jeudi 21 avril 2011

Pour en finir avec la gauche et la droite

On sait parfaitement ce qu'est la droite : c'est l'univers politique où dominent les préoccupations d'argent, de profit et de maintien des privilèges des riches. On ne sait plus trop ce qu'est la gauche : c'est la non droite, en mots ; c'est le moindre mal social ; c'est un ensemble de formations politiques aux choix contradictoires, etc...

Quand la gauche n'est plus identifiable, elle se meurt.

Les insuffisances et le durcissement de la droite qui glisse, irréversiblement, vers une idéologie du repli et de du nationalisme, ne suffisent pas à la mettre en difficulté. Les menaces qui pèsent sur elle viennent d'ailleurs : la droite s'essouffle, au fur et à mesure que le capitalisme entre en contradiction et devient incapable de gérer les conséquences de sa propre activité.

Les concepts de droite et de gauche sont atteints dans leur histoire même : à droite parce que la domination de l'occident a perverti la démocratie dont l'avenir n'est plus en Europe ; à gauche, parce que l'abandon de la contestation de l'économie de marché a rendu les partis socialistes adeptes de la gestion sociale du capitalisme, ce qui la tue.

La pensée binaire, à quoi tout se ramène, depuis que l'informatique a pris le pouvoir dans l'information, permet d'user et d'abuser des vocables de droite et de gauche mais sans lever la confusion. Tout se passe comme si l'on était, un jour, baptisé de droite ou de gauche et que l'on devait porter avec soi, cette carte de visite, derrière laquelle se cache souvent une tout autre identité !



La droite fut longtemps inavouable, et l'on se contentait, dans les milieux dits alors "conservateurs" ou "modérés" (!) de dénoncer le laxisme, l'irresponsabilité et l'incompétence des partisans de "la sociale". Aujourd'hui, non seulement elle ne se cache plus mais elle est "décomplexée"... Autrement dit, elle se montre au grand jour pour ce qu'elle est : la propriétaire du pouvoir aux ordres des puissances d'argent. Plus encore, elle mène, et gagne souvent, une bataille idéologique où les électeurs croient constater qu'il peut être de leur intérêt de se ranger derrière ceux qui, par exemple, les exhortent à "travailler plus pour gagner plus". Ce slogan, en 2007, n'a pas été pour rien dans la victoire présidentielle de Nicolas Sarkozy, élu massivement (ne l'oublions pas!) avec une très forte participation électorale et un bel écart de voix entre lui et sa concurrente.

La politique sarkozienne, qui pensait pouvoir s'appuyer sur un enrichissement massif des riches pouvant facilement faire tomber, de leurs tables, des miettes appréciées des pauvres, a été brisée par ce qu'on a appelé "la crise" et qui, en fait, était l'entrée dans une mutation de civilisation dont on n'a pas mesuré toutes les conséquences. L'écologie a fait le reste : dans un espace planétaire fini, on ne peut développer ce qui n'est pas renouvelable et on doit fonder les équilibres économiques sur ce que la terre peut fournir sans être polluée, blessée, amoindrie dans sa capacité à nourrir une population bien plus nombreuse que par les siècles passés.

Nous sommes confrontés à des enjeux politiques auxquels la droite ne sait plus répondre et auxquels la gauche, tétanisée, convertie à une économie de droite, ne sait pas davantage faire face. Droite et gauche, appellations convenues, banales, historiques mais dépassées, nous ramènent, sans cesse vers un dualisme qui n'a plus de fondement intellectuel et qui ne représente plus qu'un repérage médiatique.

J'entends d'ici protester ceux pour qui la gauche a du sens ! Il fut un temps où le mot communisme était une valeur. Quoi qu'ait écrit et enseigné Alain Badiou, à juste titre, (en gros le communisme est tout autre chose que ce que le soviétisme et le parti ont défiguré), "communisme" est, actuellement, politiquement inutilisable. Il fut un temps où "socialisme" avait une signification indubitable. On débattait, au sein de la SFIO, sur le choix des moyens (révolution ou évolution ?), mais on ne contestait pas la nécessité d'échapper, un jour, à la sortie du capitalisme. Socialisme, à son tour, tend à devenir ce que fut le radicalisme : une apparence, un passé glorieux, une machine électorale encore puissante mais pas une capacité à se remettre en question dans une situation totalement nouvelle où l'occident plie sous le poids démographique de l'Asie, où les catastrophes nucléaires ou le réchauffement climatique détruisent le mythe de la croissance permanente, où le brassage des populations conduit à repenser l'immigration non comme une invasion mais une circulation incessante, où les frontières ne permettent plus de juguler les effets des bouleversements transnationaux, etc.

Gauche et droite ne veulent plus rien dire si l'on veut en finir avec les politiques de droite qui s'accommodent fort bien de l'existence d'une gauche impuissante ou corrompue (non, le plus souvent, par l'argent, mais par l'appétit de pouvoir qui permet tous les compromis et toutes les compromissions). Au lieu de perdre son temps à revitaliser une gauche qui a perdu sa substance, mieux vaut travailler à penser une politique qui soit compatible avec la survie de l'humanité tout entière vivant sous des menaces terrifiantes qui sont moins dues à la nature qu'à l'activité humaine.



Quant aux partis écologiques qui, par souci d'avoir le pouvoir d'agir, font alliance avec une gauche qui est hostile à ce qu'ils préconisent, ils courent le même risque que le PCF, le PS, le PRG, le PG et d'autres : déserter un espace mythique qu'on avait appelé la gauche, qui ne tient plus dans les limites où il était situé, et qu'il faudra non seulement rebaptiser mais "dénationaliser". Il est urgent d'élargir la politique à ce que les Révolutionnaires de 1789 définissait comme l'universel, mais un universel permettant de convertir le monde à leurs idéaux, fut-ce par la force (en sommes-nous vraiment sortis ?)

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