dimanche 30 mars 2008

Un dimanche qui parle...





..En un mot..., ou en deux!

Dimanche.
Heure.

Bettencourt.
FARC.

Olympie.
Tibet.

Âge.
Centenaires.

Zimbabwe.
Élections.

Oliviers.
Palestine.

Sidaction.
Cancer.

Handicapés.
Revenu.

Hydrolienne.
Bretagne.

Capitalisme.
Gratuité.

Gandrange.
Mittal.

Football.
Racisme.

Médicis.
Élysée.

Tintin.
Vendu.

Lionne.
Zoo.

À jamais unique en l'histoire.
Ce dimanche, avec ses couples de mots,
parle et me parle...
Le sens est sous les mots.
Tout est dit.

samedi 29 mars 2008

Vous avez dit développement durable




La semaine du développement durable, qui est organisée du 1er au 7 avril 2008, est placée cette année sous le signe de la production et de la consommation ...
(La presse)


Vous l'avalerez le concept de développement durable.
Qu'il soit contestable nul n'en a cure.
C'est officiel, je vous dis!
D'abord dès le 1er avril s'ouvre "la semaine du développement durable".
Et ce n'est pas un poisson d'avril.
On risque même d'y entendre dire des choses très intéressantes.
On n'attrape pas les mouches avec du vinaigre!
Nous sommes les mouches.

Jamais l'on ne nous demande qu'est-ce qui est à développer.
On risquerait d'ouvrir le débat sur le contenu de la croissance.

Jamais on ne nous dit ce qui doit durer.
On risquerait d'avouer que c'est le système qu'on veut voir durer.

Le développement ou la croissance sans contenu assassine l'humanité.
Faire durer ce qu'il faut contester, c'est le contraire de l'écologie.

Ce qui doit se développer, c'est le partage de nos richesses.
Et non les richesses qui rapportent à une petite minorité d'humains.

Ce qui doit durer, c'est la planète elle-même.
Et non ce qui est la cause de sa mise en danger.

Muhammad Yunus, prix Nobel de la paix 2006 rappelle que 60% des hommes ne dispose que de 6% des revenus disponibles. Est-ce durable? Non.

On peut approuver l'édito ci-dessous qu'on lit sur le site du Développement durable (1) auquel Yann Arthus-Bertrand apporte son concours et son talent.

" La Terre, notre planète, va mal, et c’est de notre faute.

Les habitants des pays riches, comme la France, consomment et gaspillent énormément. Aujourd’hui, on ne fait même plus la différence entre envie et besoin. Consommer toujours plus, c’est piller toujours plus les ressources naturelles que la planète a mis des millions d’années à créer (air, eau, océans, forêts, terres cultivables, biodiversité, pétrole), et qui ne se renouvellent pas assez vite pour satisfaire la demande croissante… Et rejeter toujours plus de pollutions et de déchets dans l’environnement, qui commence à être saturé…

Cette situation ne peut pas durer : les catastrophes écologiques et sanitaires montrent déjà les limites du système. Et cela ne va faire que s’aggraver : la Terre compte 6 milliards d’habitants ; en 2050, nous serons 3 milliards de plus.

Aujourd’hui, la grande majorité de l’humanité vit toujours dans la pauvreté. Des millions de femmes, d’hommes et d’enfants n’ont ni eau potable, ni électricité, ni éducation, ni assez à manger… Mais si tous les habitants de la terre vivaient comme nous, il faudrait deux planètes supplémentaires pour satisfaire leurs besoins !

Or, nous n’avons pas de planète de rechange. Alors, comment améliorer les conditions de vie de tous les citoyens du monde sans épuiser définitivement la Terre ? Comment satisfaire les besoins des hommes d’aujourd’hui tout en léguant la Terre en bon état aux générations qui l’habiteront après nous ?

En apprenant à économiser et à partager de manière équitable les ressources, en utilisant les technologies qui polluent moins, qui gaspillent moins d’eau et moins d’énergie, et surtout en changeant nos habitudes de consommation et nos comportements. C’est cela, le développement durable. Ce n’est pas un retour en arrière, mais un progrès pour l’humanité : celui de consommer non pas moins, mais mieux. Il est devenu urgent d’agir. Nous en avons tous les moyens. Et surtout, le devoir."

L'ambiguïté n'est pas levée. Qu'est ce qui est cause de ce désastre et que faut-il faire pour en sortir?

J'affirme que si l'on ne recherche pas la démocratie économique, c'est à dire le pouvoir des citoyens sur les marchés, il n'y a pas de solution écologique et il n'y aura ni développement humain, ni humanité durable.

Toute autre tentative pour nous vendre la révolution verte en continuant à promouvoir le développement des profits et en installant le pouvoir des riches de façon durable est mensonge et illusion.

(1) http://www.ledeveloppementdurable.fr/developpementdurable/page/pourquoi.html

vendredi 28 mars 2008

Mai 1968 - Mai 2008 et au-delà...

Il me vient qu'il est nécessaire de préparer mai 2008 et de s'y préparer.
Non pour commémorer.
Non pour un anniversaire!
Non pour "se rappeler".
Pour se mettre en situation d'avoir à repenser ensemble la politique.
Du moins pour essayer.

Car, si l'on devait ne retenir qu'un seul aspect des évènements de mai 68, quel serait-il?
Je crois bien que c'était : tout citoyen pouvait parler et le faisait.
Dans chaque lieu de vie, professionnel, familial ou de quartier, on parlait.
Et l'on ne parlait pas, le plus souvent, pour ne rien dire.
Ceux qu'on n'entendaient jamais... parlaient.
Ceux qui doutaient toujours de tout... espéraient.
Ceux qui "ne faisaient pas de politique"... en faisaient.

Quand la politique déborde du cercle où s'enferment les politiciens, la vie change.
Le temps où la politique cesse d'être l'affaire de ceux qui en vivent va-t-il se représenter?
Que ce soit en mai 2008, ou en décembre 2010, peu importe.
Ce qui s'entraperçoit, c'est que mai 68 n'est pas derrière nous.
L'évènement peut surgir; ce n'est pas sûr; ce n'est plus impossible.

Pourquoi?
Parce qu'un besoin de parole citoyenne se manifeste partout.
Parce que la tentative de mise aux archives des succès de luttes historiques est engagée.
Parce que la riposte des partis politiques de "gauche" à cette libéralisation de l'économie, au profit de ceux qui en sont déjà les bénéficiaires, est totalement insuffisante.
Parce que les organisations syndicales sont trop faibles.
Parce que le stress au travail, la violence contre les salariés, détruit des familles.
Parce que le système bancaire, économique et financier entre dans une crise longue.
Parce que l'écologie politique s'empare de la politique mondiale.
Parce qu'aucun homme ne peut se construire dans la résignation.

Que va-t-il se passer?
Beaucoup répugnent à agir sans savoir où aller...
C'était déjà, en 1968, ce qui engendrait la défiance des institutionnels de la politique et du syndicalisme.
C'est ce que la jeunesse ne craint pas, car l'avenir lui semble a priori ouvert.
C'est ce que les exploités ne craignent pas, dès qu'ils estiment que rien ne peut être pire que ce qu'ils vivent.
C'est ce que les pauvres ne craignent pas, si l'avenir s'annonce un peu moins dur.
Ce qui va se passer n'est plus hexagonal : l'espèce humaine se sait menacée et va réagir.
Quand et comment? Nul ne peut encore le savoir.

Mais se préparer à la mondialisation de la conscience politique s'impose.
Ce n'est pas une affaire de forme.
Ce n'est pas une affaire de partis.
Ce n'est pas une affaire d'élections.
Ce n'est pas une affaire de défense-du-pouvoir-d'achat!
C'est une question de survie.
Survie de la politique avalée, absorbée, phagocytée par l'économique.
Survie des habitants de la planète, bêtes et gens, placés sous la loi d'airain du Capital.

Se préparer à l'autre temps, l'autre politique, l'autre monde, n'a pas commencé hier.
Préparer mai 2008 n'est pas préparer un retour.
Ce n'est pas préparer un mois de retrouvailles, de rappels et de réminicences.
Avec l'espoir que ça re-vive et re-parte!
Non, c'est supprimer le "r", le "re" des mots qui re-commencent.
Le neuf ne jaillit pas à la commande!
Il ne surgit pas de la volonté de quelques uns.
Il se manifeste quand la parole déborde et que le peuple s'exprime.
Et cela ne se produit que quelques fois par siècle.

Nous sommes très prêts, ou encore loin, d'un nouveau bouleversement historique.
On ne déclenche pas de telles émergences de la conscience populaire.
On n'a ni le droit de se contenter d'y croire!
Ni celui de la voir passer sans s'y associer.
C'est cela être prêt : savoir que les conditions de l'événement sont désormais remplies.

