lundi 30 juin 2008

Goupil en péril à Éragny sur Oise.



Il en a trop fait. Imprudent, insolent, il a éparpillé dans la ville, rue Claude Bénard, et sans doute ailleurs, le contenu de nos poubelles. Sans doute a-t-il une progéniture à nourrir. Alors il fouille. Il traîne et entraîne des sacs entiers pour en faire l’inventaire. Il a été vu ! Des riverains se sont plaints. Déjà, en mairie, on a parlé de pièges et de chasseurs. Goupil est en péril.

Le sot ! À vivre sur nos restes, depuis que les volailles des poulaillers et surtout les mulots des champs se font rares, il entre en compétition avec l’homme lui-même. Lutte inégale ! Passer du statut de renard des bois à celui de renard des villes ne va pas de soi. Ne plus se cacher, glapir la nuit, au nez et à la barbe des chiens du quartier qui ne peuvent qu’hurler de rage, enfermés qu’ils sont derrière les barrières des pavillons de leurs maîtres : ça ne peut durer. Si goupil ne change pas de comportement, il sera tué.

Un très vieux livre fit, dans les années 1950, le bonheur des jeunes lecteurs : Le Seigneur des Hautes-Buttes, de Michel-Aimé Bauduy (éditions de l’Amitié, G.-T. Rageot) ; ce fut même le Prix Enfance du Monde 1957. On y racontait l’histoire d’un renard, dit Le Manchot (parce qu’il perdit deux doigts dans un piège), aux prises avec un vieux chasseur très malin, son chien basset, infatigable et toujours à ses trousses, mais pouvant compter sur la connivence de deux enfants. Le goupil d’Éragny deviendra-t-il le Seigneur des Hautes-Bornes, le lieu-dit où se situe son refuge, dans le dernier bois de la commune ?

Il faudrait, pour cela, un peu de connivence encore, mais, cette fois, celle d’adultes. Pouvons-nous cohabiter avec un animal sauvage ? Pouvons-nous lui laisser, en des lieux à déterminer, une partie des reliefs de nos repas qui lui suffirait largement ? Pourrons-nous longtemps déposer nos déchets putrescibles dans des sacs en plastique que non seulement un renard, mais un chat ou un chien errant (quand ce n’est pas une corneille ou une pie !) parviennent facilement à éventrer ? Il est bel et bon d’invoquer sans cesse l’écologie. En société, cela ne veut pas dire laisser faire la nature ; cela veut dire : vivre avec elle ; cela veut dire aussi : non pas être ami de la nature mais se considérer comme en faisant partie.

Il faut aider le Seigneur des Hautes-Bornes à vivre autrement. Sa présence ne peut seulement nous enchanter, occasionnellement. Il faut modifier notre rapport au renard. Nous ne pouvons ni le laisser faire, ni l’exterminer. Cherchons des solutions avant que la rage (pas celle du renard, celle de l’homme) aboutisse à la fin du renard à Éragny.

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Le 3 octobre 2013.
Et maintenant, exprimez-vous, si vous le voulez.
Jean-Pierre Dacheux

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