dimanche 17 juin 2012

Les marchands de doute (ou de canons) nous dirigent vers le gouffre.

Deux événements auront marqué le mois de juin 2012.           

1 - Rio + 20 est la plus importante conférence internationale ayant jamais eu lieu concernant l'avenir de la planète. Plus de 130 chefs d'État y étaient présents. 
Le diagnostic est fait : nos activités ont mis le monde entier en danger. Les décisions à prendre ne seront pas prises pour autant parce qu'elles bouleversent toutes nos fausses certitudes. 
Ainsi, la plupart des  économistes supposent que les changements sérieux sont si lointains qu’on pourrait les ignorer. Certains misent sur la capacité d’adaptation des gens : une nette augmentation du niveau des mers se réglerait, par exemple, par des migrations. La vérité, c’est que les migrations de masse se sont accompagnées historiquement de souffrances de masse. Enfin, il y a la croyance que la technologie peut résoudre tous les problèmes. Tout cela est faux. 


Lisons : Les marchands de doute de Naomi Oreskes et Erik Conway (éd. Le Pommier, 2012. Ce livre aborde plusieurs points comme la bataille du trou d’ozone, la lutte contre le tabagisme passif ou l’attaque révisionniste contre Rachel Carson, mais surtout, il démontre pourquoi et comment on nous ment en ce qui concerne le problème majeur du réchauffement climatique.


  
Naomi Oreskes, historienne, dans un gros livre de pages démonte tous les pièges des" climatosceptiques".

"Depuis cent cinquante ans, y lit-on, la civilisation industrielle s’est repue de l’énergie emmagasinée dans les combustibles fossiles et aujourd’hui on nous présente l’addition. Pourtant, nous prétendons que cette note n’est pas la nôtre. Il n’est pas surprenant que beaucoup d’entre nous soient dans le déni, il n’est pas étonnant que les marchands de doute aient du succès : ils nous ont fourni le prétexte pour ignorer la facture. Il est vrai que faire quelque chose implique des coûts, et si l’on n’est pas sûr que ces coûts soient compensés par des bénéfices futurs, la meilleure option est de ne rien faire ; tel est le résultat d’une analyse rationnelle. Il est vrai aussi que ceux qui ont le plus à gagner à laisser les choses en l’état mettent en avant la nécessité de douter. Toute preuve peut être contestée car on ne peut jamais prouver quelque chose à propos du futur. Cela relève cependant d’une vision erronée de la science".

2 - Les Grecs auront voté sans que leur sort puisse dépendre de leurs propres décisions !
Ou bien les informations qui suivent sont exactes et ne cherchons plus où sont les causes majeures de la crise de la Grèce puis de l'Europe. Ou bien elles sont fausses et ceux qui les ont fournies devraient être traduits devant les tribunaux comme propagateurs de fausses nouvelles. Mais, hélas, il n'y a guère à craindre que cela soit faux. Contentons-nous, ici, de les reproduire !
 En Europe, la Grèce,  est certes un pays endetté.  Le remboursement de cette dette ouvre un juste débat national, un audit citoyen, comme dans d’autres pays : les intérêts des peuples ne sont pas ceux de l’oligarchie. Entre la question de la création monétaire et celle des taux d’intérêts, nous voyons vite que la « gouvernance » européenne actuelle penche du côté des banques commerciales. Il est même question de mettre le peuple indocile sous « tutelle » !
Mais ce pays endetté est  aussi  surarmé,  les médias dominants ne le disent jamais. Petit pays de 11,3 millions d’habitants, la Grèce est pourtant le 4ème importateur mondial d’armement. Les dépenses militaires grecques sont en pleine « explosion » et sont passées de 1,34 milliards d’euros en 1988  à 7, 39 milliards d’euros en 2009 ! Vive la croissance ! En quatre ans seulement (2005-2009), ces dépenses ont augmenté d’un tiers, passant de 5,4 milliards à 7,3 milliards d’euros. Curieusement, le « pouvoir d’achat en armement » donné à la Grèce tient à des concours financiers de banques de mêmes nationalités que les industriels fournisseurs d’armement (USA, Allemagne, France). La Grèce a acheté à la France des missiles, des blindés, des navires de surface, des mirages 2000 (1,6 milliards d’euros). L’Allemagne a vendu à la Grèce six sous marins pour 4,8 milliards d’euros ! Nous comprenons là pourquoi les critiques allemandes à la Grèce montent en puissance à partir du moment où les marchands de canons allemands font face à des impayés. Les aides financières et le soutien français à la Grèce sont conditionnés par l’achat par ce pays de frégates, hélicoptères de combat, …
Nous pouvons clairement affirmer que le malheur du peuple grec fait le bonheur des marchands de canon allemands, américains et français. Face à l’endettement, les gouvernements grecs ont appliqué des plans de rigueur au peuple grec. Incapable de supporter une division par deux de leurs revenus, des centaines de grecs mettent fin à leur jours. Voilà, en Europe,  les premières victimes des Dassault, Lagardère, Siemens et des banques  qui profitent de la « crise de la dette ».
 

