dimanche 17 mai 2009

Voter comme on pense

Il m'aura fallu bien du temps et de multiples expériences avant de me résoudre à ne plus jamais voter autrement que je pense. Le vote-faute-de-mieux et le vote-pour-le-moins-pire sont des attrape nigauds. S'il se trouve qu'aucune candidature ne soit compatible avec ce qu'on estime fondamental, il faut voter blanc (1) ou nul (en écrivant manuellement son choix, non disponible dans l'offre de vote). L'élection européenne va sans doute me fournir l'occasion de mettre en œuvre cette décision.


Plus de 700 millions d'électeurs en Europe. Pour décider quoi?

Bien qu'il s'agisse d'un scrutin proportionnel (écartant, tout de même, les listes obtenant moins de 5% des voix et représentant, parfois, des courants de pensée naissants), aucune liste ne me semble associer deux exigences : l'écologie comme inspiratrice de toutes les décisions politiques et le rejet du capitalisme enfin appelé par son nom, pollution de l'économie autant que de la pensée.

Sous la teinture verte dont se couvrent, à présent, toutes les organisation politiques ou presque, il n'y a, le plus souvent qu'un effet de mode, une concession faite devant certaines urgences, mais rien de profond et de sincère que révèleraient, par exemple, le renoncement au nucléaire et la fin du discours sur la nécessité de la croissance.

S'agissant de l'Europe, il me faut bien convenir qu'elle est devenue ce que je craignais il y a déjà des décennies : le lieu ou s'installe, par dessus les États ou avec leur complicité, l'organisation économique libérale du continent. Tous ceux qui ont estimé (et j'en étais) que pour dépasser les États-nations et leur risque permanent de dérive nationaliste, il fallait, quitte à faire des compromis, renforcer et élargir l'Europe, ont été trompés. Il n'y a pas de citoyenneté européenne mais une simple appartenance européenne des ressortissants des pays ayant rejoint l'Union. Il n'y a pas de pouvoir politique réel du Parlement européen qui n'a pas de compétence en politique étrangère et qui ne fait que "co-décider" avec la Commission, organisme de cogestion interétatique nullement lié aux votes du Parlement. L'Europe n'est pas démocratique.

Mes réserves par rapport à l'Europe telle qu'elle est, désormais, mon désir de refondation d'une autre Europe, ne trouveront pas leur expression par la voie électorale et seules les contradictions du système économico-politique révélées par la soit disant crise (en fait la mutation de société) peuvent nous conduire vers les choix politiques innovants et indispensables à la survie de cet occident qui a voulu dominer le monde entier et qui échoue!

Je ne voterai donc pas pour la seule liste qui a des chances d'avoir des élus et qui, pourtant, défende une politique écologique. Dans ma région, l'Ile de france, les choix de la tête de liste, Daniel Cohn-Bendit, (depuis son acceptation des institutions européennes en 2005 et du traité de Lisbonne actuellement, jusqu'à sa tolérance, mainte fois affirmée, avec les idéologies libérales) m'interdisent ce choix. Aurai-je voté pour Europe écologie dans la région où José Bové est tête de liste? Peut-être, mais j'aurais hésité car il s'est associé à ceux qui ont contesté son positionnement européen en 2005 et 2007. Finalement, de n'avoir pas à résoudre cette contradiction me convient et m'évite d'avoir encore à voter dans l'ambiguïté.


Que ton non soit non ou que ton oui soit oui!

À l'inverse, les listes "antilibérales" du Front de gauche ou du Nouveau Parti anticapitaliste, ne me convainquent pas de la sincérité de leur positionnement récent en faveur de l'écologie, dimension supplémentaire de leur argumentation, et nullement fondement de leur anticapitalisme. En outre, le sectarisme, l'esprit de parti, le comportement politique de ces formations m'interdisent de refaire ce que j'avais fait lors des élections régionales : voter pour qui osait exister hors d'une alliance avec le PS (en l'occurence une liste PCF élargie). Ce temps est derrière moi.


La gauche, éparpillée, n'existe plus.

La gauche, vieux repère idéologique, a cessé d'être la gauche quand elle a abandonné jusqu'au principe même de ce qui a constitué le socialisme : la solidarité absolue avec le monde du travail et la recherche d'une économie débarrassée de la toute puissance de l'argent. Il n'y a plus de parti socialiste en France.



Pourtant la gauche se nie aussi quand le partage de la décision est rendu impossible par le prééminance des partis. Ce qui s'est passé avant, pendant et après l'élection présidentielle de 2007 aura été révélateur d'une nouvelle urgence : la gauche ou ce qui en tient lieu, quel que soit le nom qu'on lui donnera, a besoin, comme l'Europe, d'être toute entière refondée. On en est loin.

Le 7 juin, j'irai voter, même si l'abstention aura une vraie signification politique (le rejet d'une Europe qui n'est plus l'Europe). Je voterai pour pouvoir dire que je suis de ceux, fussent-ils en très petit nombre, qui veulent l'Europe, qui ne sont pas attachés à l'État-nation, qui cherchent une autre Europe, qui font de l'écologie le cœur de tous les choix politiques présents et à venir, qui veulent une démocratie où le partage de la décision soit réel, le cumul des mandats rendu impossible, le pouvoir économique arraché aux seuls détenteurs des capitaux.

Si une liste de "décroissants" est proposée, je la choisirai donc, de façon symbolique, puisque qu'aucune liste de ce type n'atteindra les 5%. Tôt ou tard, cette thématique de la décroissance ou de "la vie simple" comme disait Gandhi, ou de la vie sobre, s'imposera en Europe comme ailleurs, fut-ce au prix d'affrontements très dangereux. Mon vote sera donc, je pense, annonciateur d'une autre façon de s'engager en politique, de façon concrète et quotidienne. Sinon, je voterai blanc, cette couleur des bulletins qu'on ne veut pas décompter!

J'aurai ainsi, cette fois, non pas soutenu une fraction, mais affirmé ce que je pense actuellement.

_______

(1) Association pour la reconnaissance du vote blanc

11 place Maurice-Thorez

94800 Villejuif

France

(33) 01 42 11 96 86

voteblanc@sysu.com

www.vote-blanc.org

L’Association a été créée en 1994.

Objectif :

Aujourd’hui, au moment du dépouillement, un bulletin blanc est considéré comme nul. L’électeur qui a choisi de voter blanc disparaît des résultats. Il est assimilé à un abstentionniste. L’Association pour la reconnaissance du vote blanc milite pour que les bulletins blancs soient intégrés dans la catégorie des suffrages exprimés. Le suffrage universel doit revenir à un principe qu’il n’aurait jamais dû abandonner : un homme = une voix.




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Le 3 octobre 2013.
Et maintenant, exprimez-vous, si vous le voulez.
Jean-Pierre Dacheux

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