Contribuer à mettre le feu dans le champ des possibles suppose qu'on commence, tout de suite, à projeter des étincelles sur la paille des mots.
Rien ne vaut tant que de chercher, penser, proposer, essayer, se rencontrer, se parler, s'écouter.
Dans la flambée des échanges, hier encore on ne voyait guère matière à changements.
Mais nous n'en sommes plus là.
Nous n'en sommes pas pour autant à l'aube du jour annonçant un Grand Soir!
L'événement ne sera pas rapide et brutal; il sera lent et presque invisible. Quotidien.
Du reste, il ne sera pas... Sans que nous le sachions, il est déjà engagé.

Il faut lire lire, mais avec tout son esprit critique, ce livre décapant; il n'annonce pas l'avenir; il révêle que d'autres façons de penser la politique existent :



Comité invisible, L'insurrection qui vient, éditions La Fabrique, Paris; 2007.

jeudi 27 mars 2008

Désespoir démocratique

Entre ici, Alba Rico Santiago.
Toi, le philosophe espagnol.
Je t'accueille et te donne à lire.

Mercredi 19 mars 2008

Je ne condamne pas le roi Fahd, honoré par le roi d’Espagne, qui taille les têtes, coupe les mains et arrache les yeux, qui humilie les femmes et bâillonne les opposants, qui fait l’important en l’absence de presse, de parlement et de partis politiques, qui viole les Philippines et torture Indiens et Egyptiens, qui dépense le tiers du budget de l’Arabie Saoudite entre les 15.000 membres de sa famille et finance les mouvements les plus réactionnaires et violents de la planète.

Je ne condamne pas le général Dustum, allié des USA en Afghanistan, qui a asphyxié dans un container mille prisonniers talibans auxquels il avait promis la liberté y qui sont morts en léchant les parois métalliques de leur prison.

Je ne condamne pas la Turquie, membre de l’OTAN et candidat à l’UE, qui a rayé 3.200 villages kurdes de la surface de la terre dans les années 90, qui a laissé mourir de faim 87 prisonniers politiques et emprisonne celui qui ose transcrire en Kurde le nom de leurs villes.

Je ne condamne pas le sinistre Kissinger, l’assassin le plus ambitieux depuis Hitler, responsable de millions de morts en Indochine, au Timor, au Chili et dans tous les pays dont le nom lui est sorti de la bouche.

Je ne condamne pas Sharon, homme de paix, qui dynamite les maisons, déporte les civils, arrache les oliviers, vole l’eau, mitraille les enfants, pulvérise les femmes, torture les otages, brûle les archives, fait exploser les ambulances, rase des camps de réfugiés et caresse l’idée « d’extirper le cancer » de trois millions de Palestiniens pour renforcer la pureté de son état « juif ».

Je ne condamne pas le roi Gienendra du Népal, éduqué aux USA, qui le mois dernier a exécuté sans jugement 1.500 communistes.

Je ne condamne ni la Jordanie ni l’Egypte qui bastonnent et emprisonnent ceux qui manifestent contre l’occupation de la Palestine par Israël.

Je ne condamne pas le Patriot Act ni le programme TIPS, ni la disparition de détenus par le FBI, ni la violation de la Convention de Genève à Guantanamo, ni les tribunaux militaires, ni la « licence pour tuer » accordée à la CIA, ni la fouille de tous les touristes qui entrent aux USA en provenance d’un pays musulman.

Je ne condamne pas le coup d’Etat au Venezuela ni le gouvernement espagnol qui l’a appuyé, ni les journaux qui, ici et là, ont financé, légitimé et applaudi à la dissolution de toutes les institutions et la persécution armée des partisans de la Constitution.

Je ne condamne pas la compagnie états-unienne Union Carbide qui, le 2 décembre 1984, a assassiné 30.000 personnes dans la ville indienne de Bhopal.

Je ne condamne pas l’entreprise pétrolière états-unienne Exxon-Mobil accusée de séquestrer, de violer, de torturer et d’assassiner des dizaines de personnes qui vivaient dans un édifice propriété de la compagnie dans la province de Aceh (Indonésie).

Je ne condamne pas l’entreprise Vivendi qui a laissé sans eau tous les quartiers pauvres de La Paz, ni Monsanto qui a laissé sans semence les paysans de l’Inde et du Canada, ni Enron qui, après avoir plongé dans le noir une demi-douzaine de pays, a laissé 20.000 personnes sans le sou.

Je ne condamne pas les entreprises espagnoles (BBVA, Endesa, Telefonica, Repsol) qui ont vidé les caisses de l’Argentine, obligeant les Argentins à vendre leurs cheveux aux fabricants de perruques et à se disputer un cadavre de vache pour pouvoir manger.

Je ne condamne pas la maison Coca-Cola qui est entré en Europe dans l’ombre des tanks nazis et qui licencie, menace et assassine aujourd’hui des syndicalistes au Guatemala et en Colombie.

Je ne condamne pas les grands laboratoires pharmaceutiques qui se sont mis d’accord pour tuer 20 millions d’Africains malades du SIDA.

Je ne condamne pas l’ALCA qui viole et dépèce les ouvrières des « maquilladoras » de Ciudad-Juarez et fait naître des enfants sans cerveau à la frontière du Mexique avec les USA.

Je ne condamne pas le FMI ni l’OMC, providence de la famine, de la peste, de la guerre, de la corruption et de toute la cavalerie de l’Apocalypse.

Je ne condamne ni l’UE ni le gouvernement des Etats-Unis qui placent les accords commerciaux au-dessus des mesures pour la protection de l’environnement et qui ont décidé, sans referendum ni élections, l’extinction d’un quart des mammifères sur Terre.

Je ne condamne pas les tortures sur Unai Romano, jeune Basque qui, il y a un an, fut transformé en ballon tuméfié dans un commissariat espagnol, défiguré à un tel point que ses parents le reconnurent uniquement à un grain de beauté sur son visage.

Je ne condamne pas le Gouvernement espagnol qui, au mois d’avril, a mis en place l’état d’exception sans consulter le Parlement et a suspendu pendant trois jours les droits fondementaux de notre Constitution (liberté de mouvement et d’expression), avec la circonstance aggravante que les Basques ne pouvaient se rendre à Barcelone à l’occasion du dernier sommet de l’UE.

Je ne condamne pas la loi sur les Etrangers qui expulse les hommes faibles et affamés, les enferme dans des camps de rétention ou les prive du droit universel à l’assistance sanitaire et à l’éducation.

Je ne condamne pas le « coup de décret » qui précarise encore plus l’emploi, supprime les aides et laisse les travailleurs, comme des feuilles mortes, à la merci des caprices du vent des patrons.

Je ne condamne pas, cela va de soi, Dieu quand il pleut, quand la foudre tombe ou que le tonnerre gronde, ni quand la terre tremble ou qu’un volcan crache ses flammes.

Je suis un démocrate : peu m’importe la mort d’enfants qui ne sont pas espagnols ; peu m’importe la persécution, le silence sur l’assassinat de journalistes et d’avocats qui ne pensent pas comme moi ; peu m’importe l’esclavage de deux millions de personnes qui ne pourront jamais acheter un de mes livres ; peu m’importe les atteintes aux libertés du moment que c’est moi qui manie en toute liberté les ciseaux ; et peu m’importe la disparition d’une planète sur laquelle je me suis tant amusé.

Je suis un démocrate : je condamne l’ETA, ceux qui l’appuient ou qui gardent le silence, même s’ils sont muets de naissance ; et j’exige, en outre, qu’on prive de leurs droits de citoyens 150.000 Basques, qu’on les empêche de voter, de manifester et de se réunir, qu’on ferme leurs bars, leurs journaux, et même leurs halte-garderie ; qu’on les mette vite en prison, eux et tous leurs camarades (du jeune militant anti-globalisation à l’écrivain affirmé) et si ce n’est pas suffisant pour protéger la démocratie, qu’on demande l’intervention humanitaire de nos glorieuses forces armées, déjà auréolées de la reconquête de l’île Perejil. Je suis un démocrate car j’ai condamné l’ETA.

Je suis un démocrate et je ne condamne que l’ETA. Je fais donc partie de toutes les autres bandes armées, les plus sanguinaires, les plus cruelles, les organisations terroristes les plus destructrices de la planète.

Je suis un démocrate. Je suis un connard.

Santiago Alba Rico
Ecrivain et philosophe

Source : http://www.legrandsoir.info/spip.php?page=imprimer_article&id_article=6180

lundi 24 mars 2008

Un Sous préfet qui n'est plus en odeur de sainteté.

Bruno Guigue, sous-préfet de Saintes est écarté de ses fonctions et redevient un simple administrateur civil. Le fait est rarissime!

