mardi 21 février 2017

Courrier de Jean Luc Mélenchon à Benoît Hamon


Ce texte dit, à la fois, pourquoi un accord entre Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon était possible et impossible, à la date du 17 février 2017. Il faut le verser aux archives politiques de ce qui fut "la gauche". Aller "jusqu'au bout du changement" supposait des ruptures que Benoît Hamon ne pouvait faire sans cesser d'être le candidat du PS. Sorti en tête de la primaire organisée par son parti, il lui était impossible de rompre, fut-ce par honnêteté, avec les siens qui ne voulaient ni de lui ni de ses idées. L'échec aura été et restera celui du PS. 
Si Hamon le pense, il n'est pas en position pour le dire et Mélenchon, en le poussant dans ses retranchements, l'aura mis en difficulté non par volonté politique, mais parce que il n'a cessé de démontrer que le PS est mort, enfermé ou pas dans un "corbillard" qui, pour le malheur de la France, roule encore...
 Jean-Pierre Dacheux
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Le 17 février 2017

Bonjour Benoît,
Lors de mon meeting à Strasbourg j’ai pris l’initiative de te proposer publiquement une rencontre. 
J’ai proposé la fin de la semaine prochaine compte tenu des rudes obligations de mon calendrier. Tu avais dit que tu me contacterais des ton investiture. Mais tu n’en as pas eu le temps.
Il en résultait un harcèlement de questions exclusivement sur ce thème de la part des médias et il devenait difficile de s’épargner le ridicule d’une situation qui semblait bloquée. Or, elle ne l’est pas de mon fait. J’ai rencontré avec grand plaisir Yannick Jadot à Strasbourg et je te verrai de même. Demain nous allons échanger une première fois, de vive voix.
Pour faciliter notre échange, je voudrais résumer ici ce que j’ai dit sur le sujet à Strasbourg et au cours de divers entretiens.
Ton investiture a exprimé un net désaveu de la politique du quinquennat. Non seulement du point de vue de ton programme mais aussi du fait de la rude sanction qu’a subi le premier ministre emblématique de cette période qu’est Manuel Valls. À présent tu proposes une convergence de nos forces dans les élections présidentielles et législatives. Je ne crois pas un instant qu’elles puissent s’ajouter sans que de très sérieuses garanties ait été données. Au contraire des accords d’appareils pourraient bien hélas démoraliser et désorganiser ce qui a été rassemblé de part et d’autres.
Voyons ce que nous pouvons faire d’utile. Nous sommes bien d’accord que la présidentielle et les législatives sont étroitement liées. Dans ces conditions parlons-nous avec sérieux, sincérité et loyauté à l’égard de notre peuple pour éclairer la décision et le choix qu’il va faire.
Tu as dit que tu ne faisais aucun préalable même de ta propre candidature. C’est une attitude positive. Mais tu as aussi déclaré qu’en toute hypothèse il y aura un bulletin de vote à ton nom le 23 avril prochain. Que devons-nous retenir ? Nous proposes-tu une candidature unique à l’élection présidentielle ?
En toute hypothèse il s’agit d’être prêt à convaincre à entrainer et à gouverner. Cela nécessite confiance et cohérence. Sans que cela soit attaché à ta personne ni à ton talent il est évident que dans les sondages ta candidature reste à un niveau extrêmement bas par rapport aux scores traditionnels du PS. C’est cela le bilan de ce quinquennat. Le PS dont tu es le candidat n’est plus en mesure de fédérer les français. Tout est à reconstruire dans notre pays. Veux-tu t’atteler à cette tache ? Un accord à l’ancienne ne le pourra jamais. D’autant que le quinquennat de François Hollande a montré quel usage un candidat du PS pouvait faire de ses engagements les plus solennels. Je te fais de bon cœur crédit de ta bonne foi. Mais nous ne pouvons avoir la naïveté de te croire sur parole alors même que tu es et reste le candidat d’un parti et d’élus majoritairement hostiles à l’orientation que tu défends. Il est donc légitime et honnête que nous te demandions des garanties politiques précises sur ton engagement à rompre avec le quinquennat et son bilan. Comment sans cela parler de quoi que ce soit avec confiance ?
La première garantie concerne le périmètre de la convergence. Nous ne voulons aucun accord ni à la présidentielle ni aux législatives avec Emmanuel Macron et son mouvement. Pour nous, ce que l’on connaît du programme d’Emmanuel Macron est purement et simplement la poursuite ou le durcissement de la politique mise en œuvre par François Hollande
