gauche, où se situer.

Nous voici astreints à l’exil et à la résistance.
Mais qui se sent en exil est-il encore capable de résistance?
Car l’exil est interne, et la résistance devra faire face à une légitimité !
Français d’une France qui est minoritaire, nous nous retrouvons mis à l’écart.
Vaincus à la régulière, nous voici, et peut-être pour longtemps, dépendants des décisions d’un monarque républicain, un président dont tout dépend !

Confiance, défiance, méfiance sont les sentiments contradictoires que se partagent ces exilés temporaires ou permanents que nous allons devenir.

Confiance tout de même, pour ceux qui pensent encore qu’au milieu de ces échecs demeurent des gisements de possibilités et qui se tiennent prêts à exploiter le peu de décisions du nouveau pouvoir qui seront compatibles avec leur regard sur le monde.

Défiance et vigilance, pour ceux qui restent à jamais sur leurs gardes, mais qui ne veulent pas vivre, en repli, leur temps d’action durant cinq ou dix années.

Méfiance permanente, pour ceux -et j’en suis- qui, sans renoncer à engranger des succès et sans abandonner les luttes, ne se forgent pas d’illusions et n’attendent rien d’un pouvoir national qui, en dépit de ses habilités ou de ses concessions, ne visera toujours que la satisfaction maximale d’élites impitoyables aux petits.

Je ne peux faire partie de cette France qui a succombé aux charmes et aux mensonges de professionnels de la politique. Exil, donc.

Je ne peux, toutefois, me résigner à subir les conséquences d’un scrutin dont je sais, par avance, les effets qu’il vont produire et notamment sur les plus pauvres. Résistance, aussi.

Rester en ce pays sans en être. Résister sans fuir. Cela conduit tout droit à la désobéissance civile.

Être dissident sans être délinquant. Se déclarer irrespectueux des lois qui violent le droit. Faire passer la légitimité avant la légalité. Faire prévaloir la responsabilité avant la discipline. Cette attitude de rupture n’est pas sans risque mais le pire des risques serait dans la soumission, la résignation, le renoncement.

Il faut se préparer à lutter. D’abord, contre la banalisation d’une situation où, au nom d’une pseudo démocratie, vont se vautrer les profiteurs et les pleutres. Ensuite, contre les aveuglements des négateurs de la radicalité. Enfin contre les violents que ne comptent que sur le court terme. Avec, en outre, pour moi, -que faire d’autre ?-, l’obligation d’effectuer un travail de plume efficace. C’est un challenge qui me déborde mais je n’ai pas le choix.

vendredi 25 mai 2007

Vers une nouvelle radicalité politique

Gauche, extrême gauche, gauche de gauche, ces appellations contiennent, à présent, une part d’ambiguïté qui rend impossible la prise en compte, par l’opinion publique, des contenus politiques qu’elles recouvrent.

Si gauche ne signifie que... ce qui n’est pas à droite, ce n’est plus qu’une négativité sans avenir.

Si extrême gauche signifie refus du capitalisme, sans proposition d’une véritable alternative crédible, ce n’est plus qu’une forme de contestation qui garde sa place dans le champ des luttes sociales, mais qui ne pèse plus guère sur les décisions politiques.

Si gauche de gauche signifie gauche antilibérale (sous entendu : le reste de la gauche ne l’est pas), nous retombons dans la seule négativité, (et de la droite et du capitalisme et du social-libéralisme). Et nous faisons du sur place.

Du rabachage de Lutte ouvrière, au doctrinarisme du Parti des travailleurs, et jusqu’au néo-léninisme subtil de la LCR, il n’y a, à la vérité, que des nostalgies politiques qui s’expriment, des vieilleries!

Du Parti communiste aux Verts, il n’y a que la tentative de garder, ou de trouver, une assise parlementaire, quitte à la devoir au Parti dominant qui les étouffe. Du coup, leur message spécifique devient illisible.

Du réalisme des tendances centristes jusqu’à la fidélité aux idéaux de Jaurès et de Blum, il y a place, au sein du parti socialiste, pour plusieurs partis politiques! Entre la résignation idéologique de ceux qui veulent d’abord gouverner (et on verra après...), et l’entêtement idéologique de ceux qui pensent toujours possible le retour à l’État providence, il y a un gouffre, (par dessus lequel les électeurs socialistes hésitent à sauter!).