Le ministère de l'Intérieur a démis Bruno Guigue, pour avoir manqué à son devoir de réserve en publiant une tribune anti-israélienne sur le site Web oumma.com. Dans ce texte intitulé «Quand le lobby pro-israélien se déchaîne contre l'ONU», l'ex-sous-préfet précise qu'il répond à un point de vue publié par Le Monde. Il y écrit qu'Israël est «le seul Etat au monde dont les snipers abattent des fillettes à la sortie des écoles» et ironise sur «les geôles israéliennes où, grâce à la loi religieuse, on s'interrompt de torturer durant le Shabbat».

Entrant dans sa 48ème année, exerçant ses fonctions de sous-préfet, depuis peu de temps, Bruno Guigue, le sous-préfet limogé par Michèle Alliot-Marie, est un contributeur prolixe de plusieurs sites internet et revues, qui vont de Oumma.com -où il a publié la tribune anti-israélienne qui lui vaut d'avoir été sanctionné- à la revue ETUDES, animée par les jésuites français. Le sous-préfet limogé, fait valoir ce 24 mars, dans Le Parisien, qu’il fait "des analyses géopolitiques depuis dix ans", "en dehors de ses fonctions". Il a publié cinq ouvrages aux éditions de l'Harmattan.

L'objet de la discorde est la critique de la pétition publiée dans Le Monde du 28 Février dernier. Les signataires y attaquaient Mme Louise Arbour la déléguée de l’ONU pour les Droits de l’Homme, pour son voyage en Iran. La pétition publiée par la LICRA (Ligue Internationale contre le racisme et l’antisémitisme), était soutenue par Elisabeth Badinter, Pascal Bruckner, Georges Charpak, Bernard Debré, Alain Finkelkraut, Claude Goasguen, Patrick Kessel, Claude Lanzmann, Corinne Lepage, Albert Memmi, Antoine Spire, Pierre-André Taguieff, Michèle Tribalat, Elie Wiesel...

Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette décision gouvernementale :

1 - Bruno Guigue est soit naïf soit inconscient : il ne pouvait ignorer qu'il susciterait les réactions de sa tutelle et la critique, vigilante, des "amis d'Israël", qui ne laissent rien passer.
2 - La liberté de pensée ne peut être le fait d'un "serviteur de l'État". Dont acte.
3 - Il n'est pas sans conséquences de critiquer Israël, en France, actuellement.
4 - Le Gouvernement Sarkozy, plus que les précédents, est très solidaire de la politique de l'État hébreu.
5 - Les affirmations de Bruno Guigue sur les snippers de Tsahal et la torture dans les prisons israéliennes, réaffirmées par d'autres sources (1) depuis des mois , ne peuvent être lancées comme cela, dans l'opinion publique, sans passer pour une provocation! Il faut davantage prouver ce qu'on dit.
6 - Le texte de l'ex Sous-préfet, long et touffu, mêle plusieurs thèmes et perd, pour cela, de la crédibilité. Ce qu'il contient est trop grave pour autoriser de telles erreurs de communications.
7 - Le débat sur antisionnisme et antisémitisme est fort loin d'être clos.
8 - Critiquer Israël peut pourtant ne pas chercher à l'abattre mais à le sauver.
9 - L'antisémitisme est parfois nourri par les pro-Israéliens eux mêmes!
10 - Les Juifs, compte tenu de ce qu'ils ont subi, sont les mieux placés, parmi les hommes des générations de la période 1930-2030, pour ne pas sombrer dans la violence, violence d'État ou violence verbale. Alors pourquoi?

Hier, jour de Pâques, un document intitulé "Déclaration de Sanaa", évoquant la possibilité de "revenir à la situation palestinienne antérieure aux événements de Gaza, afin de confirmer l'unité de la patrie palestinienne en tant que terre, peuple et autorité", avait été signé au cours d'une cérémonie dans la capitale yéménite par Azzam al-Ahmad, chef du groupe parlementaire du Fatah, et le numéro deux du bureau politique du Hamas, Moussa Abou Marzouk, en présence du président yéménite Ali Abdallah Saleh. Ayman Taha, porte-parole du Hamas à Gaza, a déclaré dimanche que les leaders du Hamas et de son rival le Fatah ont accepté au Yémen de reprendre le dialogue le 5 avril et, cette fois, dans les territoires palestiniens.

Ce matin Israël, constatant une tentative de rapprochement entre le Fatah, qui domine en Cisjordanie, et le Hamas, qui s'est imposé à Gaza, menace de rompre tous pourparlers de paix. Il est donc, tout simplement, exigé des Palestiniens de Mahmoud Abbas (ces anciens Palestiniens "terroristes", fidèles d'Arafat) de choisir entre Israël et le Hamas (constitué de nouveaux Palestiniens "terroristes"). Sinon...

Il est des paroles indécentes prononcées ailleurs qu'en France, ailleurs qu'à Saintes, qui pèsent bien plus lourd que ce qu'a écrit Bruno Guigue.

(1) Voir, par exemple : http://www.legrandsoir.info/spip.php?article6117

dimanche 23 mars 2008

Catholicisme pascalien

Pâques 2008.

L'hebdomadaire La Vie fait connaître les noms de 200 personnalités catholiques. Comme de loin en loin, un sondage y révêle, également, la sensibilité politique majoritaire au sein de l'Église. Sans surprise, on constate qu'elle penche nettement à droite. Il n'est pas étonnant que, dans ces conditions, les Présidents de la République française soient, aient été ou se disent ... catholiques. Aujourd'hui, c'est Nicolas Sarkozy, le chanoine, qui figure parmi les 200 célébrités chrétiennes.

Je ne sais plus si l'on peut être catholique en appartenant à une organisation politique de gauche (surtout quand la gauche n'est plus que la non-droite), mais ce que je sais bien, et depuis longtemps, c'est qu'il est aussi difficile à un catholique d'être à droite qu'à un chameau de passer par le chas d'une aiguille.

On m'objectera immédiatement que le Christ dit que c'est "le riche" à qui cette insurmontable difficulté apparaît et non pas n'importe quel catholique! J'en conviens à ceci près : il n'est pas plus catholique de soutenir les riches que de l'être. Il est même plus cohérent d'être riche sans être solidaire des riches (tout arrive!) que d'être pauvre et n'avoir qu'un seul désir : être riche!

Mais il y a plus : choisir la Semaine Sainte, entre le Vendredi saint et le jour de Pâques, pour annoncer, d'une part, la mise à l'eau du sous-marin Le Terrible et, d'autre part, l'envoi de soldats français en Afghanistan, ne me semble pas, de la part de Nicolas Sarkozy, très catholique. Ne chargeons pas sa barque; elle coule déjà; et notre Président ne marche pas sur l'eau... Ce qui est le plus effroyable et révoltant pour qui a jamais entendu parler de l'Évangile, c'est que les catholiques et plus largement la plupart des chrétiens, fassent exactement ce qu'il faut pour éloigner les hommes des Églises et pour enlever tout leur sens aux paroles du Christ.

Car quoi, qu'est-ce que Pâques? La fête du chocolat? La fête du printemps? Ou la fête du crucifié?

Et qui est crucifié? Jésus de Nazareth, qui s'affirme Fils de l'Homme. Celui en qui l'on peut retrouver chaque victime des violences humaines. Celui qui dit non à cette violence, mais aussi à l'argent et au pouvoir et qui le fait savoir au guerrier, comme au riche et au puissant. Certes, on peut être exécuté, mis en croix pour moins que cela! Surtout quand on recommande aux hommes du monde entier de ne pas servir deux maîtres (Dieu et l'argent -1-), de ne pas se saisir de l'épée (parce que celui qui prend l'épée périra par l'épée -2-) et de ne pas s'attacher au pouvoir (parce que le Royaume n'est pas de ce monde -3-).

La croix n'est pas un symbole, la marque d'une religion, ou bien c'est le symbole de tous les instruments de torture et de mise à mort dont se servent les détenteurs de la "violence légitime", celle qui est l'apanage de tout État, dit Max Weber. C'est l'outil par lequel on se débarrasse de ceux qui osent tenter de substituer l'amour à la force. La corde, la roue, le bûcher, la hache, le glaive, la chaise électrique, la seringue, la guillotine ou le fusil : voilà les noms dont on aurait pu, tout au long de l'histoire, se servir pour désigner la Croix!

Pâques est le jour où celui qui trouve sens à ce que disait et dit encore Jésus Christ fait exploser son espérance à la figure des bourreaux.

Pâques est le jour, sinon n'en parlons plus, où la propriété est niée et la gratuité louée, (ainsi que l'avaient compris et vécu les premières communautés chrétiennes -4- & -5-). Le communisme qui a d'ailleurs cessé d'être marxiste et athée, ou mieux, le partage, (méfions nous des ismes!), ne peut qu'être une valeur fondamentale de toute foi de chrétien!

