Nous entrons dans le temps de la nouvelle année avec deux questions majeures placées devant nous : le temps du grand âge et le temps du travail.
Devons-nous souhaiter mourir ou nous suicider avant de devenir dépendants ?
Devons-nous travailler pour un patron toujours plus et toujours plus longtemps ?
Le débat sur la dépendance fait évidemment apparaitre qu'il y a profit à réaliser sur les vieux dès qu'ils sont devenus bien incapables de résister au "prélévement"de leurs derniers sous, dans la poche des dirigeants privés d'entreprises gériatriques.
Le débat sur les 35 heures relancé par l'ex-socialiste Manuel Valls se situe dans le cadre, plus vaste, du temps global de travail salarié tout au long de sa vie.
Il s'agit de deux questions de civilisation sur lesquelles il convient de travailler avec rapidité car les rapaces et les volent déjà au-dessus de nos têtes.
Si quelque bon sens inspirait les bavards qui nous enfument avec des discours péremptoires sur ces sujets, en vérité liés, ils devraient nous rappeler que :
• depuis le XIXème siècle le temps de vie consacré à l'emploi a constamment reculé sans que soit affectée la production de biens.
• la France, qui a des résultats économiques inférieurs à ceux de l'Allemagne (dans la logique productiviste et capitaliste dominante en cours), a des durées moyennes annuelles de travail salarié supérieures et n'a nulle leçon à donner.
• le travail en entreprise, au-delà d'un certain âge (variable selon la santé et le désir de chacun) ne peut être soumis à la contrainte rigide de la loi.
• le partage des revenus dans une société civilisée s'entend de la naissance à la mort et ne peut faire l'objet d'une marchandisation de la dépendance.
• la croissance du chômage, quoi qu'on fasse, n'est qu'une manifestation de la diminution du temps à consacrer à l'activité salariée dans les sociétés technologiquement développées.
• les salariés dont on désire qu'ils travaillent plus de 35 heures par semaine sont souvent obligés de travailler beaucoup moins !
• la volonté patronale de diminuer la part du travail rémunéré par rapport au capital rétribué ne peut que conduire à diminuer le nombre de salariés ou le nombre d'heures employées.
• la productivité, conçue comme une efficacité productive en constante croissance, conduit à une fatigue et une usure affectant la santé et la durée de vie.
• entre l'allongement de la durée de la vie permettant de travailler plus sans du reste gagner plus, et la possibilité de consacrer du temps à une vie choisie, paisible et saine, il faudra choisir : ou travailler jusqu'à en mourir ou disposer librement de ses dernières années.
• payer les retraites et payer l'accueil des personnes dépendantes exige plus que des solutions financières ; il y faut de la solidarité en actes et une conception de l'homme fraternelle.
• c'est à la façon dont se prépare et s'organise la possibilité de vivre dans la dignité pour les citoyens âgés qu'on mesure le niveau de civilisation d'un peuple.
Une rupture idéologique totale apparait : l'insécurité sociale, qui est en marche pour satisfaire des intérêts financiers, va très vite devenir intenable. Nous avons atteint une limite, c'est celle du cynisme absolu appuyé sur des justifications qui ne sont que ratiocinations. Il faut s'indigner si l'on veut pouvoir conserver l'autonomie et la carté d'esprit d'un Stéphane Hessel nonagénaire ! Il faut aussi dire "non" et encore "non", manifester et multiplier les cortèges jusqu'à ce que les murs de la honte, comme à Jéricho, s'effondrent.
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Le 3 octobre 2013.
Et maintenant, exprimez-vous, si vous le voulez.
Jean-Pierre Dacheux