lundi 5 juillet 2010

La contradiction des contradictions

Le constat est brutal et ne date pas de ce siècle : ceux qui parlent sans cesse de Jésus-Christ, qui le louent et le chantent, ne vivent guère de sa parole.

Non que ces chrétiens, catholiques, protestants ou orthodoxes soient moins bons que les autres hommes, mais ils ne prennent au sérieux que les formes et pas le fond, ils croient par prêtres interposés, et l'exigence de l'Évangile : ni pouvoir, ni richesse, ni violence est trop lourde à porter.


Les trois tentations

Penser, affirmer et vivre cette utopie suprême, apparaît insensé, dangereux et donc insupportable. Pour beaucoup, cela mérite la mort. Prêcher l'anarchie, la pauvreté et la douceur est hors du temps, hors du champ social, bref hors de la réalité.

"Mon royaume n'est pas de ce monde" ne veut pas dire le Royaume de Dieu n'est pas sur la Terre. Il veut dire ceci : il est un autre monde possible où ne règnent pas les puissants et les riches, mais l'amour. Inutile de l'aller chercher dans les nuages ou au-delà des étoiles, il est ici-bas, dans notre quotidien, mais hors de "ce" monde qui s'est construit sur la domination.

La folie du Christ est dans son affrontement radical du Prince et du Prêtre par la non-violence au risque de la mort subie.

Cette contradiction absolue entre une humanité qui recherche sans cesse son épanouissement dans la grandeur, la compétition et la force, d'une part, et l'humanité qui aspire au partage, à la lenteur et à la tendresse, d'autre part, est au cœur de l'apport chrétien mais n'est plus prise en considération.

L'échec des civilisations successives aurait pu réanimer ce message de paix qui permettait de dire : osons l'amour, pas l'empathie, pas l'élan du cœur ou du corps, non, mais l'égalité sans restriction, car tout homme en vaut un autre. Le refus définitif de disposer de plus de biens qu'autrui, de plus d'accès au savoir qu'un autre, de plus de droit à la décision que mon voisin, est révolutionnaire par simple inversion des valeurs. C'est, au cœur des sociétés, une affirmation d'un possible, partout et toujours contesté.

La fraternité avec quiconque qui, Terrien comme moi m'est infiniment proche, peut fonder une Cité de prochains. Saint Augustin l'appelait la Cité de Dieu parce que, décidément, les hommes semblaient incapables de cet amour-là, mais c'est la Cité des Hommes qui peut-être divine pas la cité imaginaire. À vouloir mettre Dieu partout, on en exclut jusqu'à l'hypothèse. Le Dieu dont parlent les hommes est haïssable. Jésus a nié la religion de ce Dieu de puissance qui fait à son gré le bonheur ou le malheur des nouveaux nés, siècle après siècle.

Alors, oui, notre Royaume n'est pas de ce monde", encore... Tout s'y oppose. mais s'il reste quelque chose de la bonne parole, c'est bien ceci : nous ne sommes pas condamnés d'avance au triomphe de l'or, de l'épée et du sceptre. Oser l'impossible c'est rendre possible l'utopie des utopies, la contradiction des contradictions, la défaite de la mort.

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