Pâques est le jour où le Roi, affublé d'un manteau rouge et d'une couronne d'épines, ridiculisé, bafoué puis mis à mort, triomphe sans monter sur aucun trône, victorieux non par les armes mais par cette provocation des limites humaines que constitue l'affirmation scandaleuse et, au sens propre incroyable, selon laquelle l'amour est plus fort que la mort.

Ou bien Päques, c'est celà et le catholicisme "de droite" est une incongruïté, ou bien il n'y a, désormais ni foi ni Églises qui vaillent.

Qu'il ait fallu plus de 2000 ans pour revenir à cette évidence que la religion peut tuer la foi a quelque chose d'inouï et tout de même de réconfortant. La chape de plomb historique n'a pas tout écrasé. Et George Bush peut, au nom de la défense de la civilisation chrétienne, affirmer qu'il continuera à tuer jusqu'à la victoire, il n'y a rien, strictement rien, de commun entre ce christianisme-là, promis à la disparition, et ce que chaque homme peut retirer pour sa vie, de la parole insupportable de Jésus Christ : oui, le plus pauvre, le plus faible, le plus impuissant des hommes est le seul qui peut dire que le monde lui appartient!

-1- "Nul domestique ne peut servir deux maîtres: car ou il haïra l'un et aimera l'autre, ou il s'attachera à l'un et méprisera l'autre. Vous ne pouvez servir Dieu et le Richesse". (Luc 16, 13).
- 2- "Celui qui prend l'épée périra par l'épée". (Matthieu, 26, 51-52).
- 3- " Mon royaume n'est pas de ce monde. Si mon royaume était de ce monde, mes gens auraient combattu pour que je ne sois pas livré aux Juifs. Mais mon royaume n'est pas d'ici ". (Jean 18, 36).
-4-"Tous les croyants, ensemble, mettaient tout en commun; ils vendaient leurs propriétés et leurs biens et en partageaient le prix entre tous, selon les besoins de chacun" (Actes des Apôtres, 2, 45)
-5- « Comment s’enrichissent les possédants, sinon en accaparant les choses qui appartiennent à tous ? Si chacun ne prenait que selon ses besoins, laissant le reste aux autres, il n’y aurait ni riches ni pauvres ». (Saint Basile de Césarée, au 4e siècle).

samedi 22 mars 2008

Le cumul de mandat, un déni démocratique




"Je suis contre tout cumul, y compris un simple mandat d'adjoint ou même de conseiller municipal. Cette exception française est ridicule, et en plus elle crée l'abstention". Pierre Mazeaud (Président du Conseil Constitutionnel, jusqu'en février 2007).

Savez-vous que 81 % des sénateurs et 85% des députés français cumulent leur état de parlementaire avec un autre mandat électif? La France est le seul grand pays développé à connaître une telle situation. Ailleurs en Europe, le cumul est soit interdit juridiquement, soit découragé financièrement, soit tout simplement inexistant en pratique. Or, cette situation aggrave le déséquilibre entre pouvoirs au détriment du Législatif et elle nourrit la désaffection du citoyen pour la chose politique.

Les 36 783 nouveaux conseils municipaux viennent d'élire leurs maires; les nouveaux Conseils Généraux (sur 96) ont élus leurs Présidents. Bientôt seront élus les exécutifs des 14 Communautés urbaines, des 169 Communautés d'agglomération et des 2400 Communautés de Communes. Nombre d'entre ces élus, chefs de collectivités territoriales, qu'on peut alors qualifier de "cumulards" font partie des 577 députés (dont 555 en métropole) ou des 331 sénateurs (qui seront 343 en septembre 2008 et 348 en 2011) . Certains siègent dans l'une des 22 régions, voire les président (6 députés et 2 sénateurs sur les 22 Présidents!).

Seulement 68 députés sur 577 et, également, 68 sénateurs sur 331 s'en tiennent à leur mandat national!
En 2007, 269 députés et 120 sénateurs étaient maires.
D'une République à l'autre, et dépit des derniers textes parus, le cumul n'a cessé de croître (35,7% sous la IIIe république, 42% sous la IVe république, 85% sous la Ve république).
En Europe, le taux de cumul est beaucoup plus faible : 16% en Italie, 15% en Espagne, 13% en Grande Bretagne, 10% en Allemagne. (1)

S'ajoutent à ces fonctions, locales ou nationales cumulées, des appartenances :
- aux 12 149 syndicats à vocation unique (SIVU), créés par la loi du 22 mars 1890, (74 % de tous les syndicats d'élus).
- aux 1501 (fin 2006) syndicats à vocation multiple (SIVOM), créés par l’ordonnance du 5 janvier 1959, (soit 9,2 % de l’ensemble des syndicats)
- aux 2 749 (en novembre 2006) syndicats mixtes , créés par le décret du 20 mai 1955, qui permettent l’association de communes avec des départements, des régions ou des établissements publics, à la différence des SIVU ou SIVOM n’associant que des communes entre elles, (soit 16,8 %, sur un total de 16 399 syndicats -SIVU, SIVOM et mixtes-).

Il y aurait là de quoi confier des responsabilités effectives à bien des élus mais, en vérité, le pouvoir appelant le pouvoir, nombre des élus des grands exécutifs cumulent! Le phénomène est très français.



Il existe, certes, de nombreuses limitations au cumul de mandat, intervenues depuis le début du siècle, mais des limitations relatives qui sont loin encore de conduire vers le mandat unique! Ainsi lit-on dans la loi :

"Les principales règles sur la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions électives ont été posées par la loi organique n° 2000-294 du 5 avril 2000 relative aux incompatibilités entre mandats électoraux (qui traite de la situation des parlementaires nationaux) et par la loi n° 2000-295 du 5 avril 2000 relative à la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions électives et à leurs conditions d'exercice (qui a trait aux incompatibilités applicables aux élus locaux, aux représentants au Parlement européen et aux incompatibilités entre fonctions exécutives locales).

Outre que le cumul des mandats de député et de sénateur est interdit (article L.O. 137 du code électoral), un député ou un sénateur ne peut plus cumuler son mandat parlementaire avec celui de représentant au Parlement européen (article L. O. 137-1). Sauf cas de contentieux, ces incompatibilités sont automatiques dans la mesure où elles prennent effet dès l'élection qui place l'élu en situation de cumul de mandat, sans délai d'option.

Est également incompatible avec l'exercice d'un mandat parlementaire l'exercice de plus d'un mandat local parmi les mandats de conseiller régional, conseiller à l'assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris, conseiller municipal d'une commune d'au moins de 3 500 habitants (article L.O. 141). S'agissant des modalités de cessation des incompatibilités, le régime applicable aux députés et aux sénateurs se caractérise par la liberté de choix et, à défaut d'option, par la déchéance du mandat le plus récent. Un parlementaire qui acquiert un mandat le plaçant en situation d'incompatibilité dispose d'un délai de trente jours à compter de la date de l'élection qui l'a placé dans cette situation ou, en cas de contestation, de la date à laquelle le jugement confirmant cette élection est devenu définitif, pour démissionner du mandat de son choix. A défaut d'option, son mandat acquis le plus récemment prend fin de plein droit.

Un parlementaire national peut toujours exercer une fonction exécutive locale parmi les fonctions de président de conseil régional, président du conseil exécutif de Corse, président de conseil général, maire ou maire d'arrondissement.

Un représentant au Parlement européen, outre qu'il ne peut pas être dans le même temps titulaire d'un mandat parlementaire national, ne peut exercer plus d'un mandat électoral parmi les mandats de conseiller régional, conseiller à l'Assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris ou conseiller municipal d'une commune d'au moins 3 500 habitants. Un élu local ne peut, quant à lui, être titulaire de plus de deux mandats électoraux parmi les mandats de conseiller régional, de conseiller à l'Assemblée de Corse, de conseiller général, de conseiller de Paris, de conseiller municipal (quelle que soit la taille de la commune), et de conseiller d'arrondissement.

Les fonctions de président de conseil régional, président du conseil exécutif de Corse, président de conseil général, maire (quelle que soit la taille de la commune), maire d'arrondissement sont strictement incompatibles entre elles."

Il est vrai qu'il est d'autres incompatibilités :

avec des fonctions publiques non électives : membre du Conseil constitutionnel, du Conseil économique et social, du Conseil supérieur de la magistrature, du Conseil supérieur de l’audiovisuel, d’un conseil de gouvernement d’une collectivité d’outre-mer, magistrat, fonctionnaire autre que de l’enseignement supérieur;
avec des activités professionnelles qui pourraient engendrer des conflits d’intérêts (direction d’entreprises nationales, d’établissements publics nationaux, d’entreprises travaillant avec l’État ou les collectivités publiques, avocat plaidant contre l’État ou la puissance publique).