La victoire de Nicolas Sarkozy (et c’est bien difficile à admettre!) a l’avantage d’obliger à affronter toutes ces contradictions.

Il ne suffit plus de condamner le PS qui trahit où l’extrème gauche antitoutiste, il faut indiquer les voies non encore parcourues qui peuvent être empruntées avec de bonnes raisons d’espérer qu’elles ne mênent ni à des impasses ni à des catastrophes économiques et sociales.

Le mot gauche est impossible à abandonner pour le moment parce que nous ne sommes pas capables de penser la non-gauche sans risque de récupération par une droite qui s’assume.

Et pourtant, la non-droite, qui n’est pas la gauche traditionnelle, extrême ou pas, devient un réel politique pensable. La droite, en dépit des apparences actuelles, est blessée à mort et il serait plus que dangereux de se définir seulement par rapport à elle. La production conduite par le seul profit est sans avenir. Le temps de la décroissance a commencé, (comprendre le mot non comme une non croissance mais comme une croissance frugale qui tienne exactement compte des ressources existantes au lieu de les brader).

Évidemment les esprits conservateurs, de gauche comme de droite, qui n’ont comme autres repères que les conflits du capital et du travail des siècles passés, sont mal préparés à comprendre que de nouvelles formes de luttes de classes ou d’intérêts sociaux sont apparues et que les luttes de pouvoir ne se situent plus exactement, ou seulement, dans des cadres nationaux.

La radicalité (je n’ai jusqu’à présent pas trouvé d’autres vocable pour me faire comprendre) est un vocable qui n’apparaît pas encore dans le dictionnaire Robert. Au mot radical, il emprunte l’enracinement dans l’histoire, mais il ne se retrouve pas dans l’histoire politique en France, celle des Radicaux qui sont tout sauf définitifs dans leur positionnement politique.

La "radicalité radicale" marque un virage complet, un renoncement total, par rapport à l’existant. Elle est révolutionnaire au sens où l’inversion de la perspective est révolutionnaire comme l’est, étymologiquement, tout retournement. Elle ne vise pas, pour autant, à la prise du pouvoir par la lutte armée, ne fut-ce parce que de tels bouleversements ne sont pas durables et n’atteignent pas l’objectif visé : la dépossession de ceux qui confisquent la richesse à partager entre tous. Changer de maître, expliquait Sartre, ne supprime pas l’esclavage.

La gauche historique a tenté de mener une politique populaire en empruntant trois voies qui se sont avérées être soit inefficaces soient monstrueuses.

La pire a été, des décennies durant, la dictature du parti déguisée en dictature du prolétariat, le collectivisme camouflé en communisme, l’anticapitalisme revendiqué par un capitalisme d’État. Nous n’avons pas fini de payer le prix de cette erreur géante qui a pris fin en 1989, deux cens ans exactement après la révolution française!

La plus ambigüe aura été celle qui a recherché dans le pouvoir d’État et l’instauration de lois justes, les moyens de s’opposer au règne de l’argent, à la domination du capital, à la prééminence de l’économique. L’État-providence, de la Suède jusqu’à la France du Front populaire et de l’après guerre, a dû composer avec les forces qui le circonvenaient, puis a dû céder sous l’effet de la crise énergétique ayant mis fin aux “Trente glorieuses”. La sécurité sociale, comme symbole de la garantie à vie de conditions d’existence décentes, pour tous, s’effondre sous le poids du vieillissement de nos populations, de la démographie mondiale, et surtout de la fragilisation mondiale des nations dont l’interdépendance interdit le maintien d’aires géographiques protégées. Le capitalisme s’est engouffré dans cette béance et s’y installe.

La plus pragmatique mais aussi la plus cynique, la troisième voie, ni dictatoriale, ni étatiste, aura consisté à tenir-le-pouvoir-pour-limiter-les-dégats! Dès qu’il est apparut à François Mitterrand que le pouvoir présidentiel lui même, si fort soit-il, ne permettait pas de conduire, en France, une politique économique différente de celle qui l’emportait en Europe sous l’influence des États-Unis, il a pris le parti de faire une politique d’apparence socialiste et discrétement libérale. Il y fallait un talent fou. Mitterrrand n’en manquait pas; Schroeder non plus; Blair fut l’égal de Thatcher, le bon soldat de Bush mais a séduit jusqu’au bout. Il a prouvé qu’un parti de gauche pouvait faire une politique de droite et être crédible.