Connue pour son important budget militaire - entre 3 et 4 % du PIB ces dix dernières années, selon le Guardian -, la Grèce est, au sein de l'OTAN, seulement dépassée par les Etats-Unis en termes de parts du PIB national consacré à la défense. Elle est le pays de l'UE qui consacre la plus grande part de son PIB à l'achat d'armes.
Entre 2004 et 2008, elle était le cinquième acheteur dans le monde. Mais, restrictions budgétaires obligent, le pays a réduit de 20 % son budget de défense entre 2010 et 2011, passant sous la barre des 5 milliards d'euros.

lundi 11 juin 2012

Pas de parti pour l'écologie

Plusieurs approches justifient qu'on puisse penser qu'il n'est pas de parti pour l'écologie.

La première, très générale, consiste à affirmer que la politique est chose trop sérieuse pour la confier aux partis politiques. L'écologie, axe ou centre de toute politique, pour quiconque voit et comprend, autant qu'il le peut, la réalité du monde, n'a pas besoin, par conséquent, de parti.

La seconde approche, plus politicienne, consiste à constater que, depuis 1974, à part quelques poussées à l'occasion d'élections européennes ou régionales, aucun parti "vert" n'a jamais pu, en France, peser suffisamment face aux partis traditionnels et surtout au PS. Les élections parlementaires, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, et a fortiori les élections présidentielles, n'ont jamais pu donner une place utile à un parti se réclamant de l'écologie qui, dès lors, n'avait plus d'autre raison d'être que de témoigner.

La troisième approche consiste à considérer que le mode de scrutin, les institutions monarchistes de la Ve République, bloquent tout accès des écologistes à des responsabilités politiques majeures. Le déficit flagrant de démocratie, en France, use, inexorablement tout parti qui voudrait échapper au bipartisme : PS ou UMP et, notamment, le parti Vert, appelé à présent EELV, qui ne pourra jamais, quoi qu'il en ait dit, "faire de la politique autrement".

La quatrième approche est la plus délicate : il conviendrait à tous les partis traditionnels que l'écologie échappe à la politique ou soit récupérable par chacun d'eux. "Pas de parti pour l'écologie" est une formule qui ravirait les professionnels de la politique si... cette écologie n'était, désormais, non seulement présente dans tous les partis, mais au cœur de toute la société parce qu'elle en est devenue la principale constituante.

La cinquième approche, enfin,  est celle de Simone Weil administrant la preuve que tout parti est "une machine à excommunier", autrement dit un outil de fragmentation et non d'unification de la vie citoyenne. Selon elle, les partis confisquent la politique et en limitent l'accès. L'écologie qui couvre la totalité de la vie commune ne saurait, alors, avoir sa place dans les limites souvent sectaires d'un parti.

Ces cinq approches débouchent sur la même conclusion : on peut mettre l'écologie à la porte des partis et des parlements, elle rentre par les fenêtres de la société tout entière. Les écologistes n'auront pu enfermer l'écologie dans un parti, mais les adversaires de l'écologie n'auront pu, davantage, l'enfermer dans la prison des idéologies utopiques. L'écologie c'est l'organisation pratique, au quotidien, de nos vies, à tous les niveaux individuels et collectifs,  du local au global, dans le respect maximal de tous les équilibres naturels.



Plus encore : l'écologie est indissociable désormais de l'économie. Non que "l'économie verte" ou "le développement durable" ait le moindre avenir (ces expressions sont confuses et ambiguës) mais la gestion des affaires du monde devient tout simplement impensable si l'on oublie, si l'on minimise, ou si l'on écarte les pré-occupations dont dépend le devenir même de l'espèce humaine.

Alors, à bas les partis et vive la politique : s'il n'est pas de parti pour l'écologie, il n'est pas de politique sans écologie.

samedi 9 juin 2012

Finance du XXIe siècle : folie ou horreur ?

Chaque vendredi, une émission d'antenne 2, animée par Élise Lucet, propose, en fin de soirée (à 22h.45) : Cash Investigation, autrement dit l'étude d'un sujet très sensible touchant à la manipulation de l'information des consommateurs.

