dimanche 30 octobre 2011

L'évaluation, le mal du siècle ?

On veut tout évoluer, c'est-à-dire tout mesurer, tout peser dans la balance de la rentabilité puis de la profitabilité. On ne s'interroge pas sur l'outil qui mesure, ni sur la possibilité même d'apprécier une réalité autrement qu'avec des chiffres. On jauge, puis on juge. On sépare le bon grain de l'ivraie, ce qui, à l'inverse de l'Évangile, signifie écarter le pauvre pour ne conserver que les riches.

Roland Gori à l'origine de l'Appel des Appels, alerte, une nouvelle fois, contre ce risque culturel majeur qui nous fait apprécier les humains comme des choses.

Note de l'éditeur :

« En ce début de XXIe siècle, en Occident, la folie sociale a pris un nouveau nom, celui d’évaluation. » Le mot essaime partout. Il est à la fois le dispositif et le symptôme d’un mode de contrôle social contemporain particulièrement dangereux.

La société occidentale demande maintenant à ceux qu’elle missionne, dans tous les domaines d’activité, de lui rendre des comptes – ce qui paraît très légitime –, mais en faisant de cette exigence un instrument de normalisation généralisée. On sait quel malaise cela génère. Il ne s’agit en fait pas tant de « rendre compte » que de s’en trouver, par ce biais, asservi.

Les auteurs examinent le processus en cours. La « machine évaluative », alors même qu’elle donne de nombreux signes d’essoufflement, continue pourtant à se développer, et les tentatives effectuées, tant pour la dénoncer que pour tenter d’en limiter les effets délétères, n’amènent pour l’instant qu’à la renforcer. Les agences d’évaluation, diverses et variées, constituent aujourd’hui la nouvelle manière de donner des ordres et de faire de la politique sans en avoir l’air.

Le contrat social de la démocratie est bel et bien entamé, si ce n’est rompu par cette forme de dictature que sont les chiffres : chiffres que l’on fait croire « évidents » et « naturels », alors même qu’ils se déduisent des rapports de force sociaux et symboliques. Il faut réinterroger la notion de « valeur » pour combattre efficacement l’évaluation.

Alain Abelhauser, Roland Gori et Marie-Jean Sauret, sont tous trois psychanalystes, professeurs de psychopathologie à l’université. Ils ont notamment participé à la publication de l’ouvrage L’Appel des appels. Pour une insurrection des consciences (Mille et une nuits, 2009).

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