Trois voies historiques essayées. Trois échecs. Ou bien la gauche se taille un autre chemin ou bien elle s’épuisera et disparaitra progressivement; mais comme les victimes de l’économie libérales sont, elles, bien vivantes, il va surgir des éléments nouveaux qui vont modifier les pratiques politiques.

J’en vois trois, actuellement, et j’y reviendrai. Qu’il me suffise de les citer :
- la révolution démographique qui n’est ps que numérique et qui est liée à la révolution des âges.
- la révolution technologique qui permet au plus grand nombre d’être informé et acteur.
- la révolution écologique qui résulte de la finitude de la planète et d’une partie de ses ressources.

Toute pensée politique qui ne s’inscrirait pas à l’intérieur de cette triple problématique révolutionnaire est condamnée à rester sans prise sur le réel.

dimanche 20 mai 2007

Je suis un Rrom

Je sais où je vais.
Ma voie est tracée.
Sur mon chemin de vie,
j'ai fait mon choix.

Mon chemin est vert.
J'ai opté pour l'écologie.
J'ai pris parti.
Mais reste libre.

Aucun parti ne contient
ma prise de parti.
Je suis homme de mouvement,
pas de parti pris.

Il n'est d'écologie
qu'à gauche.
Il n'est de gauche
qu'écologique.

Pas n'importe quelle gauche.
Pas n'importe quelle écologie.
La gauche mal à droite.
L'écologie de l'écosophe.

Je marche vers.
Je ne marche pas Vert.
Je marche à gauche,
sans me retourner.

Qui, à gauche, se retourne,
se retrouve à droite.
Il revient en arrière,
et perd son chemin.

Ma voie est tracée.
Nul ne me l'a tracée.
Je l'ai longuement tracée.
En la suivant, je me suis.

Les repères sont fugitifs.
Quand la gauche n'est plus à gauche,
on n'est jamais tout à fait là
où l'on croit être.

Je me perdrais si...,
Si je ne restais qu'à gauche.
Et plus encore si...,
Si je me glissais à droite.

Il y a pire que de s'égarer,
c'est de rester immobile.
Qui ne bouge
est à jamais perdu.

La droite garde toujours la main.
Les gauchers sont des artistes.
La droite se pense et veut légitime.
Par nature! Mais quelle nature?

Je suis d'une gauche autre,
celle qui est et n'existe pas.
La gauche radicale
Des innombrables sans.

Celle des privés de tout,
mes alter égo,
mes semblables,
mes frères.

La gauche est morte.
Vive la gauche.
Vive la gauche utopique.
Celle qui ne se résigne jamais.

Cette gauche qui est d'ailleurs.
Celle qu'on ne voit nulle part.
La gauche qui est la droite de ce Dieu
qui renverse les puissants de leur trône.

J'aime la gauche incompatible.
Celle qui vide les églises.
Pour mettre le peuple là où est sa place,
dans la rue.

Car c'est la rue qui dirige
même si elle ne gouverne pas.
Qui gouverne tient le gouvernail.
Qui dirige tient le compas.

La gauche qui marche se dirige.
Elle se dirige vers son objectif,
Une utopie perpétuellement visée.
Jamais atteinte et toujours là.

La gauche qui sort et rit,
qui est dehors,
qui marche et chante,
la seule à même de tout changer.

Être mal à droite
n'est pas être malhabile
c'est n'être jamais à sa place
au milieu des nantis.

Être écosophe
c'est être hospitalier,
citoyen du monde,
haï.

Car celui qui veut que dure
l'injustice dont il profite
est un prédateur
d'une cruauté inouïe.

J'ai tracé ma voie.
Celle d'un cosmopolite.
Pour qui tout homme en vaut un autre.
Je suis un homme, je suis un Rrom.

La vérité n'est ni blanche ni noire

Je ne suis ni Blanc ni Noir.
Je suis homme.
Et pourtant, je suis blanc.
Ainsi l'a voulu mon histoire, de vie.

