Ce
n'est pas rejeter les pionniers que de rouvrir un débat qu'on avait
voulu clore en particulier au sein de l'Éducation nationale
française. Au contraire, reconsidérer l'œuvre et la pensée des
créateurs, est plus actuel que jamais.
On
a méprisé l'apport décisif de Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) qui a bouleversé à jamais notre vision de l’enfance, dans L'Émile1,
en 1762, mais aussi dans Julie ou la nouvelle Héloïse2,
roman paru un an plus tôt, en 1761. Les deux livres furent édités
à Amsterdam compte tenu de leurs contenus jugés alors subversifs
dans les milieux traditionalistes.
Avant lui déjà, le Hollandais Erasme, (1469-1536), (qui recommandait l'apprentissage des langues dès la prime enfance) Rabelais (1483-1553), (où, dans son abbaye de Thélème, Gargantua bénéficie d'une éducation ouverte et diversifiée, permettant l'affirmation de soi), ou encore Montaigne (1533-1592), (qui préconisait "plutôt une tête bien faite qu'une tête bien pleine"). De même, au début du XIXe siècle : le Français Joseph Jacotot (1770-1840) ou le Suisse Johann Heinrich Pestalozzi3 (1746-1827), à leur tour, mirent en œuvre des idées voisines de celles de Rousseau. Tous ont prôné l'éducation dans la liberté.
Avant lui déjà, le Hollandais Erasme, (1469-1536), (qui recommandait l'apprentissage des langues dès la prime enfance) Rabelais (1483-1553), (où, dans son abbaye de Thélème, Gargantua bénéficie d'une éducation ouverte et diversifiée, permettant l'affirmation de soi), ou encore Montaigne (1533-1592), (qui préconisait "plutôt une tête bien faite qu'une tête bien pleine"). De même, au début du XIXe siècle : le Français Joseph Jacotot (1770-1840) ou le Suisse Johann Heinrich Pestalozzi3 (1746-1827), à leur tour, mirent en œuvre des idées voisines de celles de Rousseau. Tous ont prôné l'éducation dans la liberté.
Dans
la première moitié du XXe siècle, se sont juxtaposés ou succédés
les travaux (écrits et pratiques) de nombre de pédagogues :
l'italienne Maria Montessori (1870-1952), le Suisse Adolphe
Ferrière (1879-1960), le
Français Ovide Decroly (1871-1932), le Russe Anton Makarenko
(1888-1939), le Polonais Janusz Korczak (1878-1942), le Tchèque
Frantisek Bakule (1877-1957), L'Anglais Alexander Neill (1883-1973),
le Français Célestin Freinet (1896-1966), le Brésilien Paulo
Freire (1921-1997)...
Ces
tenants de l'éducation nouvelle entendaient
« défendre le principe d'une participation active des
individus à leur propre formation, l''apprentissage, avant d'être
une accumulation de connaissances, devant être un facteur de progrès
global de la personne ».
Qu'en
est-il au début de ce siècle ?
Les
écoles Montessori existent. La pédagogie Freinet n'est plus vouée
aux gémonies mais elle n'est ni soutenue ni encouragée. La mise en
cause de l'école elle-même, telle qu'elle fonctionne, s'est
effectuée dès la fin des années 1960,- cf. le célèbre livre Une
société sans école d'Ivan Illich4
(1926-2002) - non sans tentations d'un retour en arrière
autoritariste, mais aussi, à l'inverse, en mettant en avant
qu'apprendre et se consruire ne peut plus, à l'âge de la
communication et de l'informaation demeurer figé par des
pré-supposés obsolètes.
C'est
ce qu'expose brillamment, Céline Alvarez dans son livre très récent
Les lois naturelles de l'enfant5.
Elle y démontre que chaque enfant aime apprendre et veut apprendre
si l'on ne freine pas ses apprentissages. Elle se fonde et sur sa
propre expérience, à Aubervilliers, en classe maternelle, et sur
son exploration scientifique des conditions dont les enfants peuvent
s'emparer du monde où ils baignent. On retrouve, sous sa plume, bien
des constats que les pionniers de l'éducation nouvelle avaient notés
et utilisés entre 1920 et 19396.
La
réapparition du mot : « naturel » (qu'on retrouvait
déjà dans « la méthode naturelle de lecture »
popularisée par Freinet) n'est pas le fait du hasard. Il s'agit
d'admettre, ou pas, que l'éducation se soucie de développer les
ressources de chacun plutôt que d'inculquer le mode de vie dominant.
Rien de neuf dans cette problématique, mais il était grand temps
qu'elle rejaillisse en pleine actualité philosophique et politique !
On
ne sortira ni de l'impasse historique dans laquelle nos pseudos
démocraties occidentales se sont engagées, ni de la soumission aux
oligarchies financières dominantes sans préparer les jeunes
citoyens à penser par eux-mêmes, à élever leur niveau de critique
et leur capacité d'innover. Au XXIe siècle, changeons de regard sur l'éducation.
1
- Jean-Jacques Rousseau, Émile ou de l'éducation,
1762, dernière édition :Paris,
Garnier, 1961, 664 pages.
Consultable
suur Gallica, la bibliothèque numérique de la BNF.
http://gallica.bnf.fr/
2
- .Jean-Jacques Rousseau, Julie ou la nouvelle Héloïse,
Amsterdam, éditeur Marc-Michel
Rey, 1761.
3
- Johann Heinrich Pestalozzi, Léonard
et Gertrude (1781-1787), roman, Bibliothèque numérique
romande, 2014.
4
- Ivan Illich, Une société sans école,P
aris, le Seuil, 1971 (titre original : Deschooling
Society)
5
- Céline Alvarez, Les lois naturelles de l'enfant,
Paris, Les Arènes, 2016.