Le 8 juin 2012, il s'est agi de présenter (c'est le titre de l'émission) La finance folle, celle des speed traders. Les traders en chair et en os ne sont plus absolument nécessaires. Avec le High frequency trading, on peut, en utilisant les savoirs de mathématiciens de haut niveau, construire des algorythmes qui permettent, à la nano-seconde près, d'effectuer des opérations boursières massives et qui vont, d'un bout du monde à l'autre, peser sur les marchés de la finance ou sur les pratiques de la finance de marché (à vous de choisir l'expression qui convient...).

Ne croyons pas que ce monde n'est pas le nôtre ! C'est avec l'argent des contribuables que des banques spéculent, dans des conditions qui échappent à presque tous les contrôles.  Il n'existe actuellement aucune réglementation qui puisse maîtriser cette "finance folle". Des machines surpuissantes, hors de contrôle, agissent sur les Bourses en multipliant, à des vitesses débordant les capacités de tout esprit humain, des informations innombrables qui modifient les jugements des décideurs. Il s'agit non seulement d'une folie mais d'une forme très savante de délinquance qu'aucun gendarme ne pourra jamais traquer.

De tels "progrès",  fondés sur la libération de l'intelligence mathématique, qui n'a plus aucun frein éthique, donnent à penser que le développement de la civilisation ne peut plus aller plus avant sans passer par une régression minimale ! La quasi totalité des hommes de ce siècle voient passer un train dans lequel ils ne monteront jamais. Ce train, c'est pourtant celui de leur histoire, de notre histoire. Nous sommes vécus. S'il n'est aucune gare où arrêter ce bolide, où examiner le contenu du train et de sa tractrice, nous ne comprendrons bientôt plus ce qui nous arrive. 

Aucune décision politique, aucune analyse philosophique ne seraient bientôt plus utiles. Les maîtres du monde nous soumettent à un nouveau Big Brother qui n'est même plus l'outil monstrueux que dirigent des hommes, les plus puissants. C'est une machine autonome qui n'a plus besoin des hommes et dont on attend, simplement, qu'en plus de son action de domination absolue des finances internationales, elle soit assez efficace pour distribuer de très riches prébendes à ceux qui la servent.

Le capitalisme est au sommet de sa gloire. Il peut  fonctionner sans capitalistes. Il est devenu le mode d'être et de penser banalisé. Ceux qui le condamnent peuvent lui être asservis sans s'en rendre compte. La finance moderne n'est pas seulement devenue folle (c'est-à-dire hors contrôle) comme le décrit l'émission (courageuse !) qui vient d'être vue par quelques milliers de téléspectateurs, cette finance nous fait atteindre le comble de l'horreur dès lors que tout objectif démocratique est annihilé à cause de la vitesse inhumaine à laquelle se prennent les décisions relatives au financement de l'économie.


Les nanotechnologies, dont on ne veut voir que les apports, démontrent, ici, dans le domaine bancaire, que la civilisation peut échapper à la pensée humaine. Ou, plus exactement, en même même que l'écart entre les revenus se creuse comme un gouffre et n'a plus aucun fond, aucune limite, l'écart entre les connaissances des élites et celles des masses est devenu béant, impossible à combler, en dépit (ou à cause) de la diffusion exponentielle des savoirs par internet. Ce sera bientôt, du reste, le plus grand défi lancé aux formateurs : l'école n'est plus le moyen de comprendre le monde pour pouvoir y vivre ; elle va devoir se transformer pour entrer dans le processus permanent de formation de tous, tout le temps. Nous devrons, sinon, nous en remettre aux "mégamachines" intelligentes, créées pour abêtir la majorité des humains et les transformer en fourmis, ou en termites, dans des sociétés ayant cessé d'avoir un destin qui leur soit propre.

Nous voici en guerre : la guerre des financiers partis, comme aux temps des conquêtes territoriales ou coloniales, à l'assaut des lieux de pouvoir et d'enrichissement. Le malheur est que nous sommes, à notre insu évidemment, déjà plongés dans cette guerre laquelle, parce que productrice de misère, ne peut que nous conduire à de nouvelles guerres, cette fois physiques.


À cela, une seule réponse : développer la libre conscience de ce qui se passe et la transformation de l'action des indignés, de  partielle qu'elle est, en une action plus globale. Tous les concernés ont à dire ceci : non, nous ne voulons pas que l'intelligence humaine, confisquée comme un objet par les riches, servent à exploiter les "99%" des humains qui sont nos semblables. Ce serait, sinon, avant même la disparition de l'espèce humaine (toujours possible par notre propre faute !), la fin des temps historiques, ceux que peuvent vivre des hommes qu'on peut encore appeler hommes.

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