Je ne suis ni à droite ni à gauche.
Je suis un animal social.
Et pourtant, je suis à gauche.
Ainsi l'a voulu mon histoire, politique.

La vérité n'est ni blanche ni noire,
Ni grise.
La vérité n'est ni à droite ni à gauche
Ni au centre.

Elle est. Réelle.
Inapprochable.
Mais visible.
Elle est utopie. Réelle.

Non à l'Europe à la française

Curieux paradoxe.
La France qui n'a pas voulu d'une Europe au libéralisme constitutionnellement affiché, la France qui a dit non, est devenue la France qui dit oui à un autocrate.
Ce pourrait n'être qu'un épisode passager de la vie politique nationale qui ne concerne donc que la France. Il n'en est rien. Et, ce matin, la preuve en vient de l'autre bout de l'Europe, dans un pays francophile : la Roumanie.
Le conflit entre le Parlement roumain et le Président de la République roumaine s'est soldé par la victoire nette du Président à l'occasion d'un référendum portant sur la destitution éventuelle de M. Traian Basescu. On pourrait d'en tenir là. Moins de 50% des électeurs ont voté. Il reste un peu plus de deux ans au Président pour terminer son mandat. Mais, bien entendu, il va falloir trancher un conflit de pouvoir et le Président, réinstallé dans sa fonction, envisage de proposer une modification de la Constitution qui lui confèrerait un rôle et une autorité... à la française.
C'est dire que, dans une partie de l'Union européenne (et même à ses marges, en Russie, pays qui ne peut être totalement pensé comme non européen!), on considère qu'une démocratie efficace, et protégée de l'anarchie politique, est une démocratie monarchique, avec un chef, et un seul.
Dans un autre pays de l'Est de l'Europe, la même tentation autoritaire se manifeste d'une façon autant comique que symbolique : en Pologne, le Président et le Chef du gouvernement sont des clones, de vrais jumeaux, et ils ont gagné les élections, sans coup férir, si bien que le conservatisme le plus virulent s'est équipé d'outils modernes de direction de l'un des plus vastes et plus peuplés états de l'Union!
Partout, la démocratie piétine, est bousculée et trébuche. Les élus voient leurs responsabilités réduites à un rôle de faire-valoir du Leader. C'est une fonction qui, aux yeux des intéressés, n'a pas que des désavantages mais ce n'est plus une fonction de contrôle du pouvoir. On ne s'oppose pas au soleil; on ne peut que s'en approcher pour s'y réchauffer. Le Soleil : ce fut en France, le symbole de la monarchie absolue. On la croyait à jamais expulsée de notre champ de conscience politique. Il n'en est rien. Un Président peut vouloir devenir un Roi alors même que des rois, toujours en place, symboles honorifiques de leur pays, ont totalement renoncé à gouverner.
Il est avancé, dans les médias que la condition requise pour bénéficier du label de "majorité présidentielle" lors des prochaines élections législatives, serait, notamment pour les députés sortants, ayant été membres de l'UDF, l'engagement de ne jamais voter la censure! N'est-ce pas revenir avant... 1789?
Le conflit politique entre les partisans de la démocratie de type parlementaire et les partisans de la démocratie de type présidentiel est engagé.
Bien entendu, l'exemple américain pèse sur cette image douteuse de la démocratie efficace. Cependant, et quoi qu'on pense, par ailleurs de la politique étatsunienne, il y a des contre-pouvoirs forts outre Atlantique, et s'il leur est souvent difficile de s'exprimer, quand ils y parviennent, ils sont très influents, tant par la presse qu'au Parlement, comme il apparaît, actuellement, dans cette période de fin de règne que traverse George W. Bush.
Avec le système institutionnel français, hérité du gaullisme, il n'en est pas ainsi. Le Parlement (mais mérite-t-il encore une majuscule?) est une composante du pouvoir quasi mécaniquement déduite de la victoire électorale du Président. Il en fut ainsi en 1965, 1969 et 1974, sans surprise et, en 1981, la gauche socialiste crut, avec François Mitterrand, le seul président de gauche, avoir trouvé la martingale permettant à une formation minoritaire de garder, à coup sûr et durablement le pouvoir. On connait la suite : la gauche dite socialiste, de compromis en compromis, cessa d'être elle-même. En 1995 et 2002, elle connut des défaites cinglantes, aggravées par un dispositif constitutionnel voulu par un Lionel Jospin, certain de sa victoire face à un Chirac affaibli, et rêvant de parfaire le système mitterrandien : faire gagner la gauche dans la foulée des Présidentielles en instituant, après l'alternance, la concomitance! La même majorité toujours, en même temps, à l'Élysée et au Palais Bourbon (quel qualificatif royal pour le site d'une Assemblée nationale), tel était l'objectif. Le premier bénéficiaire de cette bévue géante se nommera : Sarkozy.
Quel homme politique de grande ambition n'envierait ce système politique à la française encore plus centralisé, plus autocratique qu'aux États-Unis mêmes! En Afrique, notamment francophone, l'un des avatars les plus pernicieux de la postcolonisation, aura été le calque du modèle politique français, appris dans les Universités françaises, et ayant conduit à ce que l'on désigne par le mot péjoratif de Franceafrique (qui ne signifie rien d'autre que domination néocoloniale maintenue, sous une forme indirecte et secrète). Le culte de la personnalité, qu'on a tant reproché aux chefs d'État-chefs de partis, au temps de l'URSS, loin de tomber en désuétude, est devenu un art de gouverner, une simple conséquence médiatique de la démocratie efficace et forte dont on loue la nécessité, en ces temps périlleux.
Si l'Europe succombe à cette tentation, elle connaitra deux nouveaux périls : ou bien l'impossibilité de poursuivre son autocréation politique, en juxtaposant des nations revigorées et limitant à la sphère économique, leur coopération, autant que faire se peut; ou bien, au contraire, et plus tard, la progressive présidentialisation de l'Europe tout entière, par la survenue d'un personnalité d'exception, ayant profité des faiblesses momentanées des États-nations.
Dire non à l'Europe à la française , c'est dire oui à l'Europe tout court.
Ou bien les institutions européennes, ce que ne prévoyait pas le projet de traité de 2005, inciteront à une généralisation de la démocratie parlementaire améliorable (on ne peut dire que le système électoral à l'anglaise soit exportable; lui aussi focalise le pouvoir au lieu de la répartir) ou bien l'Europe deviendra l'espace mondial où s'exprimera, une fois de plus, comme par le passé, des formes cruelles d'autoritarisme politique. L'ambition d' il y a un demi-siècle : éviter le retour de conflits épouvantables en Europe ne pourrait alors être maintenue.

