mardi 22 juillet 2008

Triste cinquantenaire


Le présidentialisme ruine la démocratie

On est loin de la VIe République.

On n'est plus tout à fait dans la Ve République.
Nous voici installés dans un système politique pervers.
Le lundi 21 juillet 2008 est un lundi noir.
Nicolas Sarkozy l'emporte encore...

Le Parlement a approuvé, avec une seule voix d'avance, la 24e réforme de la Constitution, qui donne prétendument plus de pouvoirs au Parlement et aux citoyens et autorise le président de la République à s'exprimer devant les deux Chambres réunies.

C'est le scrutin le plus serré jamais enregistré sous la Ve République pour une réforme approuvée par voie parlementaire. Le projet a réuni 539 voix, face à 357 contre, sur 896 votes exprimés: une voix de plus que la majorité des trois cinquièmes requise (538).

Deux votes ont donc été décisifs: celui du président de l'Assemblée Bernard Accoyer (UMP) qui, contrairement à l'usage, a participé au scrutin. Et celle de Jack Lang, seul PS à avoir voté pour.

Les pressions exercées jusqu'au bout, la trahison des radicaux dits de gauche, les calculs orgueilleux de Jack Lang (qui "mériterait" bien la prochaine Présidence du Conseil Constitutionnel), le désintérêt des citoyens en cette période de vacances, et surtout l'absence de perspectives politiques alternatives expliquent ce nouveau pas en avant de Sarkozy.

La démocratie ne trouve jamais son compte dans des scrutins étriqués. Ce qui vient de se passer à Versailles n'a rien à voir avec l'amendement Wallon, fondateur de la IIIème République, passé en 1875 à une voix près. Il ne s'agissait pas, en 2008, de refonder la République mais de renforcer la monocratie élyséenne.

Les combats institutionnels sont des combats politiques lourds de sens. L'utilité de ce scrutin désastreux, c'est qu'il rend plus visible encore la nécessité de sortir vraiment de la monarchie constitutionnelle, cette Ve République qu'aura fondée De Gaulle et qui est restée, même 24 fois transformée, une exception en Europe, un encouragement au pouvoir solitaire et autoritaire. Cela prendra ou non du temps. Nous sommes avertis : pour redonner le pouvoir aux citoyens, il faudra sortir de cette Ve République de moins en moins républicaine...

vendredi 18 juillet 2008

Liberté et religion

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L'homme est la source qu'il cherche (Mallarmé)

Aux Australiens, le Pape a dit : "Votre pays manifeste du respect pour ce droit fondamental qui donne aux hommes et aux femmes la liberté d'adorer Dieu selon leur conscience".

Devant les responsables religieux des autres confessions, il a insisté sur le rôle de la religion en tant que force unificatrice de paix, en dépit de la conviction du contraire chez certains. "Dans un monde menacé par les formes de violence sinistres et aveugles, la voix unie des religieux exhorte les nations et les communautés à résoudre les conflits par des moyens pacifiques et avec le plus grand égard pour la dignité humaine", a dit Benoît XVI.

Il est exact qu'il y ait, parmi les croyants, des hommes de paix. Il est tout aussi évident qu'il y a, parmi les adeptes des religions, des hommes de guerre. La liberté de croire s'accompagne souvent de l'hostilité à ceux qui ne croient pas ou croient autrement que soi! Adorer n'est pas un droit. Un droit est une reconnaissance légale. L'amour n'est pas l'adoration. Aimer échappe à tous les droits. L'amour de celui qui adore est un amour fou. Les "fous de Dieu" sont dangereux. Un culte passionné est toujours proche de la violence. Qui adore idolâtre. Les idoles, comme les images religieuses, sont des objets sur lesquels se transfère le sentiment religieux souvent avec fanatisme et intolérance. On le constate depuis toujours, et on a tué au nom de Dieu autant et plus que pour en finir avec les religions! Ne pas reconnaître cette perversion surabondante dans les manifestations des religions entache la parole du Pape (ou de tout autre porte-parole d'une Église, d'un Temple, d'une Synagogue ou d'une Mosquée) d'une insuffisance radicale qui rend suspect tout discours. La liberté de croire ou de ne pas croire, de prier ou de ne pas prier, appartient au genre humain. Ce n'est pas un droit; c'est une donnée constitutive de la conscience. La liberté de conscience, si longtemps décriée dans les Églises, est la meilleure justification de la foi. Quand la raison cesse de rendre compte de ce que l'homme peut comprendre, la foi (le pari sur l'inconnu) prend le relais, ou non. L'athée, l'agnostique et le croyant sont des frères en humanité. Nul n'est coupable de ses convictions. Mais je doute que ce credo fasse partie du savoir des théologiens du Vatican...