La seconde garantie concerne ta propre volonté d’assumer la rupture avec la politique du quinquennat et donc l’engagement clair à en abolir les mesures emblématique c’est-à-dire essentiellement la loi El Khomri, le CICE et l’état d’urgence permanent. Cela se traduira par la mise à l’écart des prochaines élections notamment des ministres du gouvernement qui a imposé cette « loi-travail » à coup de 49/3.
Mais nous croyons qu’à la rupture doit s’ajouter une volonté positive d’ouvrir un nouveau chapitre de l’histoire de notre pays. Notre programme comporte 357 mesures. Nous le mettons à la disposition de la discussion. Mais nous croyons que l’essentiel de l’esprit qu’il incarne, en lien avec les enseignements de l’alter mondialisme est à la base du contrat à nouer avec notre peuple. Compte tenu de ce que nous t’avons entendu dire nous croyons qu’il t’est possible de t’avancer largement vers ces positions quitte à ce que ceux qui te combattront de toute façon dans ton parti prennent leur distance !
Garantie de tourner la page de la monarchie présidentielle avec la convocation d’une assemblée constituante dans les trois premiers mois de la nouvelle mandature.
Garantie d’ouvrir le chapitre d’un cycle vertueux du partage de la richesse. Je suppose que nous sommes d’accord sur l’augmentation du SMIG et des minima sociaux. Mais il faut ouvrir de nouveaux horizons de progrès social avec l’échelle des salaires et limitée de un à vingt et l’instauration de la sécurité sociale intégrale, et au minimum le retour aux 35 heures réelle comme à la retraite à 60 ans avec 40 annuités.
Garantie du changement de la matrice productive du pays avec la sortie du nucléaire et le passage au cent pour cent d’énergies renouvelables.
Garantie de récupération de l’autonomie économique de notre pays avec l’annonce du retrait de la signature de la France de l’accord CETA et organisation de la consultation du peuple sur cet accord. Arrêt immédiat de l’application des directives européennes mettant en cause les services publics de notre pays et passage au plan B en cas d’échec des discussions avec nos partenaires européens pour mettre fin à la politique des traités budgétaires et des semestres européens.
Garantie de l’indépendance de notre pays vis-à-vis de l’OTAN avec la sortie de cette alliance militaire et le retour à une politique pour la paix et de désarmement dans le monde.
En t’adressant ces lignes j’ai le sentiment de répondre à une exigence de sérieux et de sincérité dans les relations politiques. Comme la majorité de notre peuple je n’ai plus aucune confiance dans les accords d’appareils entre partis politiques. Le mouvement « la France insoumise » s’est constitué sur un programme et une candidature qui le porte. Rien d’autre. Cela nous suffit amplement pour vouloir en convaincre le grand nombre. Mais s’il existe une possibilité que la trame essentielle de ce qui nous a regroupés puisse aussi fédérer des partis politiques de la gauche traditionnelle, je suis prêt à consulter les 250 000 personnes qui se sont personnellement engagées à mes côtés sur la proposition qui leur serait faite.
Mais je veux dire directement et franchement que je ne saurai composer avec les engagements que j’ai pris, ni faire confiance à la parole du candidat du PS sans garantie ferme et solide de sa part.
Avec l’espoir de t’en convaincre,
Bien amicalement 
Jean Luc Mélenchon
Source : AFP

dimanche 12 février 2017

En 2017, peut-on concrétiser un rêve politique ?

Un appel citoyen me parvient. Il dit le souhaitable. Peut-il engendrer le possible ? Toute politique réelle est utopique. Elle surprend puis se banalise et l'histoire l'a souvent révélé depuis 1789. Sommes-nous entrés dans une telle phase bouleversante ? Nous le saurons bientôt. Dans cette attente, il faut entendre ce qui se propose et le texte ci-dessous est à prendre en considération.

Présidentielles, soyez le changement que vous voulez voir dans la société ! 

La victoire de Benoît Hamon fut une surprise. Non seulement parce qu’elle n’était pas prévue et parce que son programme marquait suffisamment de convergences fortes avec ceux de Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot et Charlotte Marchandise pour espérer qu’il puisse se passer du côté de la gauche et des écologistes autre chose que la division et la défaite.