samedi 19 mai 2007

L'illusionniste

Nicolas Sarkozy sidère l'opinion publique.
Il est partout.
Il parle de tout.
Il capte tout.
Voilà un homme d'action!
Il court.
Il court, au Bois de Boulogne comme aux six coins de l'hexagone,
si ce n'est pas à Berlin...
Et ses ministres courent, derrière.
Dans l'immédiat, il leur faut gagner largement les élections législatives.
Et il faut donc rassurer.
Mais tout est illusion.

Fillon est un homme d'action (et, dès cet été, les récidivistes ou les délinquants de moins de 18 ans vont s'en apercevoir).
Juppé, ex nouveau député-maire de Bordeaux, est relooké véritable écologiste (mais toujours pro-nucléaire).
Kouchner se voit enfin, oui enfin, reconnu (ce n'est pas lui qui aurait lâché les USA en Irak!).
Une vraie "beurette", Rachida Dati, est garde des Sceaux et rejoint, dès sa nomination, la prison (mais du bon côté des barreaux!).
Le boutefeu Hortefeux, ministre de l'immigration et de l'identité nationale, va sauver la France, qu'on lui a dit noyée sous les flux migratoires.
Avec Mme Bachelot, nous aurons meilleure santé? Cela s'obtient grâce à la Jeunesse,...et au sport. Vive le footing.
Etc.
Car tout est faux symbole et illusion.

Face à cet éblouissant jeu de miroirs, que font les vaincus?
Par quel bout vont-ils prendre ce feu follet qui séduit et qui s'agite, insaisissable?
Que dire pour convaincre que tout ce clinquant n'est qu'apparence?
Que penser de neuf? Où aller à présent?
La gauche n'était-elle donc qu'un désert, traversé par des hommes égarés?
Ceux, et celle-là en particulier, qui parlaient d'autorité hier, auront vite cessé de parler haut...
Et de faire illusion.