Cependant, il existe en France une logique du cumul qui procure aux élus un ensemble de ressources renforçant leur capital politique. L’acquisition d’un autre mandat permet d’obtenir généralement un meilleur statut social. Elle est l'un des indicateurs de la réussite de l’élu et garantit une accumulation de rémunérations matérielles (cumul des indemnités) et d’avantages symboliques. La logique du cumul repose sur quelques affirmations véridiques ou non, mais auxquelles les élus sont sensibles :

. Le cumul accroît la popularité. Il existe une prime au cumulard dans toutes élections. (aux législatives, on note que généralement 80% des candidats et plus de 90% des élus disposent déjà d’un mandat). Cette prime s’explique par la nature majoritaire du scrutin.

. Le cumul permet de maîtriser le marché politique. Le cumulard dispose d’une double légitimité surtout s’il détient un mandat local et un autre national. De plus et en absence de véritable statut de l’élu, la multiplication des mandats offre une « sécurité » professionnelle. Utilisation stratégique du cumul.

. Le cumul articule échelon local et national. Un avantage fonctionnel évident. Une ambivalence bénéfique. L’utilisation d’un mandat pour assurer le bilan de l’autre.

La conception française de l’autorité n'est pas étrangère à ces dérives catastrophiques! Selon la conception française de l’autorité, le Chef de l’Etat est un monarque. Oui, le pouvoir en France reste d’essence monarchique : peu de pays rassemblent autant de pouvoir entre les mains d’un seul : président de région, préfet, maire...

Ce système centralisé est en grande partie dysfonctionnel et a conduit au développement parallèle des réseaux qui assouplissent la gestion du pouvoir. La conjonction de ces deux éléments est un caractéristique de l’autorité en France : détention du pouvoir et appartenance à un ou plusieurs réseaux qui accroît l’influence et le contrôle.

De la sorte, le cumulard développe son autorité dans trois dimensions : verticalement (position de pouvoir dominante dans un champ), horizontalement (occupation de plusieurs points stratégiques dans des champs), temporellement ( le cumul renforce la longévité politique). (2)

Les élus dits de gauche ne sont pas plus que d'autres insensibles aux sirènes des pouvoirs. Il leur en faut plusieurs. les plus hostiles, par principe au cumul finissent par y céder, comme on le voit avec le député-maire Noël Mamère et, à présent, la sénatrice-maire : Dominique Voynet.

Inutile de se gargariser avec des discours démocratiques! Sans un recul très significatif des cumuls, le pouvoir politique demeurera entre les mains des élites professionnalisées, trop intéressées par les avantages de ces situations pour vouloir en changer. La démocratie véritable attendra. Stop au cumul de mandats!

(1) www.lemonde.fr/web/infog/0,47-0@2-3224,54-870233,0.html
(2) http://www.re-so.net/article.php3?id_article=565


vendredi 21 mars 2008

Quarante ans après, les croquemorts ...

Oui, quarante ans après, les croquemorts sont à l'ouvrage :
On autopsie le corps de Chantal Sébire.
On enterre mai 68.
On commémore le cinquième anniversaire de l'entrée en guerre des USA en Irak.
On sort Le Terrible, la grande machine à tuer sous marine.

Qui a décidé d'ouvrir le corps de celle qui voulait mourir? Le Procureur de la République? En agissant sous quelle influence, en obéissant à quel ordre? Celle d'un ministre de la République sarkozienne? L'enseignante avait-elle voulu échapper à la Loi? La loi la rattrape elle, et tous ceux qui se sont mis, qui se sont voulus, qui se sont pensés, en cette circonstance particulière, hors la Loi. Indigne, odieuse, inacceptable décision de ceux à qui tout appartient, y compris les cadavres. Fallait-il donc savoir! Au-dessus d'un institut-médico légal, des charognards, des croquemorts, guettent .

Qui donc se répand sur les ondes pour expliquer que mai 68 appartient à un siècle révolu et n'a plus rien à voir avec notre vie? Des disciples de Nicolas Sarkozy? Même pas. Seulement des journalistes et des intellectuels, plus ou moins sincères, qui expliquent finalement que la page est tournée. Mais, s'il faut tuer mai 68 tous les 6 mois, c'est qu'il vit! Du "frisson existentiel" (selon le mot de Patrick Rotman) qui pourrait, de nouveau, s'emparer des peuples, on ne sait où, on ne sait quand, simplement parce que le neuf est toujours à l'affut dans les sociétés, rien n'est vraiment dit! Il n'y a rien à dire, d'ailleurs, ceux qui cherchent les voies nouvelles n'intéressent pas les médias. Mais, à force de tuer ce qu'on dit mort, on finit par re-susciter une foule de citoyens bien vivants. Tant pis pour les croquemorts.

La boucherie irakienne, commencée voici exactement cinq ans, et ses dizaines de milliers ou centaines de milliers de morts (le nombre fait débat, mais on "ne" compte que les 4000 malheureux G.I disparus) ne sert pas d'avertissement... Pas davantage qu'en 1991, la "Tempête du désert" avait déjà fait d'innombrables victimes auxquelles s'étaient ajoutées celles de l'embargo. Comptabilité de croquemort.

Qui, en cette veille de commémorations, va aller montrer la "vraie" grandeur de la France sortant son quatrième sous-marin nucléaire? Celui qui a reçu le médecin de Chantal Sébire au moment où elle quittait ce monde, celui qui a annoncé qu'il fallait en finir avec mai 1968, celui qui solidarise la France avec les USA de George Walker Bush, celui que submerge la volonté de puissance représentée par Le Terrible, (honte, à mes yeux, de cette France dont l'arsenal nucléaire coûte... 3 milliards d'euros par an). Mais sans doute défendons nous la civilisation. Celle des croquemorts.

Oui, celui qui symbolise, parfois y compris à son insu, cette politique de croquemorts où l'on place le corps des hommes dans des machines, institutionnelles, symboliques ou politiques qui ne leur laissent aucun espoir d'une vie autre, celui dont je voudrais tant taire le nom, c'est de nouveau le Bouffon, qui, quoi qu'on fasse, est là pour nous rappeler que nous ne nous appartenons pas, que nos esprits, comme nos corps, resteront sous l'empire de l'État.

La résistance, c'est cela aussi : la volonté de vivre sans se soumettre aux croquemorts.


jeudi 20 mars 2008

Chantal Sébire : n'oublions pas ce nom...

Chantal Sébire, cette femme défigurée par une tumeur, à la voix claire, intelligente, est morte hier, après qu'on lui ait refusé, lundi, un suicide assisté.
Les journalistes se sont emparés du "sujet" et nous inondent de commentaires plus ou moins pensés sur l'euthanasie.
Eh bien moi je n'entre pas dans ce faux consensus.
Le droit de chacun à quitter la vie n'est pas un droit légal.
Le suicide est si peu un crime qu'on ne peut jamais punir ceux qui y ont recours (et ne se ratent pas...).
Qu'André Gorz ou Roger Quillot, l'un et l'autre accompagnés de celle qu'ils aimaient, aient choisi leur mort a fait moins écrire.
On en vient à se demander si la presse ne regrette pas que Chantal Sebire ait, un peu tôt, mis fin au débat!
On confond le "tu ne tueras pas" et le "tu ne te tueras pas".
Nos démocraties ont du mal à supporter que quelque chose échappe à l'État de droit.
La loi doit donner des limites à la loi.
Qui ne sait que la légalisation de l'euthanasie peut générer des meurtres en série?
A-t-on oublié l'eugénisme qui a conduit non seulement dans les États criminels comme l'Allemagne nazie, mais au sein d'États parfaitement dignes comme la Suède, à l'élimination d'incurables ou d'handicapés gravement touchés?
Je chante, ici, une chanson à contre-ton. Tant pis. Je l'avoue : j'ai peur de l'homme.
Du massacre des innocents aux chambres à gaz, les pouvoirs se sont donnés les moyens de tuer sans contestation possible.
La mort ne se donne pas. Ne peut se la donner que celui qui renonce à la vie.
Comment? Avec quel soutien? Un livre qui donnait les informations sur les moyens du suicide a été interdit!
On ne peut, à la fois, recommander la possibilité de l'euthanasie et condamner l'existence de tels ouvrages!
En réalité, le débat philosophique est ailleurs : donner à chacun le pouvoir sur soi gêne les politiques de domination.
Passe encore qu'un médecin décide : lui appartient à un Ordre.
Qu'un individu puisse décider de son propre sort... fait désordre.
Tuer ne se règlemente jamais.
Se tuer est mon droit intime bien au-dessus du Droit!
Reste le cas de ceux qui ne sont plus en état de décider pour eux-mêmes.
Ce n'est pas du tout le même sujet, même s'il est, là aussi, question d'euthanasie.
Chantal Sébire ne nous a pas posé ce problème.
Je ne veux pas le mêler à celui de la liberté de mourir.
Car derrière ce corps mutilé il y avait un être libre.

samedi 15 mars 2008

Chiffres-clés, et à défaut de bourrage des urnes, bourrage de crâne!

