mercredi 2 janvier 2008

La machine à broyer les "céréales sur pattes".

Je ne sais si je dois dire que je hais ce monde que j'aime ou que j'aime ce monde haïssable.
Un monde à vomir de peur et de honte où l'on rencontre encore le plaisir et la beauté! Un seul exemple me suffit à comprendre que la Planète est tout entière transformée en usine à tuer, à ruiner, à dominer.

Dans quel monde vivons-nous, en effet, qui veut nous faire croire que nous devons abattre, au Brésil, onze millions de poulets par jour, pour satisfaire les besoins alimentaires d'immenses populations un peu partout sur la Terre? L'entreprise géante, française, bretonne, sise à Chateaulin (29550), portant le nom de... Doux, se charge d'incuber, nourrir, trier, abattre, conditionner, transporter, par containers entiers, ces volatiles à courte vie dont on fait commerce, à bas coût, mais aussi au prix de conditions de vie pour le personnel employé qui sont innommables. "Est-ce ainsi que les hommes vivent?" dit la chanson; mais s'il était indispensable à l'homme de vivre ainsi, cela ne vaudrait pas la peine de vivre!

Ce monde mondialisé n'est pas le mien. Je loue les concepteurs des émissions de Thalassa d'avoir su montrer, sans avoir à démontrer, que le système dans lequel sont enfermés les marins de commerce n'est rien d'autre qu'une machine déshumanisante que les intéressés ne peuvent refuser mais que nous, nous pouvons refuser.

La mondialisation capitaliste est un monstre pire que Veau d'Or de la Bible qu'on adore jusqu'à en perdre sa raison d'être. Elle banalise l'horreur. Parmi les mythes religieux, Gog et Magog annonçaient la pire violence, celle de l'Antéchrist. Dans les trois religions du Livre, on en trouve trace. S'il est un sens à donner à ce mythe, aujourd'hui, c'est qu'il y a toujours la possibilité de penser et de réaliser pire que ce qui a été connu. La domination absolue de toutes les activités humaines "rentables" par les puissances financières rend la vie invivable.

Et pourtant même sur la cendre, les fleurs finissent par repousser! Qu'il serait simple de s'en tenir à refuser l'inhumanité triomphante. Chaque enfant qui rit déchire le voile noir dont on ne cesse d'entourer la planète. C'est ainsi.

Le directeur de l'entreprise Doux parle des poussins, poules et poulets comme de "céréales sur pattes" qu'il faut semer, protéger des pollutions et moissonner finalement, sans souffrance grâce à la mécanisation rapide du couteau industriel. Car "une fois qu'on a rempli le tuyau, il faut le vider" dit encore ce beau et fringuant responsable, noir de peau, au verbe choisi et soucieux de l'emploi de milliers d'acteurs, en Bretagne comme au Brésil et sans doute ailleurs.

Le meilleur des mondes, celui d'Aldous Huxley, n'est plus à inventer. Il est là. Ce n'est pas le mien même si j'y vis. Si aucun autre monde n'était possible, mieux vaudrait en finir au plus vite. Mais il est toujours possible à l'homme de penser et donc d'agir autrement. Non seulement je veux le croire, mais je le crois.

Archives du blog

Résistances et romanitude

Résistances et Changements

Recherche Google : rrom OR tsigane