Dans la foulée, divers appels, déclarations, initiatives ont émergé spontanément mobilisant des dizaines de milliers de signataires. Venus d'horizons divers, personnalités ou anonymes, plus ou moins politisés ou associatifs, ils ont en commun de vouloir que s'ouvre en France, une vraie évolution de civilisation : Oui à l'union de la gauche et des écologistes pour une véritable alternative ; oui à une grande Alliance rose-rouge-verte qui réussisse là où des expériences passées ont déçu. 

Dans un premier temps, sous l'effet de surprise, cette pression citoyenne a fait son effet. Benoît Hamon a lancé un appel à l'unité à gauche. Yannick Jadot et EELV, Jean-Luc Mélenchon et la France Insoumise ont répondu positivement. Pourtant rapidement les vieux réflexes sont revenus. Dire qu’on est pour l’unité mais ne pas prendre les contacts nécessaires pour entamer le dialogue. Dire qu’on veut l’union, mais souligner ce qui sépare sans dire comment on va le surmonter. Emerge le risque d’une alliance à deux. Candidats et militants semblent raisonner depuis leur parti, au détriment de l'intérêt de la gauche et de l'écologie, de ceux du pays, de la planète. 

Faudrait-il donc que, nous gens de gauches et écologistes, tenants du changement et de la solidarité, nous nous résignions à cette inertie du chacun pour soi ? Ce qui est en jeu, c’est d’empêcher la France de glisser vers un régime autoritaire-nationaliste ou néo-libéral austéritaire. Ce qui est en jeu, c’est la rencontre entre l’écologie et la justice sociale, une démocratie renouvelée, ce à quoi aspirent tant de citoyens, et qu’expriment tant d’alternatives, de mouvements, de pensées depuis des décennies. C'est l’émergence d’une force coopérative commune qui rendra possible de dépasser les points de blocage actuels autour de la candidature unique aux présidentielles, de la majorité aux législatives et du programme.

Notre conviction est la suivante : pour sortir de l'impasse, pour donner naissance à ce Front solidaire et écologique, il faut faire confiance à ce qui a bousculé la gauche jusque là : l'irruption citoyenne. Face au dramatique, nous vous proposons l'héroïque. Cette force, comment la faire émerger ? Se sont enclenchées localement des réunions publiques, des débats, sur les réseaux sociaux , et d’autres initiatives, pour que se rencontrent à la base les volontaires de cette unité dans la diversité. Nous appelons à les multiplier et à nous fédérer pour peser collectivement et ne pas laisser la main aux seules organisations politiques (http://www.1maispas3.org/aperos-citoyens/ ) afin de trouver une plateforme commune. 

Pour aller plus loin, nous proposons aux partis et mouvements sociaux une conférence nationale en vue d'un « Pacte pour une alternative de gauche, écologiste et citoyenne". Cette conférence travaillerait les points suivants : - Un programme commun, renforçant les points de convergences, recherchant des consensus sur les points en débat (nucléaire, travail, international) ou les moyens de les trancher une fois au pouvoir. - Un bilan partagé des expériences de la gauche au pouvoir, réussites, obstacles rencontrés et cause des renoncements. - Rechercher des modalités de désignation d'un ou une candidate unique aux présidentielles : tirage au sort, primaires présidentielles, consensus, appel à une personnalité de la société civile ou du mouvement social… Tout peut se réinventer. - Et puisque ce qui fait obstacle – et à raison - est la question de certaines désignations aux législatives, nous proposons l’organisation de primaires législatives pour désigner les candidats de la majorité écologique et sociale. Les formes sont à imaginer mais elles doivent permettre la diversité des élus (aussi bien socialement que politiquement), la non-hégémonie du Parti socialiste et l’ouverture aux candidatures citoyennes. Cette conférence sera organisée par une coopérative politique nationale composée de plusieurs collèges : partis, syndicats et société civile, appel de citoyens, citoyens tirés au sort. Cette coopérative devra se mettre en place avant la fin du mois et les candidats devront donner une réponse à nos propositions dans les trois jours suivant la publication de cet appel. Tous, nous vous appelons à rêver qu’un autre monde est possible. Et à vous unir pour concrétiser ce rêve.

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