Sachons, en effet, que ne fait pas illusion qui veut.
Il y faut des images et des mots.
Il y faut des médias complaisants ou soumis.
Il faut ne pas laisser, à son adversaire, le temps de la réflexion.
Il faut avoir longuement préparé son coup.
On peut tromper tout le peuple une partie du temps,
une partie du peuple tout le temps
mais pas tout le peuple tout le temps
disait Abraham Lincoln.
Eh oui, les illusionnistes n'ont qu'un temps...

Car chassez le naturel -disons le réel-, il revient au galop:
Le triomphe des nantis va vite se trouver mis à l'épreuve
de la situation démographique, énergétique et sociale.
Laisser croire que ceux qui ne sont pas riches ne doivent s'en prendre qu'à eux-mêmes,
que le contrôle des médiocres et des délinquants, mal dotés par la nature, nous protégera tous,
que le pouvoir de l'État consiste à ne laisser d'autre pouvoir à l'État que celui de la force de son bras armé au service des riches,
qu'il suffit d'accepter le concept de développement durable pour rendre compatible la nature et le capital,
tout cela, et le reste, ne vont pas résister longtemps à la déferlante des problèmes de la vie pour-de-vrai.
Et donc tout n'aura été qu'illusions.

Mais que les résistants à ce matraquage politico-publicitaire
ne se fassent pas eux-mêmes d'illusion :
face à cet artiste qu'est le chef d'orchestre Sarkozy,
il va falloir changer de partition.
Ce qui a le parfum, le goût, l'apparence, de la gauche
et n'est pas la gauche,
n'est plus disponible.
Sarkozy a osé le voler,
y compris en s'emparant de la figure du jeune communiste résistant fusillé, Guy Moquet,
pour en faire un élément de son décor politique.
Du très grand art, celui du prestidigitateur, mais un art du vide.
L'art du brillant et trompeur illusionniste.

Un autre temps s'est bel et bien ouvert.
Une autre génération, plus jeune,
sans peur et totalement sans vergogne, est à l'œuvre.
Elle veut habilement, et de toute urgence, nous donner à croire que le passé c'est l'avenir.
Illusion des illusions.
Tout n'est qu'illusion, vous dis-je.

jeudi 17 mai 2007

La mort de la démocratie

C'est au moment même où l'Université me décerne le diplôme de docteur en philosophie que toutes mes certitudes vacillent.
L'affirmation de Jacques Derrida selon laquelle La démocratie est un processus inachevé me semble avoir cessé d'être pertinente.
Il y avait à cela une premier obstacle, qu'avait signalé Noam Chomsky : C'est un truisme, mais un truisme sur lequel il faut constamment insister, capitalisme et démocratie sont, en fin de compte, totalement incompatibles (1). Et pourtant, dans le monde entier, et progressivement depuis 1989, le système économique libéral est étroitement associé au système politique démocratique.
Il y aura, à présent, en France, un second obstacle : la validité indubitable d'un scrutin présidentiel qui a confié à un autocrate les destinées du pays.

C'est avec stupeur, effroi mais non sans admiration que j'ai entendu les premiers propos du nouveau Président, Nicolas Sarkozy, lors de son intronisation. En quelques phrases, l'homme s'est emparé, sous nos yeux, de la volonté populaire. Le représentant du peuple s'est, d'un coup, substitué au peuple. Il y était prêt. Il l'a fait avec une grande habileté. Qui ne se retrouverait dans la plupart des phrases prononcées? Tout ce qui va suivre, à commencer par les élections législatives, ne sera donc qu'une suite de conséquences de cette élection structurante.

Mais face à ce coup de force légal, personne ne se dresse et parle. Aucune autorité n'est capable de s'élever contre l'imposture. Nous sommes subjugués par l'audace, l'énergie, l'autorité de ce personnage sous le règne duquel nous allons devoir vivre. Qui du reste protesterait? L'opposition est en ruines pour n'avoir su se définir elle-même face à un redoutable acteur politique qui s'est avancé, sans peur, comme porte-parole d'une droite décomplexée. Les "serviteurs de l'État", tous ceux dont l'avenir et le confort dépendent de leur soumission, ont fait ce qu'il fallait pour que la passation de pouvoir s'effectue dans les meilleures formes possibles.La messe est dite.