Le fanatisme, ce redoutable amour de la vérité (Toqueville)

jeudi 17 juillet 2008

Un pape vert?


Il est bien temps!

Dans son premier discours des Journées mondiales de la jeunesse (JMJ), à Sydney, le pape Benoît XVI a exhorté les 150 000 catholiques rassemblés à protéger l'environnement, une question d'une « importance vitale pour l'humanité », selon lui. Il a dénoncé le gaspillage des ressources de la planète et les « fausses idoles » de la société matérialiste. Il a évoqué les « plaies » inquiétantes que porte la planète, telles que « l'érosion, la déforestation, le gaspillage des ressources minérales et marines pour alimenter un esprit de consommation insatiable ».

Le pape a appelé les générations futures à protéger la Terre. Il a également souligné la menace de la hausse du niveau des eaux pour certains pays du Pacifique au moment où d'autres pays « souffrent des conséquences d'une sècheresse dévastatrice ».

Mieux vaut un tel discours que d'autres, mais bien des questions demeurent posées que n'évoque pas Benoît XVI.

• La théologie catholique n'a-t-elle pas contribué à ce que la nature soit considérée comme ce que l'homme avait mission de dominer?

• La protection de la Terre peut-elle s'effectuer sans engager la lutte contre ceux qui la menacent, à savoir ceux qui gaspillent les ressources de la Planète?

• La société matérialiste ne se réduit-elle pas, aujourd'hui, à la société capitaliste?

• La médiatisation à outrance dont s'entoure la papauté ne constitue-elle pas une pollution?

• Accepter de se laisser dénommer "Sa Sainteté" est-il compatible avec l'humilité et la sobriété à quoi conduit l'abandon des "fausses idoles"?

l'Église a trop souvent trahi la mission qu'elle affirme avoir reçue du Christ. Le respect vigilant de "la création" comme disent les théologiens, la solidarité active avec ceux qui souffrent de l'inflexibilité des puissants, la valorisation constante de la pauvreté contre la misère, le renoncement effectif au pouvoir où se complaisent les grands de ce monde : ces quelques axes de pensée, peu suivis, font pourtant partie de la thématique chrétienne et on les retrouve aisément dans les évangiles!

Ce qui est d'une importance vitale pour l'humanité, c'est que tous ceux auxquels s'adresse le Pape en finissent avec les pontifes et les poncifs, et cessent d'attendre du ciel des réponses aux questions cruciales que la vie leur pose, en ce début de XXIe siècle.

Note : l'occasion est trop belle pour la laisser passer. On peut lire, avec un grand plaisir, le roman de Miguel Asturias, Le Pape vert, paru en 1985, aux éditions LGF Livre de poche
http://www.decitre.fr/livres/Le-pape-vert.aspx/9782253037682

Soyons beau-joueur. Il en est, tel Patrice de Plunkett pour croire en l'écologie du pape.
http://www.lanef.net/archives_de_la_nef/grands_entretiens/_l_eglise_est_ecologiste_patrice_de_plunkett.asp?page=1




vendredi 11 juillet 2008

Le moine, le prêtre, et le pouvoir.


Thich Huyen Quang

Aujourd'hui, au Vietnam, ont lieu les obsèques d'un moine. Décédé à 87 ans, Thich Huyen Quang, représentait un bouddhisme qui ne s'était pas couché devant le pouvoir!


Je rapproche cet évènement d'une question qui me poursuit depuis des mois : qu'est-ce qu'un moine? Et qu'est-ce qu'un prêtre? Le moine (de monos, seul) est censé vivre à l'écart du monde social. Au contraire, dans les civilisations occidentales, le prêtre en est un agent, une personnalité, une autorité morale locale.

Par toutes les voies que je peux emprunter pour tenter, donc, de répondre à cette question "qu'est-ce qu'un prêtre?", j'aboutis toujours à cette idée simple : il s'agit d'un être humain, presque toujours de sexe masculin, auquel est délégué le droit et le pouvoir de parler au nom d'une église, partant : au nom de Dieu. Et il y a là, selon moi, depuis des siècles et des millénaires, une supercherie à laquelle l'humanité n'a jamais pu résister et sous laquelle se loge le pouvoir de l'homme sur l'homme.

