Quand
des personnalités politiques européennes, et notamment françaises,
ne voient en Daech que le principal responsable de nos malheurs
actuels à qui il faut donc faire la guerre, ils se trompent
lourdement et le pape François le démontre.
Il a affirmé, en
effet, devant les journalistes, dans l'avion qui le conduisait à
Cracovie, que « Le monde est en guerre parce qu'il a perdu la
paix». Mais, a-t-il précisé, « quand je parle de guerre,
je parle d'une guerre d'intérêts, d'argent, d'accès aux ressources
naturelle, mais pas de religions ».
Et d'ajouter :
«On répète le terme d'insécurité, mais le vrai terme est la
guerre. Depuis longtemps le monde est en guerre fragmentaire1.
Il y a eu celle de 1914, puis celle de 1939-1945, et maintenant
celle-là. Elle n’est peut-être pas aussi organique. Organisée,
oui, mais pas aussi organique. Mais c’est une guerre. »2 Dans la même logique, et
quitte à prendre l'opinion publique comme le gouvernement polonais à
rebrousse poil, il appelle aussi la Pologne, terre d’émigration, à
« accueillir tous ceux qui fuient la guerre et la faim.»3
La guerre qui s'est ouverte
s'inscrit bien dans une mondialisation meurtrière.
Cette
approche, autant politique que religieuse, donne à penser que nous
serions entrés dans une nouvelle guerre mondiale, comme y en eut au
XXe siècle, mais d'un type nouveau. Depuis les conflits en Irak, en
Afghanistan, puis en Syrie, qui ont déjà fait des centaines de
milliers de morts, cette guerre mondialisée est engagée.
Dans cette perspective, toute analyse nationaliste est vaine. Nous
retrouvons la dénonciation, par le pape, de la guerre globale faite
aux pauvres par ceux dont les intérêts passent avant tout et qui
déclenchent, ainsi, des conflits qui ne sont ni « de
religion », ni entre nations, mais qui sont la conséquence des
quêtes cyniques de ressources et d'argent.
Seul
un pape pouvait dire aussi, et à la fois, que ce n'est pas une
guerre au catholicisme et qu'il est bien d'autres victimes :
« Ce saint prêtre, mort au moment même où il
offrait des prières pour toute l’Église est l’une des victimes
de cette guerre. Mais combien de chrétiens, combien d’innocents,
d’enfants ! Pensons au Nigéria, par exemple »4.
Autrement dit, ne gardons pas les yeux fixés sur ce malheureux
vieillard assassiné atrocement, il est aussi bien d'autres victimes
hors d'Europe.
Toute exploitation
politicienne, État par État, de cette violence totale et non
strictement locale est non seulement méprisable mais inutile. C'est
bien pourquoi on ne peut séparer les attentats perpétrés par des
fous manipulés, de ces milliers de réfugiés qui ont voulu « fuir
la guerre et la faim », mais qui n'ont pu forcer la porte de
l'Europe et continuent de faire de la Méditerranée un cimetière.
L'inconscience et la cécité des États européens (sauf l'Allemagne
accusée de laxisme et d'irresponsabilité !) aggravent les
tensions et donnent des arguments aux fauteurs de guerre où qu'ils
soient. La guerre faite par le profit à toute l'humanité nous
transforme en complices des assassins.
Soyons lucides. Ne nous
trompons pas de guerre.
1 Le
pape utilise souvent le terme de "guerre fragmentée" ou
"guerre en morceaux", pour décrire une guerre composée
de différents événements et phénomènes violents à travers le
monde.
2 Cité,
le 28 juillet, par le journal La Dépèche :
3
Cité, le 27 juillet, par le journal La Croix :
4 Cité
le 27 et mis à jour le 28 juillet, par le journal Le Monde :