"La démocratie, dit encore Chomsky, est dans une large mesure, une imposture lorsque le système industriel est contrôlé par une forme quelconque d'élite autocratique, qu'il s'agisse de propriétaires, de gestionnaires, de technocrates, d'un parti d'avant garde, d'une bureaucratie d'État ou de tout ce que vous voulez (2).

Toutes ces formes de dépossession des citoyens de leur pouvoir politique sont convoquées par le nouvel Élu. Cet homme se trouve au carrefour d'événements, de mouvances politiques, de lourds et lents processus médiatiques qui lui permettent de faire fructifier son savoir faire. Le voici adoubé.

Avant que le peuple ne s'éveille et découvre qu'il vit un cauchemar, il va se passer du temps. Sauf incident imprévisible ou événements internationaux graves, Nicolas Sarkozy va connaître une longue période d'affirmation de sa personnalité autoritaire. Il sera sur tous les fronts. Il va casser les repères, s'entourer de zélateurs aux ordres, d'où qu'ils viennent, se constituer une cour de personnages influents et puissants. La démocratie n'a rien à faire la-dedans.

Sauf que se trouve brutalement reposée la question de la pertinence du vote majoritaire dans les institutions de la République française. Un système politique dont on ne peut sortir, qu'on ne peut changer est un système pervers. Nous étions au bord de la VIe République. Nous revoici plongé dans une présidentialisation plus accentuée que jamais. Les modestes seront bientôt flattés pour mieux détourner leur vote; mais il n'auront jamais plus la parole.

Ce qui est grave en la circonstance, ce n'est pas qu'
un leader de la droite dure ait réussi à s'imposer, c'est que l'on doive douter de la possibilité de changer et les institutions et les relations entre citoyens au moyen du vote. Jamais, depuis 1965, une telle participation populaire n'avait été enregistrée à l'occasion d'un vote. Qui va oser, maintenant, en discuter la validité? Sauf à contester la légitimité du processus électoral lui-même, sauf à douter de la démocratie elle-même, c'est impossible.

Et voilà pourquoi la démocratie exige de s'interroger sur la démocratie en ses formes et ses principes. En ses formes, car l'absence de proportionnelle et la présidentialisation du régime interdisent la polyvalence politique et renvoient aux temps monarchiques; en ses principes parce que, si la démocratie est la loi du nombre, elle cesse d'être la quête d'une vérité commune, elle est une guerre que remporte un clan sur un ou plusieurs autres.

La démocratie est morte dès que la puissance de l'argent et des médias atteint la capacité de façonner l'opinion. La démocratie est morte dès que le choix des citoyens est détournable. La démocratie est morte quand les dés sont pipés et que, quel que soit l'élu, la politique reste, pour une large part, la même.

Ceux qui ne votent pas, soit parce qu'ils n'en ont pas le droit, soit parce qu'ils n'ont pas vu l'intérêt de s'inscrire, soit parce qu'il se sont abstenus, qui vivent dans le même pays, représentent une population qui serait susceptible de modifier le résultat d'un scrutin mais qui serait, tout autant, sensible au chant des sirènes médiatiques, s'ils votaient.

Nous vivons des temps de complexités. Découvrir que la démocratie est une compétition où seuls peuvent l'emporter, comme en sport désormais, les professionnels, les entraînés, les riches et les dopés oblige soit à se résigner et à tenter d'user des armes de l'adversaire, soit, au contraire, à changer totalement de perspective et à pratiquer une autre écosophie, comme disait Guattari, une autre philosophie politique. C'est la démocratie représentative qui est morte, comme est mort le sport qu'encourageait Coubertin. Il faut inventer une nouvelle démocratie populaire, n'ayant rien à voir avec ce que l'URSS nous a fait connaître, celle où le pouvoir loin de se concentrer, se partage et où les moins bien pourvus puissent se faire entendre.

Autant dire que cette démocratie nouveau style, s'il s'agit encore de démocratie, même si elle ne manque pas de références intellectuelles, ne saurait ressembler ni à ce que nous avons connu dans le passé, au XXe siècle, ni à ce que nous voyons s'installer sous nos yeux : une fausse République plus que jamais assise sur sur le pouvoir des marchés, des médias et de la force armée. L'État, qui a cessé d'être une providence dans une société de croissance, reste l'outil par lequel le peuple est placé sous la domination des élites et ceux qui veulent désétatiser l'économie se gardent bien de pousser à renoncer à aucune des fonctions régaliennes, celles que l'État royal a transmises à l'État républicain.