Car c'est sous l'angle religieux et politique tout à la fois qu'il faut aborder cette attribution, cette domination subtile, cette "mise à part" d'une minorité jouant un rôle social essentiel, celui tantôt d'intermédiaire avec le ciel, tantôt de médecin des âmes, autrement dit de réconciliateur avec la société, du moins la société telle qu'une église l'a codifiée.

Jésus n'était pas prêtre et ce sont des prêtres qui l'ont fait assassiner. Les musulmans n'ont pas de prêtres mais des imams qui ont un statut bien différent : celui d'exposer, de faire connaître, le contenu du Coran et la doctrine qui en est extraite. Les bouddhistes n'ont pas de prêtres mais des religieux qui se retirent du monde pour mieux se mettre au service des autres hommes.

Sous toutes ces fonctions, du prêtre au pasteur, de l'imam au rabbin, il y toujours la même conviction : il faut des experts en religion pour conforter la foi des croyants.

L'homme de culture affronte cette fausse certitude armé de sa seule raison mais enrichi de l'histoire des civilisations. Une double erreur sous-tend cette aliénation collective qui autorise des hommes à parler au nom des autres hommes quand il s'agit de l'essentiel : notre rapport d'êtres conscients à ce qui nous fait, Dieu ou la Nature, ou les deux à la fois...

La première de ces erreurs est de séparer, pour mieux les mélanger et les confondre, le pouvoir politique et le pouvoir religieux. Cela a conduit au bûcher, au lynchage, à l'attentat. La seconde erreur est de déléguer une partie de son intimité, celle qui conduit à l'introspection, la méditation ou la prière, à un autre! Chaque homme, ou femme, est prêtre, c'est à dire relié, c'est à dire religieux, même si c'est hors de toute religion.

J'entre ici dans ce que les intégristes considèreront comme un blasphème : celui de la contestation de leur pouvoir sur autrui. Les questions religieuses sont trop importantes pour les confier à des hommes de religion. Dire cela m'eut valu la mort en d'autres temps, en France, et me le vaudrait toujours, en d'autres lieux, de par le monde.

Je tiens le moine pour un peu plus respectable. Il n'a besoin d'aucun prosélytisme; il vit en communauté, en général, sans nuire à quiconque; il se fait témoin de la possibilité d'être homme sans entrer dans l'agitation des puissants et des possédants. Il pense, étudie et cherche un équilibre de vie qui fasse sens. Il n'est pas nécessairement prêtre. Il est même des religieux retirés de tout, les ermites, qu'on retrouve dans toutes les religions, et qui sont l'exemple même du non-pouvoir, ou au contraire l'exemple du vrai pouvoir : pas le pouvoir sur l'autre mais le pouvoir sur soi.

L' "Océan de sagesse" qu'est censé représenter le Dalaï-Lama ne m'attire pas, quelles que puissent être les qualités de l'homme, simplement parce que l'exploitation du spirituel par le temporel, au travers de sa personne, est plus que jamais flagrant. Le bouddhisme aussi est équivoque et peut s'emparer des esprits au lieu des les ouvrir.

Cette reprise de l'analyse sur pouvoir et religion, revue sous l'éclairage des données contemporaines, est plus que jamais indispensable. À cause des errances du chef de l'État français sur la laïcité, à cause de la justification ou du déclenchement de la violence par des motivations religieuses notamment islamistes, à cause de la confiscation des esprits par des discours et prêches qui, de nouveau, conduisent à abandonner sa liberté de penser.

La laïcité n'est pas un dogme et ce pourrait être un concept évolutif dans une période de l'histoire du monde qui exige toujours plus de respect et d'acceptation de la diversité. Mais Nicolas Sarkozy veut en faire une reconnaissance du lien entre la culture et la divinité, quelle que soit la religion concernée : ce chemin, qu'emprunte l'actuel président de l'État, en France, là où furent mises en place des institutions fondées sur la séparation du pouvoir civil et du pouvoir religieux, ce chemin est dangereux et conduit vers un retour à la vénération des princes de l'Église, de la Synagogue, de la Mosquée ou de tout autre temple. C'est une régression.

Sortir d'une époque qui aliène le religieux en le confinant dans la religion : tel serait mon vœu!
On en est loin. La philosophie suffit pourtant à entretenir nos doutes, à les enrichir de certitudes difficiles parfois remises en cause. Celui qui croit tout savoir est un meurtrier en puissance. Le prêtre est souvent, fut-il humble, l'un de ces sachants donneurs de leçons de vie. Soyons tous prêtres, non pas les ministres d'un culte mais des chercheurs de vérité, non pas, comme dans l'univers catholique, des aumôniers ou des chanoines ou des curés ou des vicaires, mais des passionnés de l'ontologie et de la métaphysique, bref des hommes.