"Voici les chiffres-clés des élections municipales et cantonales dont le second tour se déroule dimanche, selon le ministère de l'Intérieur:
Des chiffres justes et une analyse partiale, partielle et partisane!
La calcification des concepts de gauche et de droite strictement liés aux partis fausse tout.
Dans les milliers de communes de moins de 3500 habitants beaucoup d'évolutions ne sont pas mesurées.
Les écologistes n'y sont pas même cités.
Les communistes non plus!
Le concept restauré de "divers droite" (qui faisait fureur sous la 4ème République) suffit à compenser les pertes de l'UMP. Etc...
À première vue ces chiffres sont innocents, en fait, ils préconditionnent nos analyses.
Pensez donc à les comparer avec les résultats définitifs, lundi. (pas seulement avec la classification du Ministère de l'Intérieur!) Fouillez dans la presse!

_______

MUNICIPALES

- Le deuxième tour concerne 898 villes (ou secteurs à Paris, Lyon et Marseille) de plus de 3.500 habitants, soit environ le tiers des villes de cette catégorie. Hors secteurs Paris-Lyon-Marseille, 125 communes de plus de 30.000 habitants et 283 entre 9.000 et 30.000 habitants sont concernées.

- 2.412 listes sont en lice (76.974 candidats au total), 49,1% classées à droite, 45,8% à gauche et 2,5% MoDem. 1,7% sont classées autonomistes ou régionalistes, 0,5% Front National et 0,4% extrême-gauche.

- Deux communes verront s'affronter 5 listes (Lens et Carrières-sur-Seine dans les Yvelines). La plus grande proportion des villes de plus de 3.500 habitants connaîtront des triangulaires (423 sur 898), et deux des listes uniques, Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne) et Fosses (Val d'Oise).

- Dans les communes de moins de 3.500 habitants, 388.055 sièges de conseillers municipaux sur 435.718 ont été pourvus au premier tour, soit 89,1%.

- Depuis les municipales de 2001, la droite dirigeait 223 villes de plus de 20.000 habitants et la gauche 178.

77 villes de plus de 30.000 habitants sont restées à gauche dès le premier tour, 59 à droite et 3 au MoDem. 9 ont basculé de droite à gauche et 2 de gauche à droite.

Parmi les 37 villes de plus de 100.000 habitants, la droite en détenait 21 (dont Marseille, Toulouse, Nice, Bordeaux et Strasbourg), la gauche 16 (dont Paris, Lyon, Nantes, Lille, Montpellier et Rennes). La droite a conservé dès le premier tour Bordeaux et Toulon, la gauche Lyon, Nantes, Dijon, Le Mans, Limoges, Besançon et a conquis Rouen.

Le taux d'abstention au premier tour était de 33,46%.

CANTONALES

- 1.015 cantons restent renouvelables.

- 2.135 candidats au total, soit en moyenne 2,1 candidats par canton. Parmi eux, 18,5% de femmes seulement.

- Dans 37 cantons, un seul candidat sera en lice. Le nombre maximum de candidats est de quatre, enregistré dans sept cantons.

- C'est le PS qui présente le plus de candidats (662), devant l'UMP (près de 571) et les "divers-droite" (392).

- Avant le premier tour, la gauche présidait 51 conseils généraux, la droite 50. La gauche espère conquérir jusqu'à 10 départements à la faveur du second tour.

Le taux d'abstention au premier tour s'est élevé à 35,11%."

Source : © 2008 AFP





vendredi 14 mars 2008

Dedans ou dehors?

La victoire annoncée, indispensable et inutile du Parti socialiste et de ses alliés, dans deux jours, tant au niveau communal que départemental donnera à respirer un air plus frais. Pour un temps. Les causes du mal ne seront pas expurgées. La majorité sarkoziste ne renoncera pas à sa politique du désastre.

Il fallait ce coup de frein, mais ce n'est pas un coup d'arrêt. L'opposition n'est pas en résistance mais en attente.

Les choix fondamentaux de PS resteront à faire, lors de son prochain congrès, et ils pourraient surprendre, en positif comme en négatif. La conjoncture internationale, très évolutive, modifiera les choix trop libéraux mais le "retour à gauche" n'est pas à l'ordre du jour. On est déjà en attente de ... l'alternance de 2012!

Les élus locaux des majorités dites de gauche vont donc s'efforcer de tempérer les effets de la politique présidentielle. Qui pèsera le plus? Ceux qui sont dans la majorité de ces majorités (et qui, dès le premier tour, se sont inscrits dans des listes plurielles) ou ceux qui s'étaient présentés en dehors de ces listes, le plus souvent dominées par le PS, (et qui, au second tour, soit ont rallié une liste d'union, soit se sont maintenus ayant franchi la barre des 10% des votants?).

Ma réponse est brutale : s'il faut n'avoir d'autre possibilité que d'approuver une politique sur laquelle on ne pèse pas, mieux vaut être à l'extérieur. Les choix des socialistes ne se discutent pas quand le rapport des forces leur sont favorables. Les écologistes, altermondialistes et autres anti-libéraux ont mieux à faire que de se noyer dans une gestion qui n'est pas la leur. Si, -car cela arrive- un maire, socialiste ou communiste, effectuait des choix qui vont plus loin qu'une simple recherche d'amélioration de l'environnement, un simple accompagnement social des habitants les plus modestes, alors il faut le soutenir, voire coopérer. Reconnaissons que sera exceptionnel. Dans tous les autres cas, il faut garder une totale liberté de parole, à l'intérieur et à l'extérieur des assemblées locales, pour faire progresser des politiques non ambiguës et y associer de plus en plus de citoyens.

jeudi 13 mars 2008

Lazare Ponticelli, le Der des der, le Résistant.

À 110 ans, Lazare Ponticelli, le dernier poilu, est mort.

Il était le dernier, en France, à avoir connu les tranchées, à avoir vécu le traumatisme de la Grande guerre, celle que l’on avait appelée "la der des der". L'événement est considérable. Une page d’histoire vient de se tourner. Il reste sept ou huit survivants de la "Grande" guerre, en Grande Bretagne, aux USA, en Turquie... Le dernier "casque à pointe" est mort en Allemagne, à 107 ans, dans... l'indifférence générale.

Lazare Ponticelli, comme son nom l’indique, est né en Italie. Il arrive en France à l’âge de 9 ans, ne sachant ni lire ni écrire - et ne parlant pas français. Devenu ramoneur, puis livreur de journaux, il s’engage dans la Légion étrangère au début de la guerre. Puis, lorsque l’Italie s’engage à son tour dans la guerre en 1915, il est enrôlé dans l’armée. Il est blessé, démobilisé en 1916. Il revient en France en 1921, où il fonde une entreprise de fumisterie avec son frère. Ce n’est qu’en 1939 qu’il demande, et obtient, la nationalité française. Juste avant la guerre. Il veut alors s’engager, mais on le juge trop vieux pour le service actif. Il choisit alors d’entrer dans la Résistance, en 1942. Dans la résistance, il est resté.

L’Etat lui organisera des obsèques nationales, mais Lazare ne l'avait pas souhaité. Après les avoir refusé, il les avait finalement acceptées, au début de l’année, lorsque Louis de Cazenave, l’avant-dernier poilu, était mort. À 110 ans, il avait fixé ses conditions : “d’accord si c’est dans la dignité. Pas de tapage important, ni de défilé.” Car, disait-il, “je ne pense qu’à tous mes frères d’armes qui sont tombés. C’est à eux que les honneurs reviennent. Je ne suis que leur humble représentant, ayant eu la chance de survivre. Moi je suis passé au travers de la guerre injuste et horrible”.

Oui, c'est un résistant, un travailleur immigré, un homme lucide, un Européen, qui nous quitte et qui fait honneur à la France.

mercredi 12 mars 2008

L'utile et insupportable MoDem

Le MoDem nous donne une leçon de politique. La pire et la meilleure. La pire, parce que se vendre au plus offrant est méprisable. La meilleure, parce que refuser de s'installer dans la bipolarisation n'a jamais été plus utile. On peut donc, avec de faibles scores, peser sur la décision finale, ce qui est, encore une fois, négatif et positif! Négatif, parce que c'est le plus faible qui rafle, sans y avoir droit, une partie de la mise. Positif, parce que le plus faible n'est pas, à tout coup, rejeté dans les ténèbres extérieures.

En politique, tout est dans la signification et parfois la nuance! L'inconvénient majeur du double jeu du MoDem, ce n'est pas qu'il balance entre la gauche et la droite, c'est qu'il balance entre la droite cynique et la fausse gauche. Il n'y a pas, pour lui, de choix de société à effectuer et, par conséquent, tendre vers telle liste ou telle autre, apparemment rivales, hostiles dans les mots et peu dans les faits, ce n'est pas se trahir : libéral on est, libéral on reste.