La démocratie est morte. Vive la démocratie. Le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ne fut jamais qu'un slogan constitutionnel. On ne l'a jamais compris que s'inscrivant dans le cadre de la représentation. Au moment où cette représentation pourraitt considérablement s'élargir et cela jusqu'à supprimer tout cumul de mandat (en attendant mieux : les partages de responsabilités tournantes dans les institutions, les entreprises, les associations de toutes natures), ne voilà-t-il pas qu'en France, au contraire, on rechute dans l'ornière du pouvoir personnel?

Dès que la démocratie cesse d'être un partage du pouvoir dans le temps et dans l'espace, elle se contredit et meurt. Un temps viendra pour la re-suciter.

______

(1) Noam Chomsky, Quel rôle pour l'État?, éd. Écosociété, Montréal, traduit de l'américain par Louis de Bellefeuille, 2005, p.32.
(2) Noam Chomsky, p. 19.

mercredi 9 mai 2007

Qui va trop vite à la soupe ne peut que se brûler!

Quelles informations nous tombent dessus, ces dernières heures?
De deux sources au moins j'apprends, à mon tour, que toutes les exigences récentes des Verts sont, d'ores et déjà, réduites en cendres.
Aucune velléité de résistance donc? Ils plient par peur de casser?
L'effet Sarko commence à se faire sentir : ce n'est plus un karcher, c'est un lance-flammes!
On veut sauver les rares meubles du feu qui embrase toute la gauche et qui enflamme donc "La Chocolaterie", le local des Verts!
Quand le feu est à la maison, il arrive, dans la panique, qu'on oublie où se trouve le point d'eau.
Mais l'eau n'est pas chez le voisin PS; elle est dans le propre jardin des écologistes, dans la rue toute proche, dans le ciel s'il pleut...
Si le CNIR, l'organe directeur des Verts, s'aplatit, s'il repasse par la case PS pour sauver trois sièges, pour moi qui venait de réadhérer, croyant avoir l'obligation morale de rejoindre ceux qui luttent encore pour la survie de l'écologie politique, ce sera bien, cette fois, la démission pure et simple, immédiate, avant les législatives, pas la non-réadhésion. On n'abandonne pas un bateau menacé de couler, sauf pour tenter de sauver sa peau s'il est déjà envoyé par le fond. Je laisserai ma cotisation à ceux qui auront à solder le passé.
Sur ces bases, -mais je veux espérer encore, une dernière fois, que ce n'est qu'un cauchemar de plus-, je vais me retirer de ce combat impossible à mener, puisque nous sommes couchés, et donc empêchés d'agir.
Ce matin, j'ai distribué, à la gare d'Éragny-Neuville, un tract Vert invitant à une conférence sur les OGM, à Vauréal. En voyant les réactions des voyageurs, (aimables, sans hostilité mais sans intérêt), je me demandais : "est-ce bien cela qu'ils attendent de nous?"
Cet après-midi, je m'interroge encore : mais que cherche-t-on encore à sauver alors qu'il n'y a plus rien à perdre?
Le sauve qui peut de quelques uns entrainerait la perte de tous.
Ayons au moins l'orgueil d'être nous-mêmes!
S'il faut disparaitre que ce soit debout!
Sommes-nous en charge de voler, piteusement, au secours d'un vaincu qui n'a besoin que de nos maigres voix, pour sa propre survie?
Voulons-nous rebondir, reconstituer, refonder, repartir, retrouver nos fondamentaux ou continuer sur la voie qui nous a marginalisés?
J'attends des informations différentes, sinon...
... dans cette hypothèse d'une alliance sans âme et sans projet, "les Verts" sont morts en tant que force politique.
Je m'écarterai, alors, définitivement, de leur cadavre.
Non sans pouvoir éviter la douleur d'un deuil qui s'annonce plus que pénible.

Archives du blog

Résistances et romanitude

Résistances et Changements

Recherche Google : rrom OR tsigane