François d'Assise, écologiste et non-violent.

samedi 5 juillet 2008

Ingrid Bétancourt enfin libre et... manipulée?



"L'énigme Betancourt vient de commencer" affirme la Radio Suisse Romande.

Il y a toutes raisons de douter des informations relatives à la libération d'Ingrid Bétancourt.
S'il faut se réjouir vivement de sa sortie d'une horreur qu'elle a vécue des années durant, il ne faut pas, y compris par respect pour elle, par solidarité avec elle, tout avaler sans faire montre d'esprit critique.

Il faut oser se poser des questions (et il en viendra beaucoup d'autres...) afin de lutter contre l'instrumentalisation politique de cette libération heureuse.

1 - Entendrons-nous désormais parler des quelques 800 ou 3000 (!) otages qui restent aux mains des FARC? Ingrid Bétancourt et ses comités ont raison de dire que la lutte continue pour eux. Mais Uribe s'en soucie-t-il à présent?

2 - Ingrid Bétancourt nous apparaît en bonne santé, dynamique, lucide, informée. L'euphorie n'explique pas tout! Aurait-elle été moins mal traitée, voire ménagée, par ses geoliers, ces temps derniers au moins? Et, si oui, pourquoi?
3 - Uribe pouvait-il, politiquement, risquer la vie des otages? Difficile à croire! N'a-t-il pas, alors, comme l'affirme Radio Suisse Romande, fait négocier la libération contre des primes ou rançons et contre la promesse d'exil de guérilleros "repentis"?
4 - L'encadrement des services de renseignements colombiens par des spécialistes américains et israéliens est de plus en plus difficile à nier. Pourquoi les 3 otages américains ne sont-ils pas passés par Bogota et ont été directement rapatriés? Pourquoi l'armée israélienne reconnait-elle, aujourd'hui, son soutien militaire technique à l'armée colombienne?
5 - N'assistons-nous pas à une opération médiatique géante dont l'objectif politique non avoué est de renforcer l'axe Bush-Uribe très mal en point en Amérique latine? Mais aussi pour redorer le blason d'Uribe dont l'élection (en 2006) est remise en cause par suite de corruptions et de violences avérées?
6 - Ingrid
Bétancourt, survoltée par la joie, ne peut-elle être, dans les jours et semaines prochaines, l'objet d'instrumentalisations susceptibles de lui nuire? Et cela n'a-t-il pas déjà commencé?
7 - Les idées que défendaient en 2002, Ingrid Bétancourt, candidate écologiste et pacifiste, peuvent-elles être soutenues par tous ceux qui ont si bruyamment applaudi sa libération?
8 - Ne faut-il pas éviter les pièges politiques trop bien tendus. N'est-ce pas la priorité des vrais amis d'Ingrid?
- "Mieux vaut la force que la négociation" : telle est l'idée que l'on s'efforce impudemment de nous vendre. On est déjà passé de la force à la ruse. On pourrait bien passer bientôt à la reconnaissance de la corruption de guérilleros cherchant à sauver leur peau.
- "Chavez a perdu" : tel est le message que les médias français, aussitôt, ont tenté de nous faire avaler! La réalité est un peu plus complexe et la prochaine rencontre Uribe-Chavez va le révéler.
- "Nicolas Sarkozy a été le plus influent auprès d'Uribe" : qui ne voit que le président colombien avait ses vrais appuis à Washington? Pour une fois, la prise de distance de Ségolène Royal n'est-elle pas justifiée?
- "Les FARC sont morts" : afaiblis, privés de leurs chefs, dispersés, peut-être, mais ils sont loin d'avoir tous baissé les bras et les faire sortir de la clandestinité, les faire échapper à l'influence des narco-trafiquants ne se fera pas à coup de canons!
- "Ingrid Bettencourt va se relancer dans la politique en Colombie" : l'annoncer c'est lui enlever le temps de se refaire une santé, de s'informer longuement avant toute décision .
- "Les narco trafiquants arment les FARC pour mobiliser l'armée colombienne ailleurs que là où ils sévissent" : les narco trafiquants ont des "clients" partout en Colombie, y compris dans l'armée.

En conclusion, vigilance pour tous les soutiens et amis d'Ingrid Betancourt. Sa disparition aurait engendré un cataclysme, une immense souffrance. Elle continue de courir de graves risques. La manipulation de l'information en est un, considérable.



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