samedi 2 mai 2015

Le bipartisme british mis à mal

Les Britanniques vont voter le 7 mai.

À ce qu'on en sait, vu de France, il pourrait être fort difficile de constituer une majorité parlementaire, en Grande Bretagne, le 8 mai au matin. Le mode de scrutin, en vigueur depuis très longtemps, simple, brutal, inchangé, fait pour permettre exclusivement l'alternance entre les Tories et le Labour Party, risque de ne pas permettre ce pour quoi il a été créé : instituer une stabilité politique dans le Royaume.

En effet, le scrutin uninominal majoritaire à un seul tour (une spécialité d'Outre-manche) qui conduit à la désignation du candidat ayant obtenu le plus de voix, avec ou sans majorité absolue, pourrait être perturbé quand des formations hier encore "secondaires" font, à présent, émerger des candidats crédibles. 

12 partis sont représentés dans le plus vieux Parlement au monde. Les députés siègeront, en 2015, dans 650 circonscriptions ( 529 en Angleterre, 59 en Ecosse, 40 au pays de Galles et 18 en Irlande du Nord).

Si Conservateurs et Travaillistes obtiennent, selon les sondages, 30 à 35% des voix, et donc le plus grand nombre d'élus, ils n'en vont pas moins rencontrer des obstacles plus nombreux et plus importants que par le passé. Là où le parti écossais (le Scottish National Party) va les dominer, dans une cinquantaine de circonscriptions. Là où le parti antieuropéen (l'UK Independence Party, ou UKIP, vainqueur des dernières élections européennes, à la proportionnelle) peut engranger plusieurs sièges. Là où des partis régionalistes, (au pays de Galle, le Plaid Cymru), et en Irlande (dans les partis issus du conflit nord-irlandais) continuent de faire bonne figure. Voire même, là où des candidats Verts réussissent à proposer une alternative écologique attirante pour une majorité relative d'électeurs... Quant au parti des libéraux-démocrates (centre), jusqu'alors le troisième parti britannique, membre décevant de la coalition au pouvoir, avec le Parti conservateur, on s'attend, bien qu'il soit bien implanté, à ce qu'il régresse.

Si le Sin Fein irlandais maintient sa politique de non participation au Parlement, comme il l'annonce, 323 sièges  et non 326 seraient nécessaires pour constituer une majorité. Ni le parti de David Camerone ni celui d'Ed Miliband n'atteindront ce score. Des tractations peuvent conduire à des surprises : si les libéraux démocrates changent d'alliance ou si les députés écossais font la décision, les travaillistes n'ayant d'autre choix que de les accepter comme partenaires !

En quoi  sommes-nous, en Europe, concernés par cet épisode électoral inédit ? Précisément parce qu'il est inédit : les Britanniques sont à la tournée d'un chemin qui se dirige vers plus d'Europe ou vers plus d'autonomie locale. Quant aux Eurosceptiques qui pèsent sur les  Conservateurs, ils rencontrent un adversaire influent, les Écossais, à la fois européens et autonomistes à défaut de pouvoir être actuellement indépendantistes.

Nous sommes concernés parce que la démocratie à l'américaine avec deux partis ultra dominants est en difficulté. Les dirigeants des pays occidentaux qui compteraient sur le scrutin majoritaire uninominal (en France, à deux tours !) pour maintenir la prééminence des partis ultra libéraux n'ont plus la garantie de garder la maîtrise politique seuls, et pas même par le jeu d'alliances entre partenaires aux choix contradictoires. Il n'est du reste pas certain que le nouveau Parlement ait la durée de vie prévue par la loi électorale : 5 ans...

Nous sommes concernés parce que les démocrates sont confrontés à ce besoin de renouveau institutionnel auquel s'opposent les traditionnalistes : Républicains et démocrates aux USA, Conservateurs et Travaillistes en Grande-Bretagne, et, bien entendu, UMP et PS en France sont des partis attachés à un système bipolaire qui ne satisfait plus les citoyens. La réponse de l'abstention politique volontaire ne peut durer indéfiniment.

L'Allemagne sans roi, ni président-monarque, avec un mode de scrutin largement proportionnel, montre que, sans bouleversement ni instabilité, un État peut fonctionner. Loin de moi la pensée d'être admiratif de l'Allemagne, mais je ne puis nier que ce qui existe de façon durable, doit être pris en considération.

Dès le 8 mai prochain (jour de commémoration de la fin de la seconde guerre mondiale dont souffrit tant la Grande Bretagne), nous examinerons, avec curiosité, le résultat historique -quel qu'il soit- qui va peser sur l'avenir de l'Europe (non pas de l'Union européenne, mais de toute l'Europe), et j'y reviendrai, ici.




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