C'est si vrai que la véritable surprise se trouve là où, une seule fois, le MoDem rejoint une liste à direction communiste, (à Gardanne). La presse y voit un accord contre nature. C'est bien reconnaître que le clivage devrait se situer entre libéraux et anti-libéraux (économiquement parlant). Et pourtant, là où des listes "à gauche de la gauche" ont obtenu des résultats significatifs, nul ne retient leur performance (fut-elle supérieure à celles des listes du MoDem!) puisqu'elles ne cherchent pas à se trouver, coûte que coûte, une place! À Clermont-Ferrand, en Bretagne, et ailleurs, les listes intitulées un peu vite LCR (car pas toujours dominées par le parti trotskiste!), veulent faire exister leur politique sans se rallier ou se vendre. Mais on ne veut considérer que le maire et ses élus! Comme sur un stade de football, ce n'est pas celui qui joue bien qu'on admire mais celui qui marque les buts!

"La tentation MoDem" est présente chez les Verts, jusqu'à y ponctionner des "militants". En Alsace ou à Marseille, on a vu deux ex-secrétaires nationaux des Verts aller bien plus loin que n'allait jadis Antoine Waechter et son ni-ni : ils sont passés au MoDem ou sous son influence. Jean-Luc Benhamias, va vers le PS sur la Canebière sans se désolidariser de son compère Jean-Luc Forget qui, au pied du Capitole, va vers l'UMP. Quant à Yann Wehrling, exclu des Verts, il affirme, dans sa lettre du 11 mars au futur maire PS de Strasbourg, que "la place de l'écologie est au centre" et redit sa disponibilité...

En vérité, il existe, à présent, une grande place vide : elle est toute chaude bien qu'inoccupée! Nul n'en approche parce qu'elle n'offre aucun accueil aux formations traditionnelles de la gauche traditionnelle, réformiste ou radicale. Un nouveau pôle citoyen va se constituer. Je ne sais ni quand ni comment, mais la politique aussi a horreur du vide et la place se remplira. Ce ne sera pas un parti, mais ce sera une force. François Bayrou l'avait senti mais il ne peut, idéologiquement, diriger ses pas vers cet état neuf de la politique. Le PS est, lui, trop installé sur l'aire dont il pense qu'elle lui appartient pour tenter d'aller voir ailleurs. Le PCF, comme la LCR, ont une culture d'organisation qui les encombre et les enferme dans des schémas qu'ils ont beau faire briller sous l'éclat des mots mais qui restent d'un vieux métal intellectuel rongé par une idéologie surannée. Les Verts, enfin, sont tombés dans les marmites du pouvoir et s'agitent dans la sauce, bien incapables de créer de nouveaux plats et de faire une nouvelle cuisine, évidemment pas celle dont sont connues toutes les recettes, mais celle qu'on peut servir à tous : modeste, frugale et savoureuse.

Finalement, il faudra bien remercier Bayrou qui essaie, en vain, de casser l'alternance mais sans avoir à offrir d'alternative! Il faut beaucoup de talent pour savoir offrir quand on n'a strictement rien à donner!

mardi 11 mars 2008

La politique de la charnière

J'entre dans un temps d'analyses. Elles sont indispensables à qui aspire à faire des propositions. Les élections qui sont en cours m'en fournissent l'occasion.

Pour sauver les petites formations politiques rien ne vaut tant que de se faire désirer surtout quand il ne manque aux partis dominants que l'accès à cet étroit espace électoral qui donne sur une majorité absolue!

Car la bipolarisation, tant qu'elle n'est pas complètement réalisée, a besoin de l'absorption des groupuscules. Les listes de la gauche qualifiée d'extrême restent sur la touche, comme on le voit à Toulouse, car elles n'entrent pas suffisamment dans le jeu électoral pour être instrumentalisés. Toutefois, les Verts, le MODEM et le PCF, tous sous la barre des 10%, en moyenne, sauf exceptions très localisées, disposent-ils encore de moyens de pression sans commune mesure avec leur représentativité. Au lieu de la rechercher, cette représentativité, les "petits" partis exercent leur capacité de nuire afin de se faire accepter! Ils y gagnent des sièges. Ils y perdent leur âme. Ils y sacrifient leur raison d'être.

À y regarder de près, l'effort le plus curieux est celui du MODEM qui, avec moins de 4% des voix, ose tenter de se créer un espace en n'étant ni le supplétif de l'UMP, ni le marche-pied du PS. En remplaçant le ni-ni par le ou-ou, François Bayrou, à ses propres risques et périls à Pau, abandonne le positionnement de l'UDF pour mettre un cale dans l'engrenage de la bipolarisation. Sympathique et ambigu! Ce n'est possible que parce que ce libéral peut s'installer entre deux libéralismes : le social-libéralisme et l'ultra-libéralisme. Si la gauche était anticapitaliste sa marge de manœuvre serait nulle!

L'attitude du PCF est marquée par le localisme traditionnel et à vouloir le liquider trop vite, le PS vient peut-être de faire une faute qui peut se payer cher. En Seine-Saint-Denis, c'est un lieutenant de Fabius, à gauche du PS paraît-il, qui conduit la charge. Le PS, selon ses besoins, flirte ici avec le MODEM, là appelle à la discipline républicaine. Il veut le beurre et l'argent du beurre : les voix de ses alliés, mais aussi peu d'élus non socialistes que possible! Classique mais dangereux en l'occurence. Le PCF sait s'appuyer sur les maires communistes qui peuvent se passer de politique ou plutôt la limiter à "garder" des mairies. Ce sont encore... de bons gestionnaires. Le conservatisme communiste a encore quelques bonnes cartes à jouer.

Quant aux Verts, ce sont des ingénus roués! Ingénus parce qu'ils croient pouvoir agir en s'inféodant à leur puissant allié. Roués parce qu'ils ont appris les règles du jeu de la politique politicienne et savent se contenter du peu qu'on leur laisse. Ils auront donc encore des adjoints au maire de Paris (moins nombreux!) et ils auront aussi des élus majoritaires ou minoritaires éparpillés, çà ou là. Quant à l'écologie, dans tout cela, c'est, au mieux, un discours, au pire, un jus verbal verdâtre, rarement une affirmation courageuse et autonome.

La politique de la charnière, jadis si bien utilisée par les radicaux de gauche, a quelque chose de réjouissant et de dépravé. Elle permet de prendre place là où on n'aurait pu parvenir dans un contexte ultra majoritaire. C'est bien pourquoi les scrutins en partie proportionnels permettent seuls d'apparaître en faisant basculer des coalitions vers le succès. On ne peut regretter que la bipolarisation soit ainsi tempérée : c'est cela qui est réjouissant. Pourtant, on ne peut se satisfaire de cette duperie qui oblige à se trahir pour réussir : c'est cela qui est dépravé!

Le champ politique est inabordable! Ce n'est pas le champ où poussent des variétés politiques anciennes ou nouvelles, grandes et petites, côte à côte! C'est un champ de bataille où les suzerains, selon leurs forces, font, ou pas, appel à des vassaux. Et ne restent sur le terrain que les puissants ou les habiles. Cette pratique médiévale des joutes politiques est dépassée. Ni l'art oratoire, comme sur l'agora, ni l'association populaire des citoyens, comme l'ont recherchée sans réussir, les coopératives et les syndicats à la fin du XIXe siècle, n'ont place dans la mise en spectacle des affrontements électoraux. Tout est marqué par le temps. Créer de nouveaux espaces politiques qui ne sombrent pas dans le culte du passé ni dans la médiatisation médiocre du présent, c'est sans doute la tâche la plus utile à accomplir.

La politique de la charnière est aussi méprisable que la politique de la porte qu'on claque au nez des démocrates. Un citoyen n'est pas un consommateur ou un client. C'est un acteur. Toute organisation politique qui vise à retirer au citoyen ce rôle d'acteur en demandant qu'on le lui délègue détruit la politique. Je persiste à le penser.




lundi 10 mars 2008

Pouvoir et politique

Je constate, non sans trouble, que l'élection tue la politique.
La prise de pouvoir est une dépossession du citoyen.
Rousseau (1) l'avait annoncé.
On n'en a jamais vraiment tiré les leçons.

Le parti aussi tue la politique.
La professionnalisation est une dépossession du citoyen.
Simone Weil (2), la philosophe, l'a démontré.
Même ceux qui l'admettent n'en tirent aucune conséquence.

Le culte de la personnalité tue également la politique.
La substitution du représentant à l'idée détruit la pensée.
Antonio Negri (3) a analysé le pouvoir constituant.
Il m'a appris l'incompatibilité avec le pouvoir constitué.

