samedi 11 septembre 2010

Des crimes trop fréquents pour n'être que des fautes individuelles.

L'Église catholique de Belgique, secouée par des scandales de pédophilie, a publié (en néerlandais, la traduction française est en cours) une centaine de témoignages de victimes de prêtres ! Le texte est disponible sur le site www.commissionabus.be

« C'est le dossier Dutroux de l'Église » : c'est ainsi que le professeur Peter Adriaenssens, pédopsychiatre indépendant, qui préside la « Commission pour le traitement des plaintes pour abus sexuels dans une relation pastorale », mise sur pied par l'Église, qualifie son rapport final. La commission a reçu, entre janvier et juin 2010, 475 plaiFresque murale aux cascades.JPGntes.

Des pressions ont abouti à la démission de la Commission Adriaenssens ! A-t-on voulu, ainsi, empêcher la vérité de se faire jour ? En réalité, on en sait assez pour juger non les personnes mais la situation : en trop de lieux, de par le monde, on a violé des enfants et fait taire leurs familles pour qu'on puisse se contenter d'en appeler à la morale et à la loi ! Il faut comprendre et pas seulement réprimer, sinon les mêmes causes produiront, ailleurs et autrement, les mêmes effets, c'est-à-dire l'agression sexuelle de mineurs par des adultes investis d'une autorité, religieuse ou pas !

Pourquoi dit-on : "Le dossier noir de l'Église", si ce n'est parce que c'est la principale des Églises chrétiennes qui est d'abord concernée : l'Église catholique. Non que tous les violeurs d'enfants soient des prêtres catholiques, ni même des chrétiens, mais parce que c'est au sein de cette Église que les exigences, dans le domaine de la morale sexuelle, sont les plus hautes et, hormis une église catholique orientale, les prêtres y sont astreints au célibat et donc à la continence.

L'exemple de "la pureté" et de "l'abstinence" ne peut plus être donné. Non seulement des prêtres célibataires ne sont pas continents, mais certains ont abandonné le sacerdoce pour vivre en couple. La culpabilisation du sexe a été l'une des causes de perversités sexuelles. Attirer l'attention sur la faute, c'est la provoquer. Mais plus, voir une faute là où se situe la condition humaine, c'est rompre avec la nature, en lui opposant une fausse culture, au risque de tomber dans des comportements violents. La pédophilie, quoi qu'aient pu écrire y compris des philosophes, est un crime parce que cela conduit à aller à l'encontre de la volonté d'enfants, qu'on les séduise ou qu'on les force.

On comprendra donc que ce n'est plus de prêtres pédophiles dont il est seulement question mais des conceptions de l'homme qui le placent sous la hantise du mal, de la faute, de l'erreur ou du pêché. Les théologiens ont beau dire et écrire, l'enseignement religieux qui domine en l'Église catholique aboutit à ce que les "fidèles" (qui sont "conformes à la vérité", dit le dictionnaire !) associent le péché et la chair. Il s'ensuit que corps n'est pas aimable, même s'il est respectable. Seul l'esprit qui habite ce corps, est digne d'amour. Horrible confusion que, je m'empresse de le dire, tous les penseurs chrétiens n'effectuent pas, mais qui, je le répète, l'emporte dans l'opinion catholique.

"Le péché originel" -  Bas-relief ornant le portail de la Vierge de Notre-Dame. On y voit  représentée la tentation d’Adam au jardin d’Éden par la diablesse  Lilith, séductrice à queue de serpent qui figure dans les écrits  rabbiniques du Talmud de Babylone.

Bas-relief ornant le portail de la Vierge de Notre-Dame de Paris. On y voit représentée la tentation d’Adam au jardin d’Éden par la diablesse Lilith, séductrice à queue de serpent qui figure dans les écrits rabbiniques du Talmud de Babylone.

Il n'est pas d'éducation sexuelle, quoi qu'on raconte ou qu'on écrive, parce qu'apprendre à "faire l'amour" (mais l'amour se fait-il ?) dépasse les capacités de tout éducateur, parent, enseignant ou animateur. Tout l'être humain est engagé dans l'acte sexuel et ce n'est pas le caractère pornographique ou platonique des gestes de l'amour qui en peut masquer et déshumaniser l'essentiel : la rencontre de deux humains qui se découvrent entièrement ! La multiplication des informations relatives aux agressions sexuelles n'a pas pour cause, (en plus de la médiatisation contemporaine de comportements nombreux, et cachés depuis toujours dans le silence des familles), la violence des pulsions ! C'est bien l'incapacité de donner sens à une sexualité réduite à l'apaisement d'un désir qui est responsable et qui aboutit à une affreuse aberration culturelle dont "le physique" n'est que l'instrument.

Se dévoiler, dans tous les sens du mot, c'est aller à la recherche du mystère de la personne dont on va partager un moment de vie dans la plus grande des intimités possibles. Un prêtre est éloigné de cette réalité là et, au sens strict, il est incapable de morale sexuelle, s'il s'agit du respect non obtenu par l'interdit, mais mis en pratique dans les gestes amoureux. "L'homme n'est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l'ange fait la bête"affirmait déjà Pascal.

Voilà qui est bien injuste pour les bêtes ! La culture, si elle est bien le propre de l'homme, doit non seulement nous faire accepter notre animalité mais nous la faire aimer. Aimer son corps pour savoir aimer d'autres corps. Se voir soi-même, en ce corps de l'autre qu'on voit, fait partie de la connaissance de la condition humaine.

Je pensais les chrétiens un peu mieux armés que d'autres pour respecter autrui avec le principe évangélique que Jésus dit égal à l'amour de Dieu : "aimer son prochain comme soi-même" (Mc 12,31).

La théorie du péché, de surcroît originel, enseignée dès le catéchisme, et qui atteindrait tout homme avant que ne se soit éveillée en lui la conscience, de façon quasiment génétique, met à mal cet Évangile d'amour ! Comment s'aimer soi-même entaché de péché avant même d'avoir péché ? S'agissant des enfants, Jésus avait pourtant prévenu : "tout ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait..." (Mt 25:40), ou encore : "mais si quelqu'un scandalisait un de ces petits , il vaudrait mieux pour lui qu'on suspendit à son cou une meule de moulin et qu'on le jetât au fond de la mer" (Mat. 18-6).

On le voit, le mal et le péché sont deux. Le péché (encore une fois tel que l'idée s'en véhicule dans la majeure partie de l'Église catholique) contient l'explication du mal et impute nos fautes aux faiblesses de la chair dont bien sûr, fait partie le sexe ! Que cette fausse évidence fasse des ravages dans les rangs des catholiques les plus convaincus ne saurait étonner !

Lutter contre toutes les violences sexuelles ne passera pas par l'exhortation et le confessionnal. Il s'agit d'un défi culturel et politique fondamental où se joue notre humanité même. Là où il y a viol, il y a guerre, comme là où il y a guerre, il y a viol : une guerre faite à la réalité du monde !

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