mercredi 19 octobre 2011

De la minorité majoritaire

Le propre d'une minorité est d'être susceptible de devenir majoritaire. Sinon, elle n'est qu'un groupe numériquement insuffisant pour s'imposer par son seul poids ! Quand ce sont les idées qui circulent, elles peuvent s'enfler ou se dégonfler, selon l'accueil citoyen qui leur est fait.

Une majorité, de surcroît peut être constituée de minorités additionnées défendant, en commun, un intérêt principal.

Enfin, en démocratie, le plus grand nombre, s'il détient le pouvoir, ne détient pas nécessairement la vérité. La leçon historique qui nous fut donnée par le IIIe Reich nazi n'a guère été méditée ! Adolf Hitler ne s'est pas installé par la seule force de de ses nervis ; il a obtenu la victoire électorale par les urnes.

Je retiens de cette très courte analyse que le système démocratique souffre d'un vice à peine caché et, en tout cas, irrémédiable : il laisse diriger ceux qui ont le mieux su séduire le peuple et nullement ceux qui s'appuient sur la volonté populaire.

Le système bipolaire contenu dans le mode de scrutin majoritaire détruit les minorités ou les tient en laisse. Qu'en 2011, il faille encore laisser gouverner, "jusqu'à-la-prochaine-élection" un autocrate entouré d'oligarques et, qui plus est, "au nom du respect de la démocratie", a quelque chose de puéril. La règle démocratique ne consiste plus à contrôler le pouvoir exécutif mais consiste à le rendre intouchable entre deux scrutins. Il s'ensuit le désastre intellectuel, civilisationnel et philosophique auquel rien d'efficace ne peut s'opposer.


Le retour de l'avant...

Sans majorités fluctuantes, sans minorités mouvantes, sans "majorités d'idées", sans limites imposées (dans le temps et l'espace) au pouvoir dévolu à des représentants, la démocratie s'engonce avant de s'ankyloser, puis de s'effondrer parce qu'elle est séchée et donc privée de la circulation de la vie.

Les institutions de la Vème République sont obsolètes et ne laisse aucun espace d'expression aux minorités modestes ou aux majorités dominées. La VIème République devient une urgence mais inutile de la faire naître si c'est pour maintenir un système présidentiel qui personnalise la vie publique et n'encourage pas les citoyens à participer aux décisions dans un esprit de responsabilité.

La démocratie véritable rapproche du consensus et suppose moins de lois, plus de débat et donc plus de temps pour mûrir les décisions.

Nous vivons l'inverse. Il faut décider beaucoup et vite. Ainsi noie-t-on la réflexion des citoyens dans la technicité et la reconnaissance de la nécessité de s'en remettre aux élites. La démocratie, dans cette mâchoire implacable, en sort broyée, parce que les jeux d'opinion, le culte des vedettes politiques remplacent le libre débat. Les Français et, la plupart des citoyens des autres pays démocratiques, se leurrent en pensant disposer des outils du choix. S'ils votent "mal", on les fait revoter (comme on l'a vu en Irlande, en France, aux Pays Bas, en Slovaquie...). Ils n'ont plus à choisir mais n'ont plus qu'à approuver !

Quand l'alternance n'est plus une alternative, il n'est même pas nécessaire de conserver le personnel politique. Ses remplaçants feront à peu près la même politique. Inutile, dans ces conditions, de tenter de passer de la minorité à la majorité : à terme, le résultat sera le même, c'est-à-dire, et de plus en plus ouvertement, obéir à la dictature des marchés.

Qui dirige, contrôle, oriente ces marchés, maîtres de la politique et du sort de l'économie ? On a vu surgir, décennies après décennies; des "agences de notation", des "banques centrales", des Fonds monétaires et autres instruments de gouvernement monétaire et économique auxquels rien ne s'oppose durablement.

Les minorités d'idées sont seules à même de faire évoluer la pensée des citoyens médusés, sous le charme ou sous la peur, qui "croient" que, sans croissance, il n'est pas d'emploi, comme il leur est rabâché. On ne compte plus, alors, que sur la richesse des riches pour disposer des morceaux inégaux mais suffisants d'un gâteau gigantesque en perpétuel agrandissement.

Mais ne voila-t-il pas que nos sociétés, vieillies, arrivent à saturation dans maint secteur de production ! Ce qui devait arriver plus tard se produit. Pour garder les mêmes profits, il faut donc saigner les consommateurs et réduire toujours plus la part du travail par rapport au capital. L'intelligence des roués a trouvé sa limite et le système grince annonçant un prochain blocage.

Il est temps que les minorités s'éveillent, s'agrègent, se concilient et s'accordent sur des compromis durables. Bref, il faut construire des majorités d'un nouveau type qui ne doivent plus grand chose aux partis (minorités parmi les minorités) et beaucoup à elles-mêmes. La démocratie politique n'est rien sans la démocratie économique. Tout autre projet politique ne ferait que rallonger une période où les maîtres et autres privilégiés continueraient de tenir les rênes en nous laissant le rôle multiséculaire de valets obéissants.

Autant mourir tout de suite que pérenniser cette domination inhumaine où les grandes valeurs de 1789 sont oubliées, inutiles et ridiculisées.


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