L'avoir, qu'il soit place ou argent, détruit la politique.
Qui défend son titre ou son or bloque l'éveil du neuf.
Erich Fromm l'affirme : être ou avoir, il faut choisir.
Et c'est un choix dont dépend l'avenir de l'homme.

Enfin, majorité/minorité, approbation/opposition, gauche/droite...
La bipolarisation est l'aboutissement obligé de la démocratie mal pensée.
Ivan Illich (5) voulait que le conflit débouche sur la convivialité.
Les systèmes duels ou duals sont des logiques de guerre.

Je n'entrerai plus en campagne.
Je ne serai plus militant.
Je ne m'inscrirai plus dans une stratégie électorale.
Je ne m'engagerai plus dans un parti.
J'irai au-delà de la gauche.

J'entrerai en politique.
Je serai un citoyen.
Je m'inscrirai dans la réalité du monde entier.
Je m'engagerai dans ma voie.
J'irai prendre la parole et pas le pouvoir.
______________
(1) Voir Le Contrat social (1762).
(2) Voir Note sur la suppression des partis politiques (1943, réédité en 2006)
(3) Voir Le pouvoir constituant (1997).
(4) Voir Être ou avoir, un choix dont dépend l'avenir de l'homme (1976)
(5) Voir La convivialité (1973).

dimanche 9 mars 2008

Municipales et cantonales : des scrutins ambigus.

Aujourd'hui, les Français votent. Les Espagnols aussi.

En Espagne, il s'agit de renouveler le Parlement. En France, il ne s'agit que de désigner les équipes municipales et de renouveler la moitié des Conseils généraux. En réalité, la chose est plus complexe. Il n'est pas d'élection mineure. Il y a toujours une lecture politique à en faire.

Après la chute de crédibilité vertigineuse du Président de la République, on s'attend à une manifestation forte de discrédit dont pourraient avoir à souffrir les candidats de la majorité présidentielle et parlementaire. Pour autant, n'examinons pas que l'aspect de politique nationale de ces scrutins! Les probables bénéficiaires de la "claque" annoncée par les sondages, les socialistes, auraient bien tort de s'en réjouir au point de replonger dans leur attente, plusieurs fois déçue, d'une alternance qui serait inéluctable!

Les Français qui ont surpris tout le monde en choisissant Bouffon imperator, en mai 2007, ne cherchent-ils pas, à tâtons, une voie de sortie, face à la médiocrité dans laquelle s'enfonce le pays? Sarkozy a fait, brièvement, illusion, mais il est en place! La quasi totalité des Conseils régionaux, la majorité des Conseils généraux et la majorité des villes auront beau être, probablement, aux mains d'oppositions à dominante socialiste, le pouvoir central, ainsi le veulent nos institutions, restera à l'Élysée et dans son antenne de l'Hôtel de Matignon.

J'avais tout cela à l'esprit, en votant ce matin.
Je n'ai pu entrer dans ces schémas tout préparés.
Je récuse la bipolarisation, définitivement.
La France ne peut devenir la pâle copie des USA!
Socialo-Démocrates d'un côté, UMP-Républicains de l'autre!
Nous étions passés, l'an dernier, tout près d'un Sarko-Bush contre une Ségo-
Hillary.
Les votes télécommandés sont sans valeur.
Mon vote a donc été, tout à l'heure, instinctif et inattendu.
La rationalité y a sa place mais pas toute la place!
Je veux échapper au conditionnement.
Je n'ai voté ni pour la vraie droite ni pour cette fausse gauche dont je faisais encore partie, il y a peu.
Je n'ai pas voté autrement que tactiquement. Non sans gêne. Non sans conviction.
Même mon vote, écologiste, pour les cantonales ne sera pas suivi de sa suite logique, dans huit jours.
Je suis entré dans un nouveau temps de pratique politique.
Je veux écrire cela avant de connaître tout résultat, ce soir.
Il est 18 heures.
Je m'expliquerai bientôt de façon plus explicite.


samedi 8 mars 2008

Les femmes premières à subir l'inégalité

L'inégalité caractérise le monde où nous vivons mais ce sont les femmes qui en souffrent le plus.

Les riches détruisent la planète, affirme Hervé Kempf. Sur le site qu'il a créé, et s'agissant de la France, on lit, dans Reporterre (1) : "Sarkozy est un Robin des bois à l’envers qui prend aux pauvres et donne aux riches. Mises bout à bout, les mesures fiscales du président de la République depuis son élection dessinent un tableau d’une limpidité extraordinaire : on augmente les prélèvements sur les pauvres et on allège ceux des riches. Plus extraordinaire encore : ça passe sans réelle protestation de
la gauche. La quoi ?"

Mais laissons, pour le moment, à la veille de ces élections qu'elle va gagner, cette gauche qui n'est plus la gauche et qu'il faudra rebaptiser... Regardons plutôt celles des inégalités qui concernent d'abord les femmes. C'est le jour : le 8 mars. L'Observatoire des inégalités nous y aide. (2)

1 - Dans notre pays, le fait d’avoir un enfant dans les sept premières années de vie active pèse essentiellement sur la situation professionnelle des jeunes femmes. Alors que les hommes en couple restent dans tous les cas pour plus de 90% à temps plein, les femmes ne sont plus que 68 % à travailler à temps complet avec un enfant et seulement 39 % avec plusieurs enfants.

2 - Dans les pays les plus pauvres, seulement 50,4 % des femmes de plus de 15 ans sont alphabétisées. En Asie du Sud, le taux d’alphabétisation atteint 47,7 %. Pour l’ensemble du monde en développement, trois femmes sur dix demeurent analphabètes. A l’inverse, dans les pays riches, la quasi-totalité de la population est alphabétisée.

La situation s’améliore lentement au fil des générations. Le taux d’alphabétisation est de 83 % pour les femmes de 15 à 24 ans pour l’ensemble du monde en développement et 61 % dans les pays les plus pauvres. Mais cela signifie que quatre femmes sur dix ne maîtrisent pas l’écrit et auront des difficultés certaines dans des sociétés de plus en plus urbanisées et où l’écrit joue un rôle croissant.

3 - Symbole du modèle social des années 50, les femmes au foyer sont peu étudiées, bien qu’elles restent toujours très nombreuses. Qui connaît les femmes au foyer ? La littérature scientifique sur les femmes qui n’exercent pas d’emploi rémunéré, c’est un vrai désert. " Les femmes en âge de travailler passant l’essentiel de leur existence au foyer font figure de catégorie résiduelle. Cette prétendue marginalité explique, au moins pour partie, que leur expérience et la recherche de leurs motivations soient largement évacuées des analyses proposées par la littérature sociologique ", écrit Dominique Maison, auteure d’une thèse sur le sujet.

4 - Les progrès des filles dans le domaine de la scolarisation sont nets : elles obtiennent de meilleurs résultats aux évaluations scolaires. Mais elles s’orientent vers des filières aux débouchés moins rémunérateurs.

Une fois dans le monde du travail, on les retrouve en plus grand nombre dans les secteurs où les salaires sont les moins élevés, comme les services domestiques ou la grande distribution. Le salaire masculin, tous temps de travail confondus, est supérieur de 35 % à celui de leurs homologues féminins. Pas moins de 30 % des femmes salariées, contre 6 % des hommes, travaillent à temps partiel, souvent subi. Les postes d’encadrement restent encore le plus souvent réservés aux hommes, un sur quatre est occupé par une femme, même si l’on constate une évolution positive depuis une dizaine d’années. Elles sont aussi plus touchées par le chômage.

On pourrait allonger la liste des discriminations dont les femmes font l'objet!
Ce que je découvre, en vieillissant, c'est le tort inimaginable qui est fait à l'humanité tout entière en plaçant la moitié de la population mondiale sous la domination de l'autre!
Il ne s'agit pas même "d'accorder" plus d'argent et plus de pouvoir(s) aux femmes. Il s'agit uniquement de laisser leur place, sur Terre, aux humains de "l'autre sexe".
La littérature sur le sujet a beau surabonder, rien n'y fait : la culture sexiste domine, et ô combien, partout. L'admiration et les louanges sont des moyens de garder à distance celles dont on ne veut pas qu'elles cessent d'être des beaux objets pour devenir des sujets qui concourent à la détermination des politiques.
Les efforts, timides, qui sont faits dans une partie de l'Europe ne modifient pas la situation sur le fond.

L'écologie politique a aussi à se saisir de cette inégalité radicale : le sexisme est une méconnaissance du monde dans lequel vivent les humains où les rapports, si le mot civilisation a le moindre sens, doivent cesser d'être des rapports de force!

(1) http://www.reporterre.net/
(2) http://www.inegalites.fr/
(3) Dominique Maison, Femmes au foyer. Expériences sociales, Dossier d’étude n° 92, mai 2007, Cnaf. Disponible sur www.cnaf.fr

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